III. La Traversée des Montagnes
- La caravane avance de plus en plus difficilement dans les difficiles chemins de montagne, et il fait de plus en plus froid. La nourriture est rationnée, et certains des voyageurs parmi les plus fragiles meurent ou sont laissés sur le bord du chemin – ce qui revient au même. Les tensions sont de plus en plus vives, car Indra refuse, pour l’instant, de se lier à la Pierre de Soleil, au grand dam d’Argasto Golspiel. Chaque jour, les membres de la caravane doivent passer plus en plus de temps à chercher du bois pour le feu et à chasser.
- Le treizième jour, alors que Hador, Elgaï et Ulifos chassent, et Indra et l’Ami coupent du bois, nos Héros entendent non loin des hurlements sauvages et des cris d’effroi mêlés. Ils accourent pour trouver Belun et Ludo, couverts de sang, acculés par un Loup monstrueux, de la taille d’un cheval, et plusieurs loups plus normaux. Pendant que ses compagnons parviennent à se débarrasser des autres bêtes, Hador parvient à tuer le Loup monstrueux d’une flèche en plein cœur. Ce dernier se transforme alors en une jeune femme presque nue – en réalité une Elfe – vêtu d’un simple manteau de laine gris, et portant un étrange anneau de fer rouillé. Belun et Ludo sont saisis d’une angoisse indicible à la vue de ce corps.
« Sorcellerie ! » s’exclame Hador.
« Sorcellerie Elfe, effectivement ! » lui répond Lestra – qui vient d’arriver sur les lieux, et regarde avec suspicion les deux barbares
« Je me demande bien pourquoi cet être malfaisant en avait après vous… ». L’Ami s’empare du bracelet de fer rouillé :
« La marque du Pacte de Fer, cet antique serment autrefois scellé entre les elfes et les hommes… Maître m’en avait parlé ! », observe-t-il avec tristesse.
« Un serment maudit, prêté par des maudits ! », rétorque Lestra avec violence, « Nous en reparlerons, et dans bien peu de temps, je pense. »
- Apprenant la nouvelle, Argasto ordonne d’une voix stridente la levée immédiate du camp, malgré les supplications de ceux qui, épuisés, espéraient du repos. La caravane reprend la route à marche forcée, laissant derrière elle les plus faibles…
-La caravane atteint après une nuit de marche éreintante, un haut plateau. C’est alors qu’un vent terrible se lève, et que la neige se met à tomber dru. Argasto n’a pas d’autre choix que d’ordonner à la caravane de former un cercle de chariot afin de protéger les bêtes et les hommes de la tempête qui s’annonce. Alors que le vent hurle, l’Ami croit entendre l’écho d’une voix grondante.
« Un puissant rituel …», murmure-t-il.
« La marque de la Nuit Eternelle. Que Prios nous prenne en pitié » répond Lestra.
- La tempête retombe en même temps que se lève une aube blafarde. Le haut plateau est entièrement couvert de neige, et la caravane ne peut repartir. De nouveau, des tensions apparaissent sur la conduite à suivre. Argasto menace de laisser les contestataires derrière lui. Belun, qui a l’air de plus en plus malade, et Ludo discutent gravement de leur côté, et tentent de convaincre les Héros de rebrousser chemin aussi vite que possible. C’est alors que, de l’épais brouillard qui s’est levé surgissent deux silhouettes étranges : un cavalier elfe chevauchant un élan majestueux, et un Ours d’une taille colossale. Telk hurle de toute la force de ses poumons « Des Elfes ! Je crois que ce sont des Elfes ! »
- Dans un silence de mort, le mystérieux cavalier s’approche, alors que l’Ours se transforme également en Elfe. «
Je suis Godraï », dit le cavalier dans la langue des hommes
« et voici Saran-Ri. Livrez-nous les deux hommes connus sous les noms de Belun et Ludo ».
« Je doute que ceux-là soient d’une bien grande importance pour les Gardiens de Davokar » lui répond l’Ami.
« Détrompe-toi, Ogre. Ils ont violé les traités et brisé les tabous de leur propre Clan, en fouillant trop profondément le ventre de la Grande Forêt. Ce qu’ils ont réveillé est profondément mauvais et les a corrompus. Nous devons les prendre. »
-
« Nous n’avons pas peur de vous, elfes maudits », répond Elgaï
« Elgaï Ardagal ne livre pas ses frères d’arme. Votre compagne a payé pour le savoir ! » Une grande dispute éclate au sein de la caravane entre ceux qui veulent livrer les deux frères – qui se défendent comme des beaux diables - et les autres. Indifférent à cette discussion, l’Ami entend les Elfes murmurer entre eux en langue Elfique (
« Ils ont tué ma Keri-Las ». « Je sais, son sacrifice ne sera pas oublié. Mais seuls les deux barbares corrompus doivent mourir. La guerre ne commence pas aujourd’hui ». « La Guerre est inévitable, Seigneur. Si ce n’est pas aujourd’hui ». « Assez, maintenant ».). Les deux elfes repartent, non sans avoir menacé la caravane
« Nous aurons ces deux hommes. Livrez-les où le sang coulera. Nous reviendrons au crépuscule. ».
