[CR] Millevaux et autres jeux Outsider

Critiques de Jeu, Comptes rendus et retour d'expérience
Répondre
Avatar de l’utilisateur
Pikathulhu
Dieu d'après le panthéon
Messages : 3250
Inscription : dim. août 22, 2010 7:26 pm
Localisation : Morbihan
Contact :

Re: [CR] Les jeux d'Outsider

Message par Pikathulhu »

L'OGRE ET LE PETIT POUCET

Faire du jeu de rôle en narratif pur avec un enfant de six ans.

Jeu : Inflorenza, héros et drames dans l'enfer forestier de Millevaux

Joué le 21/08/2015
Personnage : Le Petit Poucet

Image
illustration : Gustave Doré, domaine public


Le théâtre :

On rejoue le conte du Petit Poucet. Le père du Petit Poucet et la marâtre viennent d'abandonner leurs sept enfants dans la forêt. Le Petit Poucet a pensé à semer des miettes de gâteau pour retrouver son chemin, mais un corbeau les a toutes mangées !
L'astuce du Petit Poucet n'a pas fonctionné et les enfants se retrouvent perdus.
Chaque joueur joue le Petit Poucet ou un autre des ses frères et sœurs, âgés de 5 à 18 ans.


L'histoire :

Le Petit Poucet et ses frères sont élevés dans une cabane par un couple d'adultes qui prétendent être leurs parents, mais en fait ce ne sont pas leurs vrais parents, ce sont de mauvaises personnes. Le "père" dit aux enfants de se préparer pour une promenade dans les bois. Le Petit Poucet pense à emporte une lampe-torche et un bâton.

Ils s'enfoncent loin dans les bois. Le crépuscule les rattrape. On entend les hiboux. Il y a des bruits de bêtes dans la forêt. Le croassement d'un corbeau fend la nuit.

Le beau-père allume un feu. Il raconte une histoire aux enfants. Dans la forêt, il y aurait un château, avec un ogre terrible qui aurait des bottes de sept lieues.

Il part ensuite chercher du bois. Mais il ne revient pas. Les enfants vont le chercher dans la forêt. Ils entendent un loup hurler à la lune ! Ils perdent le feu de vue et ils se sont tellement éloignées que la lampe du Petit Poucet s'éteint.

Ils se disent que le loup a peut-être capturé leur beau-père, alors ils montent le chemin pour attaquer le loup. Ils aperçoivent ses grands yeux brillants à travers la nuit, ils l'entendent pousser un grognement qui semble surgi du fond des âges, et enfin ils aperçoivent sa silhouette. Il a le ventre tout gonflé !

Les enfants prennent leurs jambes à leur cou et retournent au campement ! Ils abandonnent l'idée de retrouver le beau-père. Ils veulent rentrer à la maison mais il leur faudrait une carte. Ils n'en ont pas, mais ils savent que l'ogre en a une. Ils escaladent la colline pour aller au château de l'ogre. Cris des hiboux.

Quand ils arrivent au bord des douves du château, le pont-levis s'abaisse devant eux en grinçant, et la herse se relève dans un cliquetis sinistre. Des bruits de pas résonnent dans tout le château !

C'est l'ogre !

Il va au devant d'eux, immense, barbu. Il prend une voix très douce et leur demande s'ils sont perdus. Il leur dit qu'il n'est pas méchant comme dans les contes et il leur donne la carte, afin que les enfants puissent rentrer chez eux.


Retour sur le jeu :

Les parents de ce jeune homme de six ans m'avaient demandé de lui raconter une histoire pour l'endormir. J'ai pris le parti d'en faire un jeu de rôle.

L'enfant a plutôt orienté le rituel du conte. Il fallait éteindre la lumière et je devais avoir une lampe de poche, que j'ai utilisée pour faire des effets au mur, et que j'éteignais dans les moments les plus dangereux. Je n'ai pas pris la peine d'expliquer au joueur ce qu'était le jeu de rôle, je lui ai juste dit qu'il était le Petit Poucet et je lui demandais ce que le Petit Poucet faisait. Le joueur "malgré lui" a d'ailleurs plutôt décrit les actions des enfants dans leur globalité.

J'ai joué avec les règles d'Inflorenza Minima sans les expliquer.

En gros, les règles disent que quand le joueur veut réussir quelque chose de difficile, je lui demande un prix à payer.
Mais je n'ai demandé qu'une fois à prix à payer, pour trouver une trace de son beau-père, il fallait s'enfoncer dans la forêt assez loin pour perdre de vue la flamme du camp et pour que la lampe-torche s'éteigne. J'ai bien sûr coupé ma lampe-torche à ce moment-là.

Le joueur a dit lui-même quand le conte était terminé. Il a dit : "Maintenant l'histoire est terminée." quand j'ai décrit la herse qui se relevait. Je pense qu'il avait déjà eu un peu peur avec le loup et qu'il ne voulait pas affronter l'ogre. Je lui ai demandé si je pouvais quand même lui raconter la fin en une minute, en précisant que ça finissait bien, et j'ai donc conclu avec l'ogre gentil qui leur donne la carte.

Quand les enfants sont retournés au feu de camp après avoir fui le loup, le joueur a dit que le Petit Poucet avait une carte et j'ai émis un veto, racontant que la carte était chez l'ogre. C'était maladroit de ma part. Avec le recul, j'aurais préféré plutôt dire oui pour la carte et improviser une péripétie sur le chemin du retour.

Au total, ça a duré un quart d'heure. C'était plutôt minimaliste, mais c'était satisfaisant au vu de mes contraintes : j'étais seul avec un enfant que je ne connais pas bien, les parents étaient dans une autre pièce. Et ça m'a démontré qu'on peut faire du jeu de rôle avec les plus jeunes sans avoir besoin de dés ou de feuille de personnage.
Outsider. Énergie créative. Univers artisanaux.
Ma page Tipee.
Avatar de l’utilisateur
Pikathulhu
Dieu d'après le panthéon
Messages : 3250
Inscription : dim. août 22, 2010 7:26 pm
Localisation : Morbihan
Contact :

Re: [CR] Les jeux d'Outsider

Message par Pikathulhu »

POUR UNE POIGNÉE D'OR

L'issue imprévue à un choix impossible.

Jeu : Ghost Echo, pillards dans le monde spectral, par John Harper

Joué le 24/10/2015 au festival Les 24 H du Jeu, Theix, Morbihan
Personnage : le démon.


Image
crédits : Taigakoru, licence cc-by-nc, galerie sur flickr


L'histoire :

Le démon est passé par un arbre creux pour se rendre dans les forêts limbiques. Mais voilà qu'il se retrouve nez à nez avec un spectre qui porte un masque blanc sans expression. Le spectre lui demande ce qu'il ose venir faire dans le domaine des fantômes. Le démon répond qu'il recherche de l'or, pour financer une armée pour protéger sa famille. Le fantôme veut en savoir plus, le démon lui explique qu'il y a une guerre. Le fantôme lui demande où est sa famille. Il répond : en enfer. Ils sont morts à cause de la guerre, et maintenant ils sont en enfer, où la guerre continue, et ils sont en danger maintenant.

Le démon demande au spectre de lui dire où il peut trouver de l'or. Le spectre lui répond qu'il peut lui rendre un tel service, mais cela à un prix. Il lui demande d'aller trouver sa femme qui est en enfer et de lui dire qu'il est désolé. Il devra lui ramener une preuve : il lui donne une fiole pour qu'il recueille les larmes de sa femme.

Le démon retourne donc en enfer. Il trouve la femme du spectre, enchaînée. Des gouttes d'acide lui tombent perpétuellement sur le dos. Le démon lui explique qu'il vient de sa part de son mari, que son mari est désolé. La femme sourit dans sa douleur. Elle s'est jadis dénoncée pour les fautes qu'avaient commise son mari, et c'est ainsi qu'elle a fini ici. Elle ne croit pas au repentir de son mari. Le démon utilise toute sa science de démon pour la convaincre de la sincérité de ces excuses, et la femme finit par y croire. Elle dit : "Maintenant, je peux poursuivre mon supplice le cœur léger.". Elle se met à pleurer, des larmes de joie, que le démon s'empresse de recueillir dans la fiole.

