@Cédric Ferrand
J’ai grandi en Guadeloupe, une île où la nature, là aussi, impose à l’homme une existence empreinte de sensations vives et de souvenirs indélébiles. Là-bas, j’ai passé les premières années de ma vie de jeune enfant, cette enfance dont les réminiscences, éparses et fragmentées, s’imposent à l’esprit comme des tableaux d’un autre temps. Ces souvenirs ressurgissent avec une étrange familiarité lorsque, vingt-cinq ans plus tard, j'ai foulé à nouveau cette terre baignée de mer et de vent.
La chaleur accablante, dense comme un manteau invisible ; les moustiques, ces infatigables tourmenteurs, règnent en maîtres dans l’air saturé d’humidité. Partout, la mer, immense et omniprésente, semble murmurer des secrets anciens, tandis qu’à l’horizon, la Soufrière, majestueuse et menaçante, se dresse comme une sentinelle éternelle. Le sable noir, brûlant sous les pieds, contraste avec l’éclat des poissons multicolores qui peuplent les eaux cristallines. Les feuilles gigantesques, longues d’un mètre, et les insectes, étranges et inquiétants, témoignent de la luxuriance d’une nature indomptée.
Les voitures improbables, et le code de la route, adapté à une logique insulaire dès qu'on sort des villes, ajoutent une touche de pittoresque. pourtant je ne suis pas créole, ni ne l'ai jamais été. Je suis un béké, un blanc de métropole, un "Zoreil". La Guadeloupe de mon enfance, déjà filtrée par ma vie d'enfant, magnifiée par 40 ans de souvenirs, n'est certes pas réelle. J'en ai déjà constaté les différences lorsque j'y suis revenu au début des années 2000, mais ça ne change rien : nous avons au fond de nous (chacun notre île), une Guadeloupe fantasmée qui reste uniquement nôtre et secrète. On peut voir ça comme une propriété privée, maintenant