- La dispute reprend de plus belle au sein de la caravane. Indra est rapidement choisi comme juge par l’ensemble de la caravane. Belun et Ludo se jettent à ses pieds pour solliciter sa clémence.
Alors qu’Argasto et ses hommes, l’épouvante dans la voix, réclament que l’on livre les deux barbares (
« Mieux vaut ces barbares que nous ! »), Lestra interpelle Indra :
« Père, en ces temps difficiles, je ne peux plus rester silencieuse : je suis un Manteau Noir, un Frère du Crépuscule. Comme vous, je sers l’Unique de toutes mes forces. Le Monastère du Crépuscule n’est plus très loin, et nous devons y emmener ces deux hommes s’ils sont malades. Ne les laissez pas entre les mains de ces rejetons de la Nuit Eternelle ! »
Hador et Elgaï opinent. Ulifos hausse les épaules. L’Ami s’approche de Belun, et déchire son col. Les stigmates de ce dernier sont bien visibles.
« Les Elfes ont raison. Ces hommes sont corrompus. Mieux vaut les livrer, sinon le mal nous tuera aussi. ».
Belun tente, en bégayant, de se défendre, avant que Lestra insiste :
«Père, vous vous trompez lourdement si vous pensez que les livrer aux ennemis de l’Eglise. La volonté du Très-Haut est que les corrompus soient conduit au Monastère, où mes frères et mes sœurs pourront prendre soin d’eux ».
Indra rend sa sentence, et refuse de livrer les barbares, non sans avoir examiné laissé Hador examiner ces dernier. La maladie semble bien avancée chez Belun, et Indra se demande bien quels peuvent être les symptômes. Ludo jure qu’il n’a
« pas touché le crâne du Roi ».
Le cœur et les doigts glacés, toute la caravane se prépare au combat. En surveillant les alentours, Hador croit voir, dans le blizzard, une silhouette massive qui avance en claudiquant, en agitant sa tête d’avant en arrière de façon mécanique….
- Les Elfes attaquent au Crépuscule, alors que le blizzard fait rage. Les flèches empoisonnées de Godrai, la puissance de Saran-Ri, font des ravages, mais la caravane, Elgaï en tête parvient à repousser leur premier assaut. C’est à ce moment que Belun se met à pousser un hurlement inarticulé. Il semble trembler sous l’effet de puissances inconnues. Son corps se déchire de l’intérieur, alors qu’une chose innommable, immense, se fraye un chemin hors de sa peau. La chose monstrueuse, griffue, porteuse d’une étrange couronne d’os acérée, massacre les membres de la caravane. Indra et Hador s’effondrent sous ses coups. Au péril de sa vie, Elgaï fait face à la chose l’épée à la main, et parvient à la blesser gravement avant de tomber au sol, inconscient.
Les elfes tuent la chose, dont le corps se ratatine en une masse informe et pourrissante. Ils se retournent alors contre ce qui reste de la caravane.
D’un geste, l’Ami met fin aux hostilités.
« Vous aviez raison et vous nous avez vaincus. Prenez donc le dernier barbare, et permettez-nous de soigner nos blessés et d’enterrer nos morts ». « Tu es sage, Ogre, bien moins fou que tes compagnons », lui répond Godrai.
Lestra proteste, mais l’Ogre lui rappelle que
« nous n’avons plus les moyens de votre politique. Je suis certain que vous trouverez d’autres corrompus à étudier ». L’immense ours Saran-Ri s’empare de Ludo dans sa gueule et l’entraine dans le brouillard – qui finit par étouffer les cris épouvantables du mercenaire. Le grand seigneur elfe Godrai, monté sur son élan, disparaît à son tour dans la brume.
- De la caravane, il ne reste plus qu’une quinzaine de personnes. Une grande partie des bêtes de traits sont aussi mortes. Après avoir enterré les morts et soignés les blessés, l’expédition repart. Hador, qui sait que Mal-Rogan les suit, reste sur ses gardes. Mais rien ne vient jamais les attaquer pendant la nuit.
Après encore quelques interminables jours plus tard, neuf survivants en haillons, épuisés, malades, gelé, blessés et affamés parviennent jusqu’à la Passe de Prios, et aux flots verts de la Véloma, Devant eux, un immense camp de tentes misérables…
(Fin de cette petite partie pascale, jouée quasiment by the book, et en prenant du temps. Tout le monde a juré qu'on rejouerait bientôt. On verra bien

)