Alors qu'il retourne dans la forêt spectrale, le fantôme au masque blanc s'empresse de vouloir boire ces délicieuses, délicieuses larmes. Le démon garde la fiole contre lui et lui rappelle qu'il doit tenir sa promesse. Alors le fantôme le conduit à travers la forêt vers l'endroit où l'on peut trouver de l'or.

Ils arrivent d'abord dans un endroit de la forêt qui ressemble au souvenir le plus triste du démon. C'est le moment où les armées ont tué sa famille. La forêt résonne du bruit des armes. Des haches fleurissent dans les arbres. Sa femme et ses enfants se présentent à lui. Ce ne sont pas les vrais, qui sont aux enfers, mais des fantômes qui leurs ressemblent en tout point, avec les mêmes souvenirs. Sa femme-fantôme le supplie de rester ici avec eux, alors ils pourront être heureux ensemble, ce sera beaucoup plus simple pour lui que de lever une armée pour sauver sa femme-réelle et ses enfants-réels des enfers. Mais le démon refuse, il comprend bien qu'il parle à un fantôme, certes qui l'aime, mais qui n'est pas vraiment sa femme. Alors il les abandonne sur place, désespérés.

Ils arrivent ensuite dans un endroit de la forêt qui ressemble au meilleur souvenir du démon. Ils sont dans la cabane le soir où il a tué son père alors qu'il battait sa mère. Ils sont là tous les deux, la mère au sol, épouvantée, et le père debout, qui lève sa ceinture. Le fantôme au masque d'or tend un couteau au démon, le même qu'il a jadis utilisé pour tuer son père. Il dit : "Pour avoir l'or, il faut que tu épargnes ton père, cette fois-ci."
Mis face au choix entre re-tuer son père et obtenir la pépite d'or qui sauvera sa propre famille, le démon prend une troisième voix : il se suicide avec le couteau.

Le fantôme au masque d'or se penche sur son corps ensanglanté. Il lui ouvre le cœur et en extrait une énorme pépite d'or. Il lui reprend aussi la fiole qui contient les larmes de sa femme.

Il tient les deux au-dessus de sa tête.

Il rit

rit

rit !


Commentaires :

Durée :
1/2 h

Mise en jeu :

Même constat que sur le précédent test de Ghost/Echo (Pactes) : le jeu ne fournissant qu'un univers très léger et le système de résolution ne générant que très peu de narration, j'ai compensé à mort pour obtenir une partie intéressante, et en l'occurrence, le climax est un pur détournement du jeu avec le système de prix à payer d'Inflorenza minima. J'en arrive aux mêmes conclusions : Ghost/Echo fournit une prémisse intéressante, mais demandera du travail ou de l'expérience à tout.e MJ qui souhaiterait dépasser le quart d'heure de jeu.
Outsider. Énergie créative. Univers artisanaux.
Ma page Tipee.
Avatar de l’utilisateur
Pikathulhu
Dieu d'après le panthéon
Messages : 3250
Inscription : dim. août 22, 2010 7:26 pm
Localisation : Morbihan
Contact :

Re: [CR] Les jeux d'Outsider

Message par Pikathulhu »

AL-ANDALUS

Une séance de cape et d'épées choral avec un Inflorenza sans phrases modifié pour que les joueurs restent bien dans leur personnage !

Jeu : Inflorenza, héros, salauds et martyrs dans l'enfer forestier

Joué le 05/09/15 à l'association de jeu de rôle du Cercle Paul Bert, à Rennes
Personnages : Meriam Al Hahouach, Rodruvo, Ahman, Alexandro Del Vidriera, Da Silva, Isabella

Image
crédits : nicholas hilliard, domaine public & angela7dreams, licence cc-by-nc, galerie sur flickr


Le théâtre :

On joue dans Al-Andalus, l'Espagne chrétienne et musulmane de Millevaux, plus précisément à Barcelone, la Cour d'Été, théâtre des intrigues politiques entre partisans de la royauté catholique et partisans du califat musulman. Après concertations, les personnages sont des agents secrets au service du chef du Parlement christianno-musulman, qui les charge d'aider à maintenir l'équilibre précaire du régime. Leur prochaine mission sera d'empêcher le mariage entre la Reine Alexandra la Catholique et le Calife Othmane El-Rikashi. Ils savent aussi par leurs espions que la Mano Senestra, une diabolique organisation, exerce un chantage sur la Reine, et qu'il faudra rapidement régler ce problème.


Personnages :

Meriam Al Hahouach
Objectif : payer ma dette d'honneur envers Da Silva en le protégeant (Da Silva a jadis sauvé l'honneur de mon père)
Symboles : indépendance, félin

Rodruvo
Objectif : monter en grade
Symboles : reconnaissance, chapeau à plumes

Ahman :
Objectif : équilibre
Symboles : équilibre, pur-sang

Alexandro Del Vidriera (en réalité, le personnage n'avait pas de nom, c'est un nom que le joueur lui a donné a posteriori)
Objectif : tuer tous les sbires de la Mano Senestra
Symboles : passé, main gauche

Da Silva, l'amant du Calife
Objectif : que le mariage de la Reine et du Calife ait bien lieu
Symboles : caballe (le cheval), rose trémière

Isabella, demoiselle d'honneur de la Reine
Objectif : acquérir plus de pouvoir
Symboles : Charme, classe


L'histoire :

Basilique de la Sagrada Familia. L'édifice baroque et végétal est atteint d'emprise, il a quadruplé de taille depuis son achèvement, amas de clochers en grappes, de champignonnières minérales, de statues, de feuilles et d'animaux sculptés, de piliers arborescents.

A l'intérieur, une forêt de piliers baignés de lumière, et devant l'autel le Cardinal Don Hernandez de la Roca, et le grand Imam de la mosquée d'Al-Milval, célèbrent un mariage. Agenouillés devant eux, le Calife et la Reine ! A cinquante ans, la Reine deux fois veuve est fraîche comme une adolescente et belle comme une madone.
L'un des témoins du Calife lui tend l'alliance destinée à la Reine. C'est Da Silva, le descendant d'une des plus anciennes lignées catalanes, tout de blanc et de plumes vêtu. Da Silva est l'amant du Calife, et il n'est pas partisan du célibat prolongé de ce dernier, qui fait courir les pires rumeurs à son égard. Pour Da Silva, le Calife doit se marier, et en cela il se montre infidèle à sa mission d'agent secret du Parlement.
Mais tous les autres agents sont là. Rodruvo, sergent de la garde royale, parmi les autres sergents et le Général. Ahman, celui des agents le plus acharné à maintenir l'équilibre du régime, et donc le plus farouchement opposé au mariage. Meriam, prédatrice orientale avec son cimeterre et sa panthère. Tous sont nobles et donc, tous ont le droit d'être là.
Alexandro attend derrière la grande porte, il prépare une entrée fracassante.
Le chef du Parlement, Rodrigue Ibn-El-Ahmek, est bien sûr présent aussi. Il ne tentera rien pour ne pas compromettre son rôle, mais il tient tous ses agents à l'oeil.

Ahman et Rodruvo s'interposent entre Da Silva et le Calife. Ruy, l'autre témoin du Calife (et rival de Da Silva dans le coeur du Calife) accuse Da Silva de traîtrise. Sur ordre du Général, les autres sergents se ruent sur Rodruvo, et l'estourbissent d'un coup de taser. Bousculé, Da Silva lâche l'alliance qui part dans les airs en arc de cercle, en haut de l'allée principale.

Alexandro ouvre la grande porte de la Basilique avec fracas, ses deux épées dehors. Une personne en capeline carmine se jette sur elle avec un mouchoir empoisonné : la Mano Senestra ! Mais Alexandro l'envoie valser d'un coup de coude.

Une autre personne en capeline carmine sort des rangs pour se jetter sur la bague : elle s'appelle Angela, c'est un membre notoire de la Mano Senestra, une femme au visage beau, mais grave, un oeil mort et blanc, et un tatouage d'ailes d'ange sur le haut de sa poitrine, dont le décolleté de son corset ne laisse masqué aucun détail.

Meriam se jette dans l'allée, tout cimeterre dehors. Mais plusieurs encapuchonnés l'empoignent et l'enlèvent hors de la Basilique.

Ahman ferraille avec Angela, qui est armée d'une dague empoisonnée. La panthère se rue aussi sur Angela, mais Ahman transperce le félin dans la mêlée. Meriam, alors emportée par ses ravisseurs crient : "Ahman, je vais te tuer pour ton crime !"

A la disparition de Meriam, le chef du Parlement tape sur l'épaule d'Isabella, une des dames de compagnie de la Reine, également son témoin. Isabelle est un agent dormant, il est temps pour elle de passer à l'action. Elle aussi se précipite sur Angela, mais écope d'un coup de dague empoisonné au venin-corbeau.
Un corvillon est en train de pousser dans son épaule, au creux de la blessure. Elle appelle d'urgence un médecin. Clara, l'autre dame de compagnie et témoin, lui offre ses services. Elle n'est pas médecin, mais désenvoûteuse, et d'après elle un médecin ne serait d'aucun recours pour cette blessure magique. Si on ne fait rien, le corvillon grandira et deviendra corbeau, il s'expulsera de la chair d'Isabella en faisant force dégâts. Elle entraîne Clara dans un confessionnal et lui soigne sa blessure avec un linge humecté d'eau bénite, et des prières égrénées sur son chapelet : elle utilise l'égrégore des sacrements chrétiens pour désenvoûter. Le corvillon dans son épaule meurt et devient blanc, Isabella va tousser des plumes blanches pendant quelques temps mais elle est tirée d'affaire.

Alexandro charge pour traverser l'allée, mais il est stoppé en chemin par Lion, le chef de la Mano Senestra, en encapuchonné avec un masque de lion doré et déformé, qui l'intercepte avec son épée à la garde garnie de crochets pour piéger les lames d'Alexandro.

La garde califale se jette sur Da Silva, qui s'écroule à terre et fait des simagrées. Ruy, écarte alors les dagues, et prend le visage de Da Silva dans ses mains : il est tellement désolé, et par ses gestes et ses pleurs, il avoue en quelque sorte l'amour transi qu'il porte à Da Silva en secret.

La garde califale s'empare d'Angela et récupère l'alliance. Le mariage est finalement bien prononcé ! De rage, le chef du Parlement démet Da Silva de son rôle d'agent secret.

Le lendemain, dans le palais du Calife. Le Calife a convoqué Da Silva dans une de ses antichambres, il lui demande pourquoi il a commis cette folie de s'opposer au mariage. Da Silva comprend que le Calife n'a plus de sentiments pour lui. La Reine l'a probablement envoûté ! Il lui jette au visage la bague qui porte les armoiries de sa famille, un objet chargé de l'égrégore de sa lignée et de son amour pour le Calife, et le charme est rompu.
Le Calife réalise l'erreur qu'il a commis. Il faut que les agents trouvent une stratégie pour invalider le mariage : le Calife ne peut prendre le risque d'annuler le mariage lui-même (il pourrait le faire, en tant que Commandeur des Croyants) car il y perdrait la face. Il faut trouver un autre stratagème.

Le temps presse, déjà la Reine et toute sa suite (dont Clara et Isabella) entrent dans le palais du Calife. Dans la suite, il y a de nouvelles personnes, visiblement des agents de la Mano Senestra, comme cette femme au port raide, avec un visage fixe et une fraise monumentale qui masque la probable monstruosité de son cou.

Isabella a dû favoriser Clara auprès de la Reine pour payer sa dette.

La prison de la garde royale. Rodruvo est au cachot. Le Général vient le voir pour le sermonner, mais Rodruvo lui explique le complot qui est à l'oeuvre, alors le Général lui restitue son poste et lui confie des hommes pour tirer ça au clair.

Sous couvert de rendre visite à Rodruvo en prison, Da Silva, Ahman, Isabella et Clara se rendent dans le cachot où est détenue Angela. Ils projettent de s'en prendre à la Mano Senestra, et pour cela il leur faut avoir un agent infiltré. Isabella demande à Clara d'exorciser Angela. Au départ, c'est très difficile. Clara tente quelques prières qui n'ont aucun effet. Angela prend un visage très dur et étrange, elle leur rie au nez ! Elle n'est pas un suppôt de Satan, mais d'une puissance sans nom, bien plus terrible et réelle que le Diable ! Isabella motive Clara, Clara se donne à fond et parvient à exorciser Angela, qui jure alors de les aider contre ceux qui l'ont envoûtée, profitant alors du pouvoir liée à sa haute lignée (plus une personne a de sang bleu, plus elle accumule d'égrégore) pour la conditionner à devenir une puissante sorcière. Mais Clara est profondément ébranlée par cette épreuve.

Mais Isabella lui demande encore une contribution. Grâce aux nombreux espions d'Ahman, ils savent que la Reine se rend tous les jours à la Maison Rouge, un établissement de plaisirs tenu par la Mano Senestra. Leur sarcomancienne accomplit un rituel de rajeunissement sur la Reine, et c'est pour ça qu'ils la tiennent sous leur botte. L'ont-elle envoûtée ou est-elle juste accro à la jeunesse éternelle ? Mystère. Le plan des agents : trafiquer le rituel pour que la Reine s'en trouve potentiellement enlaidie, et retourne sa colère contre la Mano Senestra. Colère qu'ils devinent terrible : si le sang bleu concentre l'égrégore, alors la Reine Alexandra la Catholique a certainement d'immenses pouvoirs.

Ils vont tous s'infiltrer à la Mano Senestra, mais ils ont aussi besoin de Clara : ses pouvoirs d'exorciste tomberaient à poing nommé. Clara est blanche de peur, mais elle accepte, pour faire son devoir de chrétienne contre les forces du Mal.

Les espions d'Ahman l'informent aussi qu'Alexandro a jadis fait partie de la Mano Senestra ! Ils lui montrent des polaroïds attestant qu'il a jadis fréquenté la Maison Rouge avec assiduité. Après une solide explication, Alexandro lui explique qu'il a jadis été victime de leur envoûtement, comme Angela, et qu'il désire ardemment se venger et tous les passer par le fil de l'épée. Ahman est rassuré sur ses motivations et le laisse prendre part à la mission.

Le soir, la Maison Rouge, où les enfants de haute noblesse viennent payer lr prix fort pour s'encanailler. Tous portent des masques d'animaux. La Reine porte un masque d'aigle, elle vient ici avec sa suite rapprochée, Isabella et Clara ont pu obtenir d'en faire partie. Da Silva, tout de blanc et de plumes vêtus, masque de chouette arctique, est parmi les nobles. Alexandro et Ahman sont là aussi, plus discrets. Tout est rouge dans la Maison : coussins, draperies, bougies, tapisseries. Un homme à masque de cochon poursuit un homme tout nu en riant. Des couples se forment et s'isolent dans des salons particuliers : bien qu'on ne voit rien de ce qui s'y passe, on le sent. L'égrégore est concentrée au point de donner la migraine. Clara est paniquée, Alexandro la prend en pitié et l'assure de sa protection.
Petroubo est placé dehors, avec dix hommes sous ses ordres. Ils sont postés à la sortie du tunnel de contrebande qui mène au sous-sol, parés à agir.

La Reine descend au sous-sol et les agents la suivent discrètement.
Le sous-sol est un enfer végétal, racines et troncs monumentaux, bougies rouges.
La Reine s'étend nue sur le tronc central. Au-dessus d'elle, une prêtresse sarcomancienne, femme asiatique au visage et aux bras tracés de spirales. Ses mains gantées trempent des aiguilles dans un tronc creux rempli de fluide sarcomantique. Elle commence d'abord à resculpter les jambes de la Reine, où déjà des varices crevaient de sous la peau, après vingt-quatre heures passées depuis le dernier rituel.

Clara verse subrepticement quelques gouttes d'un philtre de sa fabrication dans la vasque de liquide sarcomantique.
La sarcomancienne, qui n'a pas repéré le manège, revient à la vasque et y trempe de nouveau ses aiguilles.

La Reine insiste pour que Clara et Isabella subissent aussi le rituel, pour qu'elles connaissent "le même bonheur" qu'elle. Clara est terrorisée, mais elle s'allonge quand même sur un tronc, surveillant Alexandro du coin de l'oeil.

La sarcomancienne s'apprête à refaçonner le visage de la Reine, mais celle-ci demande d'abord à ce qu'elle fasse le visage d'Isabella. Isabella ne pipe mot, et laisse la prêtresse pratiquer le rituel sur sa figure, sachant très bien le résultat.

Le produit met du temps à agir, alors la Reine ne constate pas qu'il y a un problème, et la sarcomancienne verse ensuite le liquide sarcomantique sur son visage.

Les hommes de la Mano Senestra surgissent. Baston fulgurante avec les agents. Alexandro parvient à sauver Clara, sa rédemption, mais il est tué par Lion, son ennemi juré. Petroubo et ses hommes déferlent à la rescousse.
Isabella se relève, son visage est couvert d'une crème de liquide sarcomantique en effervescence, les effets ne vont pas tarder à se manifester. Elle se jette sur la sarcomancienne et toutes deux plongent dans la vasque de liquide sarcomantique. Ainsi, Isabella ne sera pas partie toute seule !
Da Silva crame toute son égrégore de sang-bleu, il exorcise autant d'hommes de la Mano Senestra qu'il veut dans une explosion de lumières blanches, mais il s'écroule aussitôt après.

La Reine se redresse. Ses joues, son nez, son front se sont atrocement déformés, amas de globules et de verrues où poussent de longs poils solitaires....

Elle crie.

"MON VISAAAAAAGE !"


Règles utilisées :

L'objectif était de jouer du cape et d'épées, en mode flamboyant espagnol. Certes, il s'agissait de jouer dans l'esthétique, pour autant je voulais que les joueur.se.s puissent rester immergés dans leur personnage, ne pas faire trop de choix esthétiques eux-mêmes, ne pas se placer en surplomb de leur personnages.

J'ai opté pour un Inflorenza sans phrases, un peu comme celui testé dans La Main Sanglante.

Mais avec de substantielles variations pour coller à mon programme.
On joue toujours sans feuille de personnage, mais cette fois-ci, les phrases ne sont pas remplacées par des points de vie, mais par des d12 : comme ça tout le monde voit où ses petits camarades en sont.
Quand on veut agir lors d'un conflit, on doit décrire une action ou un inventaire (motivation, ressource ou handicap) pour obtenir de poser un de ses d12 au milieu de la table. Les actions et inventaires qui apportent de la nouveauté (comme sortir un pistolet alors qu'on n'en a jamais décrit avant) ne rapportent pas de dé pour cette fois, mais pourront en rapporter une prochaine fois.
Entre chaque posage de dés, le Confident raconte une action ou un inventaire des figurants, pour rendre l'affrontement dynamique.
Si possible, les joueurs ne réagissent pas à ce que viennent de faire les figurants s'ils ne peuvent ou veulent pas poser de dés, ils laissent ceux à qui il reste des dés les aider, pour rendre l'entraide propre au style de cape et d'épées, très collectif, que je recherche.
Quand le joueur en conflit et ses assistants en ont assez de poser des dés, le joueur en conflit lance les dés.
S'il y a un moins un 1, un 2, un 11 ou un 12, le conflit est remporté.
S'il y a des dés qui ont donné 11-12, ils font des enfants : des dés de fortune (un par dé 11-12, limité par le nombre de joueurs qui ont contribué à ce lancer de dés). Les 3-10 font aussi des enfants : des dés de revers (dans les mêmes proportions).
S'il y a un dé qui a donné un 1-2, il meurt, le Confident le récupère. Si les autres dés avaient fait des enfants, il tue aussi ces enfants. S'il y a plusieurs dés 1-2, ils meurent et tuent tous les autres dés et leurs enfants. (vous reconnaîtrez le fonctionnement habituel d'Inflorenza avec phrases).

Le Confident prend chaque dé de fortune et le relance pour obtenir un symbole (suivant le tableau des symboles habituel, à 12 entrées). Il annonce à haute voix le symbole et la conséquence, sans nommer le personnage qui la subit. Par exemple : Fortune en amour : un figurant tombe amoureux d'un personnage durant ce combat.
Idem pour les dés de revers. Par exemple : Revers en nature : Angela blesse un personnage avec un lame empoisonnée contenant un maléfice de corvillion.

Le joueur en conflit récupère d'abord les dés lancés qui ont survécu et les redistribue entre lui et ses assistants. Puis il récupère les dés de fortune et de revers, il les répartit entre lui et ses assistants. Toute personne qui récupère un dé de fortune et de revers pour le refuser, dans ce cas son personnage ne subit pas la fortune ou le revers annoncé par le Confident, mais sa réserve de dés ne grossit pas.

Si à l'issue d'un conflit, un joueur ne récupère aucun dé et qu'il n'a plus de dés dans sa main, son personnage est éliminé, il raconte comment. Il recrée un nouveau personnage avec autant de dés que l'ancien en disposait au début du conflit.

D'une façon générale, quand la réserve de dés d'un joueur diminue à l'issue d'un conflit, on sait juste qu'il est atteint, fatigué ou blessé, mais on n'a pas d'obligation de le narrer, et surtout on n'est pas obligé de sacrifier une de ses valeurs ou une de ses motivations, comme c'est le cas dans Inflorenza avec phrases. Cela permet au joueur de rester en posture de défendre les intérêts de son personnage, qui peut conserver la même moralité et les mêmes motivations tout au long de la séance.

J'ai organisé le jeu en tours invisibles. Si lors d'un tour, il n'y avait pas de conflit, je tirais un dé sur le tableau des symboles et je proposais au joueur une fortune ou un revers lié au tirage de symbole (par exemple, un dé de clan déterminait qu'Ahman avait des espions sous ses ordres), et j'offrais ce fait accompagné d'un "dé d'expérience" : le joueur devait accepter le fait s'il voulait récupérer le dé.

J'ai fait jouer deux affrontements avec des personnages bidon pour tester le système, puis j'ai lu aux joueurs la description d'Al-Andalus et de Barcelone tirées de l'Atlas.

Pour finir, je demande aux joueurs de créer leurs personnages avec les différentes contraintes : un groupe soudé, un objectif de groupe, un objectif personnel, deux symboles inventés par les joueurs (et non intégrés au tableau des symboles que j'utilisais pour les fortunes et les revers, ils m'ont juste servi pour ma narration). Tous les personnages devraient être nobles ou pouvoir se faire passer pour tels, afin d'avoir leur entrées à la cour, et devaient tous êtres des escrimeurs et des courtisans émérites.

J'ai trouvé pour ma part que le système a tout à fait tenu ses promesses, le jeu était fluide, les affrontements épiques. Cela ressemblait beaucoup à un jeu traditionnel, à une partie de Seventh Seas qui aurait été réussie. Peut-être qu'on n'a pas utilisé le décor autant que dans un Mortal Karthage, mais à part ça tous les marqueurs du cape et d'épées flamboyant étaient présents, tant dans les combats que les intrigues de cour.


Retour des joueurs :

Joueur d'Ahman :
on finit avec trois morts > je ne m'attendais pas à une telle létalité. Du coup, c'était riche en tension, mais comment faire pour jouer en campagne ? [ma réponse : en campagne, on va davantage s'économiser sur les jets de dés, en fait on garde un grand contrôle sur la mortalité de son personnage, du moment qu'on ne cherche pas à tout prix à remporter tous les conflits]

Joueur de Rodruvo :
+ Ce serait mieux de décider de ses symboles en cours de route, c'était difficile de le faire à la création. [ma réponse : on peut changer de symboles à tout moment, mais j'ai omis de le préciser lors du briefing].

+ Je me suis trop pris la tête sur la création de personnage. J'avais commencé à imaginer sa famille. [ma réponse : a priori, il m'aurait décrit sa famille, j'aurais essayé de l'exploiter]
+ Commentaire suite à la lecture du compte-rendu : Pour dire mon impression, résumé de cette manière, je n'ai pas vraiment l'impression de retrouver mon expérience de jeu. Cela me fait voir les choses autrement. Notamment, sur les actions auxquelles mon personnage a participé, c'est différent de mon souvenir. Peut-être parce que, finalement, les péripéties de ce personnage ne se sont pas révélées essentielles par rapport à l'intrigue. Je me suis rendu compte qu'à la vue du résultat, mon personnage pouvait aussi bien ne pas être là. J'en conclus donc une chose supplémentaire à postériori. C'était ma première expérience d'un système qui encourage la narration partagée et ça m'a un peu déstabilisé parce que je ne m'y attendais pas bien qu'au bout du compte j'ai trouvé ça sympathique. J'ai d'ailleurs pu approfondir depuis en découvrant la chaîne Youtube et les Magnétos. Toutefois, la narration partagée peut créer une accumulation d'informations inutiles comme celles dont je me souviens et qui, finalement, étaient superflues. Je crois que ce n'était pas forcément le cas dans l'enregistrement d'une autre partie que j'ai écouté. Du coup, je me demande si le jeu ne prévoit pas qu'il y a une «bonne» façon de jouer, en cherchant à raccrocher toutes les informations entre elles pour éviter de laisser cette tâche au Confident. Parce que, ça, je l'ai peut-être mal fait. Trop d'informations inutiles, c'est ce qui fait de mauvaises histoires. On ne s'en rend pas compte en jouant, donc en créant, mais à la lecture ou l'écoute c'est moins agréable.
- Réponse de Thomas : En mettant de côté les possibles erreurs et omissions de ma part lors de la rédaction de compte-rendu, ne crois-tu pas que pendant le jeu, les actions de Rodruvo ont eu un impact dans l'histoire, ne serait-ce que par ses actions qui rapportaient des dés dans les conflits ? Les conséquences de ses actions ne sont-elles pas aussi à lire dans ce qui ne s'est pas passé ? Par exemple, quand Rodruvo arrive à convaincre le Général de sa bonne foi et lui fait réaliser l'existence d'un complot, il met les troupes catholiques du côté des personnages : si leur aide est peu décisive (de mémoire, un dé dans le conflit final), le fait que cette faction soit dans le camp des personnages et non pas dans le camp des adversaires a été décisif. Une partie de jeu de rôle, c'est un ensemble de choses qui se produisent + un ensemble de choses qui sont évitées. Le compte-rendu ne sait pas mettre en valeur la deuxième chose, alors que c'est un ensemble très important dans le ressenti pendant la partie. De surcroît, Inflorenza est un jeu où on veut faire progresser l'objectif d'un groupe, mais aussi l'objectif de chaque personnage. Or, il me semble qu'on a tout à fait joué l'objectif de Rodruvo, qui était de monter en grade, et qui s'est joué par une série de grâces et de disgrâces. Rodruvo n'est pas comme Indiana Jones dans les Aventuriers de l'Arche Perdue, où l'histoire serait exactement la même sans l'intervention d'Indiana. J'entends aussi par là que l'objectif d'une partie de jeu de rôle, c'est la partie de jeu de rôle. Pas la ou les histoires qu'on pourrait raconter après. Même réflexion sur les informations inutiles. En jeu de rôle, avoir un surplus d'informations, tant que ça ne ralentit pas le rythme (et cette partie était assez rythmée), est utile, parce qu'elle fournit au MJ et aux joueurs des éléments pour rebondir. La partie de jeu de rôle se construit sur un semis d'éléments narratifs, certains sont retenus, d'autres oubliés, mais toute l'abondance initiale concourt à l'émergence de la partie. Ceci dit, puisque tu t'interroge sur la façon dont tu jouerais une prochaine fois, je crois que si ta préoccupation, c'est d'avoir un impact fort sur l'objectif de groupe, il te suffit de t'impliquer dans les conflits de tout le monde, de tisser des liens et des conflits d'intérêts avec les autres personnages ; supposons par exemple que Rodruvo se rapproche d'Ahman, de Da Silva ou d'Isabella pour leurs positions hiérarchiques enviables, ou qu'il cherche à apprendre des talents martiaux d'Alexandro ou d'Ahman. Les règles d'Inflorenza te permettent de fourrer ton nez partout.

Joueur d'Alexandro :
+ S'il y avait eu la version avec phrases et avec sacrifice, ça ne m'aurait pas convenu, car ça m'aurait forcé à casser l'image que je me faisais de mon personnage. [ma conclusion : en discutant avec françois, j'ai compris qu'il aimait surtout "jouer UN personnage", défendre les intérêts de son personnage, vivre dans sa peau, et non faire des choix esthétiques pour son personnage > cette version où les sacrifices engendrent seulement de l'attrition et non un bouleversement des valeurs ou de l'état du personnage, était donc en effet
plus adapté pour lui. Or, c'était le but de cette version, donc très cool.]

Joueur de Da Silva :
+ Cela fait un gros travail d'impro pour le Confident. [Ma réponse : le jeu fournit des routines d'impro, et si on veut que le Confident bosse moins, alors on n'a qu'à laisser les joueurs décrire leurs fortunes et leurs revers, ou même carrément jouer en Carte Rouge.]


Aménagements à tester :

+ Les joueurs prenaient toujours les fortunes et les revers, et ça m'a étonné. Je pensais notamment que Rodruvo ne prendrait pas le coup de taser car cela ridiculisait son personnage. Peut-être pourrais-je préciser que quand on refuse un dé ou de fortune ou un dé de revers, que ça a une justification en narratif : le héros méprise les honneurs et les récompenses, ou évite un mauvais coup de justesse.
[réponse du joueur d'Alexandro : « Je pense qu'un facteur important nous a aussi fait accepter tous les dés : leur rareté. Vu la vitesse à laquelle les dés disparaissent, et vu le nombre réduit que nous possédions, nous pouvions difficilement en laisser échapper. Pour moi en tout cas, c'était la motivation principale. »]

+ Quand un personnage est éliminé, comme ce fut le cas de Meriam, peut-être aurais-je pu permettre à sa joueuse de réendosser le rôle au bout d'une scène. Encore que le plus élégant serait de résoudre ça en narratif : si le groupe libère Meriam, alors la joueuse peut reprendre ce rôle ?

+ De même, je pourrais insister sur le fait qu'on peut changer de personnage si le nôtre nous a lassé, surtout en campagne.
Outsider. Énergie créative. Univers artisanaux.
Ma page Tipee.
Avatar de l’utilisateur
Pikathulhu
Dieu d'après le panthéon
Messages : 3250
Inscription : dim. août 22, 2010 7:26 pm
Localisation : Morbihan
Contact :

Re: [CR] Les jeux d'Outsider

Message par Pikathulhu »

[Jeu de rôle enregistré] The Agents.

Une partie du jeu de Magimax où l'on interprète des agents du gouvernement qui mènent des enquêtes mystérieuses... Toute référence à une série télé qui vient de réapparaître sur nos écrans est totalement fortuite ! Le jeu se télécharge ici.

Image
crédits : myspomer, licence cc-by-nc, galerie sur flickr.com
Outsider. Énergie créative. Univers artisanaux.
Ma page Tipee.
Avatar de l’utilisateur
Pikathulhu
Dieu d'après le panthéon
Messages : 3250
Inscription : dim. août 22, 2010 7:26 pm
Localisation : Morbihan
Contact :

Re: [CR] Les jeux d'Outsider

Message par Pikathulhu »

N'AYEZ PAS PEUR

Retour à l'Autoroute des Larmes, du difficile équilibre entre ambiance et tension.

Jeu : Inflorenza, héros, salauds et martyrs dans l'enfer forestier de Millevaux

Joué le 24/09/2015 sur google hangout
Personnages : Eyota Creek, Allison Blake

Enregistrement de la partie disponible sur ma chaîne youtube


Image
Source : Museum of Photographic Arts, domaine public


Le théâtre :

L'Autoroute des Larmes
À travers la forêt canadienne, une route qui n'en finit pas. De jeunes amérindiens font du stop. Disparitions. Un road-movie triste et chamanique dans les forêts immenses du Grand Nord.

Qu'est-il arrivé aux disparus ? Les retrouvera-t-on ? Qui est responsable ?
Que vous soyez le proche d'un des disparus, un usager de la route, un membre de la police qui fait des recherches, un bénévole qui organise des battues, un auto-stoppeur, un habitant de la forêt, un indien qui survit dans la misère ou encore une de ces personnes infréquentables qui rôdent dans la région... la route ne vous épargnera pas.

Si les aventures d'Inflorenza ont lieu dans un futur post-apocalyptique, ce scénario a lieu de nos jours. On joue les prémisses de cet avenir sombre, les premières manifestations de l'oubli, de l'emprise, de l'égrégore et des horlas.

Ce théâtre a été publié dans le magazine Di6Dent


Personnages :

Eyota Creek, adjointe aux Affaires Autochtones.
Objectif : enquêter sur les disparitions de l'Autoroute des Larmes

Allison Blake, étudiante en dernière année de journalisme
Objectif : réaliser un reportage-choc sur les disparitions de l'Autoroute des Larmes


L'histoire :

Allison Blake est une pimpante étudiante en journalisme à Vancouver. Blonde, en tailleur, elle rêve de se faire une place chez les grands. Pour son sujet de fin d'études, elle a décidé de couvrir les drames de l'Autoroute des Larmes. Elle se réserve le rôle de la présentatrice, et s'est adjointe comme binôme à la caméra un autre étudiant, Matthew Washington, qui est afro-américain. Elle savait qu'il ne pouvait pas refuser ce service pour la bonne et simple raison qu'il est amoureux d'elle.

Cela fait trois jours qu'ils pérégrinent dans les contrées sauvages de la Colombie-Britannique. Ils sont arrivés à la "dernière station-service avant la fin du monde". Le gérant, un type a l'air dégueulasse, une tête de pervers, leur a dit qu'ils auraient un max d'infos s'ils poursuivaient jusqu'à la réserve indienne de Camp du Lac, à 3H de route de là... avec bien sûr plus aucune station entre les deux. Les deux journalistes poussent donc jusqu'à Camp du Lac avec leur van bourré à craquer de matériel "de survie". Le pompiste leur a parlé du chamane Chayton Creek, qui aurait sûrement beaucoup de choses à leur dire sur le sujet. Ce chamane prétend que les malheurs qui arrivent aux natifs sont des punitions de la forêt pour l'avoir abandonnée aux mains des colons blancs. Pour l'approcher, ils devraient passer par sa fille, Eyota Creek, adjointe aux Affaires Autochtones.

Quand ils arrivent à Camp du Lac, Allison et Matthew foncent vers le bureau de la police autochtone, un bâtiment en préfabriqué de taille modeste. Matthew filme. Contre le mur du bureau, un clochard natif fait la manche, à l'insu des autorités. Allison y va de son commentaire misérabiliste.

L'accueil est tenu par une agente auxiliaire, Abey Leoni, une jeune italo-indienne en uniforme (ses collègues la chambrent en disant qu'elle est une taupe de la mafia). Il y a beaucoup d'affiches vantant les actions du Gouvernement, et notamment sur la campagne de formulaires pour faire reconnaître son statut de natif sur les papiers d'identité. Il y a aussi un grand panneau de bois sur lequel sont affichés une trentaine de portraits de disparus. Le lieu sert de chapelle ardente. Des bougies et des pièges à rêves sont déposés au pied. L'affaire commence à devenir réelle, aux yeux de la jeune étudiante.

Le rouge monte aux joues d'Allison. Elle a même une petite larme à l’œil. Washington la filme. Il y a un natif cinquantenaire, qui porte une doudoune et de grosses chaussures. C'est Bill. Ils le filment. Bill demande : "Pourquoi vous filmez ?". Allison demande à Washington de couper la camera mais lui fait le geste convenu pour qu'il bascule en caméra cachée.

Bill demande à Leoni s'ils ont des nouvelles de son fils, elle répond que non. Il se laisser interroger devant le panneau d'affiches. Il montre l'affiche de son fils, on voit que sa disparition date d'il y a sept ans. "Je viens ici tous les jours au cas où il y aurait du nouveau. Mon fils faisait les meilleurs home run de tout le Comté. Il devait intégrer une équipe à Vancouver. Il a fait du stop pour y aller et c'est comme ça que..." Bill a du mal à retenir ses larmes.

Leoni vient les chercher : Eyota Creek peut les recevoir. C'est une indienne mais elle ne porte pas de fioritures traditionnelles. Elle est en uniforme. Son bureau est sobre.
"On souhaitait vous parler en tant que sheriff adjointe.
- Je ne suis pas sheriff. Appelez-moi juste adjointe. Coupez la caméra, s'il vous plaît."
Matthew passe en camera cachée, Allison lui fait signe que non. Matthew lui passe un mot : "On se fait un dîner ce soir, sinon je coupe pas." mais il se fait griller par Eyota, il est contraint de couper.

Allison explique l'objet de son reportage, elle insiste sur le fait que c'est injuste que personne ne s'intéresse à ces drames. Eyota lui dit qu'une journaliste est venue il y a quatre ans et qu'elle a disparu elle aussi. Cela sonne comme un avertissement. Allison voulait parler de Chayton (elle ne sait pas qu'il est en froid avec sa fille, qui rejette la tradition et le chamanisme) mais elle n'en aura pas l'occasion.

Leoni fait irruption dans le bureau sans frapper. La gérante du drugstore lui signale une bagarre impliquant un policier du Comté. Eyota se lève pour aller sur les lieux. Leoni demande à l'assister, elle brûle de faire ses preuves, mais Eyota lui dit qu'une personne doit rester au bureau.

Il n'y a qu'à traverser la route pour rejoindre le drugstore. Allison et Matthew suivent Eyota, caméra au poing. Eyota arrive dans l'arrière-cour du drugstore, à côté des distributeurs de boissons. Il y a là Gordon, un policier du Comté, au visage rond, ventripotent. Il y a une femme indienne à terre, les cheveux longs avec un frange, maquillée, en jupe et talons hauts. Gordon lui donne des coups de pieds dans le ventre et l'insulte : "Sale connard !".

A la vue d'Eyota, il se calme aussitôt. Eyota s'assure d'abord que la femme n'est pas en danger de mort, puis elle prend rapidement Gordon à part. Gordon est en panique, il explique que ce "trans" l'aurait "dragué". Il lui demande de passer l'éponge, il est venu dans le cadre d'une enquête. C'est lui qui enquête sur la disparition de la journaliste il y a quatre ans, ça Eyota le sait, il a accumulé un gros dossier maintenant, et il vient à la réserve car il a de nouveaux éléments et qu'il veut interroger des personnes.

Eyota lui dit d'espérer que la jeune personne ne porte pas plainte, et pour ce qui est de l'enquête, il n'est pas dans sa juridiction. Elle lui dit de revenir avec une autorisation. Ensuite, Eyota amène la jeune personne au dispensaire pour la faire soigner. Elle a le visage tuméfié et une lèvre éclatée, des bleus au corps, mais heureusement pas de côte cassée. La personne dit s'appeler Angeni. Angeni Leoni. Eyota comprend que c'est le grand-frère d'Abey. Eyota lui demande ses papiers, elle dit qu'elle les a brûlés. Angeni lui explique que ça fait un an que sa grande soeur, Rose, a disparu. Depuis, Angeni a compris qui elle était vraiment au fond d'elle. Eyota la met en garde : "C'est risqué de s'habiller comme ça dans la réserve." Angeni se brusque facilement, elle suppose qu'Eyota veut la brimer, alors Eyota doit constamment revenir sur ce qu'elle a dit, elle essaye de professer la prudence sans passer pour une transphobe et sans chercher à la culpabiliser. Angeni raconte sa version des faits. Gordon cherchait à parler à des locaux, Angeni a engagé la conversation, elle a eu l'impression qu'il l'écoutait vraiment et de fil en aiguille, ils se sont embrassés. Gordon a caressé son cou de sa main, et c'est là qu'il a vu qu'Angeni avait une pomme d'Adam, et qu'il est entré en furie.

Elle propose de la ramener chez ses parents à Bois-Rouge, la réserve à une heure de route d'ici, loin de l'Autoroute des Larmes. Angeni accepte à condition qu'elle ne la ramène pas directement chez ses parents. Angeni lui fait une confidence, un truc qu'elle n'avait pas raconté à la police il y a un an car ils ne "comprenaient rien" : le soir de sa disparition, Rose l'a appelée. Elle lui a dit qu'elle avait été prise en stop par un gentil monsieur, mais qu'ils étaient tombés en panne d'essence. Mais qu'il n'y avait pas de souci à se faire, qu'un dépanneur arrivait."

Quand Eyota a séparé Angeni et Gordon, Allison et Matthew sont retournés au bureau de la police indienne interroger Abey Leoni en caméra cachée. Elle veut faire ses preuves, elle veut qu'Eyota la remarque. Elle est la petite sœur d'Angeni. Elle dit qu'il a changé depuis la disparition de leur grande sœur, Lune (elle l'appelle Lune alors qu'Angeni l'appelle Rose). La disparition de Lune est la raison de son engagement dans la police. Allison lui propose d'en reparler plus tard, en privé, par exemple ce soir lors d'un dîner. Washington la prend à part. Et leur dîner en tête à tête ? Allison le prie de se "la mettre sur l'oreille quelques temps", leur carrière doit avoir la priorité. Washington négocie de pouvoir interviewer Bill lui-même, en échange du report de ce dîner.

Eyota amène Angeni au bureau pour enregistrer sa plante. C'est là qu'elles retrouvent Leoni. Elles annoncent qu'elles vont à Bois Rouge, la réserve indienne enfoncée dans la forêt à une heure de route de là. Eyota a appris qu'il y avait une battue organisée par la cheffe du bureau, alors elle y participe aussi dans la foulée. Allison a très envie de les accompagner à Bois Rouge, ça pourrait être l'occasion d'y rencontrer le chamane Chayton, le père d'Eyota. Et filmer la battue l'intéresse également au plus haut point. Elle n'a pas de mal à convaincre Leoni de les y accompagner, elle aussi a envie de participer à la battue. Eyota part avec Angeni dans son 4 x 4.

Washington renâcle. Il voit toutes les perspective de confort de sa soirée s'amenuir. Il dit qu'il n'a pas prévu de bottes, Allison lui intime d'aller en chercher vite fait au drugstore, puis ils partent dans le van avec Leoni, pour prendre la route de forêt vers Bois Rouge.

En démarrant, Washington a un sourire niais sur le visage. Allison suppose qu'il a récupéré le numéro d'une fille et elle le charrie autant qu'elle le rabroue. Alors que le van s'éloigne, elle voit un groupe de routiers en train de rire derrière la vitre du drugstore. Parmi eux, il y a une femme, une caucasienne avec une chemise à carreaux, des cheveux longs avec des plumes dedans. C'est sans doute la fille qui a laissé son numéro de téléphone à Washington.

La route de forêt est vraiment une route de forêt, elle n'est pas carrossée. Le van de Washington est à la peine. Et à mi-trajet, c'est la crevaison. Ils joignent Eyota par la CB, mais elle les laisse se débrouiller. Ils appellent la dépanneuse avec le téléphone tribandes de Leoni, la dépanneuse de Camp du Lac car c'est la seule à des lieues à la ronde. Elle arrive. C'est une remorque qui a connu des jours meilleurs. Aux commandes, un natif qui répond au nom de Comanche. Il a un syndrome d'alcoolisation foetale, qui lui donne un faciès proche d'une personne qui aurait une trisomie. Il est visiblement alcoolique, son visage est rouge, il sent le gingembre. Il essuie souvent ses mains pleines de cambouis sur sa salopette. Quand il parle, il bégaie légèrement. Il leur demande où il faut les remorquer, Allison répond Bois Rouge, malgré les récriminations de Washington qui voudrait être rapatrié à Camp du Lac. Le dépanneur peut prendre deux personnes dans sa cabine, mais du coup au moins une personne devra rester dans le van qui est remorqué. Allison monte dans la dépanneuse avec Leoni, elle relègue Washington dans le van...

Eyota est arrivée à Bois Rouge. Elle a déposé Angeni dans un endroit discret, pour qu'on ne sache pas que la police l'a ramenée. Puis elle s'est rendue en forêt pour participer à la battue. Elle y retrouve la cheffe de la police indienne de Camp du Lac, mais aussi Chayton... et Gordon.
La cheffe de la police indienne est une native d'une cinquantaine d'années. Elle a pris beaucoup de poids depuis quelques années qu'elle ne mange plus que de la junk food. Elle a les cheveux courts. ça et l'uniforme, ça lui donne un air très occidentalisé.

Chayton participe à la battue en tant que volontaire. Il est vêtu d'un blouson et d'un pantalon en jeans à franges, il a des plumes dans les cheveux. La cheffe s'entretient avec Eyota. Elle lui confie que ce n'est pas normal de faire une battue si loin de l'Autoroute des Larmes. Mais des gens de Bois Rouge auraient entendu des cris, ils auraient aperçu le Wendigo, alors ils ont insisté pour qu'il y ait une fouille des lieux. "Entre nous, tout ça c'est de la connerie.", conclut la cheffe.

Mais l'un des volontaire les appelle. Ils trouvent un corps. Le squelette d'une femme que des prédateurs ont dû déterrer. Elle porte un reste de tailleur et un badge avec le logo d'une station de télé. C'est sûrement la journaliste disparue il y a quatre ans. Son crâne est fendu, la cause de la mort doit être un objet tranchant. Eyota fait interrompre la battue. Maintenant, c'est une scène de crime.

Gordon redemande à Eyota si Angeni a déposé plainte contre lui. Avec la découverte du corps, l'enquête sur la disparition de la journaliste va progresser à grands pas. C'est Gordon qui a constitué tout le dossier. Si son honneur est entaché, l'enquête va forcément en pâtir. Eyota sous-entend qu'il n'a rien à craindre pour le moment. Mais elle a la plainte d'Angeni dans sa poche et compte la déposer dès le lendemain.

Quand la dépanneuse dépose Leoni et les journalistes en herbe à Bois Rouge, il est trop tard pour participer à la battue. Pour autant, Leoni interroge Allison : doit-elle rester avec eux pour le dîner promis ou aller voir Eyota pour se rendre utile ? Comprenant que Leoni a toujours besoin de faire ses preuves, Allison l'enjoint à rejoindre Eyota.

Allison et Washington vont voir Chayton qui accepte de leur parler. Il leur propose de le suivre dans la forêt, maintenant, au milieu de la nuit, pour collecter des "indices". Washington refuse, au prétexte que ses bottes sont déjà foutues. Allison accepte, elle veut montre à Washington à quoi il faut être prêt pour faire une grande carrière. Washington dit qu'il aurait mieux fait de faire binôme avec celui qui faisait un reportage sur les plages de Vancouver.

Chayton propose à Allison de fumer le calumet pour se purifier et rester hors d'atteinte du Wendigo. Mais elle doit savoir qu'elle sera alors incapable de retourner en arrière. Allison accepte le calumet. En toussant des bouffées de fumée, elle explique la vie à Washington, qui lui répond : "Demain, on rentre à Camp du Lac et de là, je retourne à Vancouver. Tu n'as qu'à continuer toute seule."

Allison suit Chayton dans la forêt. Nuit. Elle se sent en effet incapable de rebrousser chemin. Elle a récupéré la caméra de Washington, elle filme en mode nuit. Ils arrivent jusqu'à une petite hutte en terre avec une seule ouverture bouchée par une toile. Ils entrent, c'est si petit qu'ils sont obligés de s'y tenir à genoux, face à face.

Une créature gratte dehors. Alors qu'Allison panique, Chayton a le visage grave. Il lui met sa main devant la bouche et murmure : "Shhh..." Dehors, des grognements. Bestiaux.

Derrière Chayton, accroché à la paroi de la hutte, un tomahawk. Très aiguisé.

Chayton bouche la caméra. Fondu au noir.

Eyota est de retour à Camp du Lac. Elle va voir Comanche le dépanneur dans son garage, demande le registre. Comanche l'amène dans l'aquarium, son petit bureau vitré d'où on voit tout l'espace du garage. Sur son bureau, il y a une bouteille de sky entamé et le registre. Comanche essuie ses mains sur sa salopette et prend le registre. C'est un vieux cahier avec la couverture qui porte une publicité pour une marque de camion. Le cahier est très usé et sale, les pages sont jaunies. A l'intérieur, il n'y a pas de dates et de noms comme on pourrait s'y attendre avec un registre de dépanneur. Mais des photos des disparus. Des polaroïds. Il lui montre la journaliste. Et il lui montre Lune-Rose. Eyota lui demande ce que ça signifie. Elle regarde par la vitre, effarée, et derrière il n'y a plus le garage, mais la forêt, la nuit.

Comanche lui dit : "N'a... N'ayez pas peur." Elle veut sortir son arme, mais s'abstient de peur qu'il ne se ferme. Elle lui demande de lui donner le registre. Il lui donne.

Elle fixe son visage.

Son visage lunaire.

Fondu au noir.


Règles utilisées :

Inflorenza minima, en mode Carte Blanche.


Commentaires sur le jeu :

J'avais trois joueurs de prévu, tous avaient lu le théâtre et les règles. On a eu un souci technique. Le troisième joueur a annoncé qu'il se loguerait en retard, et finalement il n'a pas pu se loguer du tout. Ce qui fait qu'on a eu une heure et demie de battement avant de commencer à jouer.

Nous avons mis ce temps à profit pour préparer la session. Parmi les ambiances listées dans le théâtre, j'ai demandé aux joueurs laquelle ils préféraient. Les joueurs étaient unanimes sur Onirisme / Chamanisme. Le joueur d'Allison a ajouté Enquête et celui d'Eyota Tranches de vie. On a convenu qu'on jouerait d'abord Enquête / Tranche de vie et qu'on basculerait progressivement vers Onirisme / Chamanisme.

Puis on a fait une création de perso et j'ai demandé à chaque joueur de décrire un lieu et un figurant. Le joueur d'Allison a décrit la station service et son gérant à demi-redneck, et elle a aussi décrit Washington. Le joueur d'Eyota a décrit Bois Rouge et Chayton.

On n'a pas fait de minute de silence, parce qu'on avait déjà pas beaucoup de temps. On a joué 1h3/4, puis j'ai fait une petite pause pour demander à chaque joueur une dernière chose que le personnage voulait faire pour le climax, et on a joué ce climax en une demi-heure (Chayton 1/4 h, Comanche 10 mn).


Retour des joueurs :

Joueur d'Allison :
J'ai été dedans du début à la fin.

Joueur d'Eyota :
Cela manquait de rythme et de tension sur les deux premières heures. Le système de résolution n'était pas assez visible.


Mon retour personnel :

J'ai eu des difficultés à improviser durant la première grosse moitié de la partie (les 1h3/4), et mon ressenti est le même que le joueur d'Eyota sur le manque de tension et de rythme.
Je pense que j'étais en manque d'énergie et j'ai eu des difficultés à amener des situations avec des enjeux forts, et à couper les scènes quand elles traînaient trop en longueur.

Explication :

+ Quand j'ai demandé les ambiances, j'ai laissé les joueurs énumérer les ambiances qu'ils aimaient, sans pour autant trancher sur une. Au final, je me suis retrouvé avec un agenda à trois ambiances : Enquête, Tranches de vie, Onirisme / Chamanisme. En quelque sorte, je ne savais pas où me fixer.

+ Les joueurs ont choisi des personnage (une enquêtrice, un journaliste) taillés pour explorer et récupérer les perches que je leur tendais. Mais ils ne prenaient pas d'initiatives, il n'y avait pas de ping pong.

+ Assez curieusement, sans doute à cause de mon manque d'énergie, je n'ai pas utilisé les nombreux outils d'impro que j'avais à ma disposition et qui m'auraient permis de faire monter la mayonnaise sans grand effort :
A. J'avais un tableau des thèmes pour le théâtre : 1 route 2 forêt 3 autochtones 4 police 5 chamanisme 6 prédateurs
B. J'avais les symboles des personnages. D'ailleurs, j'ai eu un rebond quand le joueur d'Allison a changé son symbole Modernité en Détermination. Le simple fait que je ne me rappelle plus des deux symboles initiaux des personnages est symptomatique.
C. J'avais les tours invisibles. D'ordinaire à Arbre, je joue en tours invisibles : je m'intéresse alternativement à chaque joueur.se en tentant de lui proposer un dilemme moral ou un choix mortel. C'est une technique que j'ai transposée depuis à Inflorenza en Carte Blanche (cf CR Al-Andalus) et qui fonctionne car elle motive à impulser de la tension, elle donne un agenda. Sous prétexte que je n'avais que deux joueurs, j'ai omis de le faire dans cette partie. Certes, j'ai alterné les focales, mais sans me préoccuper d'amener un dilemme moral ou un choix mortel à chaque focale. C'est ce qui a le plus manqué, avec l'application des symboles
D. Les pauses / questions aux joueurs. J'ai maîtrisé pour ainsi dire sans reprendre mon souffle. Sans doute parce que je m'étais mis la pression par rapport au temps réduit de jeu (je savais qu'on ne pourrait pas dépasser 2h1/4) et à l'agenda complexe que je m'étais fixé. Faire des pauses amène une respiration bienvenue dans le jeu. En hangout, il n'est pas évident de faire une vraie pause. Mais on peu au moins arrêter la fiction, passer un peu en méta, pour demander aux joueur.se.s ce qu'ils attendent, vérifier l'approbation (quand on joue en hangout, on n'a pas les signaux visuels) et aussi poser quelques questions aux personnages qui sont très fertiles comme :
"Qu'est-ce que tu crains le plus en ce moment ?"
"Qu'est-ce qui a la priorité pour toi en ce moment ?"
"Qu'est-ce que tu penses de la situation ?"
C'est le genre de pause que j'ai fait au bout d'1h3/4 de jeu et ça nous a permis de jouer ensuite un climax qui nous a satisfaits.
E. Les signes +,=,- (ou pouces vers le haut ou vers le bas) nous auraient peut-être été utiles dans cette partie, notamment pour détecter les attentes des joueurs par rapport à la tension. Quand on lit l'histoire, rien n'indique si les joueurs sont satisfaits ou non. C'est pareil en jeu. Pour le savoir, il faut employer un outil méta. D'où l'importance de recueillir régulièrement les impressions des joueurs, ne serait-ce que par un "ça va ?"
Et garder à l'esprit que chaque joueur.se a des attentes différentes et que certaines personnes peuvent être plus gâtées que d'autres, comme dans cette partie où j'ai trouvé quelques moyens pour challenger Allison, mais pas assez pour challenger Eyota.

+ J'étais venu avec deux idées de figurants au départ : Angeni et Comanche. Peut-être qu'ils ont pris trop de place dans le développement.

+ Tout ceci, ce sont des approches possibles. Ce qui est primordial, c'est le dialogue avec les joueur.se.s, et ce régulièrement pendant le jeu, pas seulement au début, à la fin ou une fois au milieu.

+ Parfois aussi, je me demande si je ne me gâche pas nos souvenirs de parties en voulant tout décortiquer. Ce peut être important de chercher à améliorer ses pratiques, mais c'est aussi important de lâcher prise de l'obligation de qualité, au moins pendant qu'on joue. Peut-être aussi que je veux changer la façon dont on debriefe une partie, qui me laisse un goût amer en bouche une fois sur deux. C'est important que les joueur.se.s puissent déballer leur ressenti, y compris moi, mais j'aimerais qu'on le fasse d'une façon plus détachée, bienveillante, y compris envers nous-mêmes. Quand j'entends une personne dire "J'ai mal joué." à la fin d'une partie, ça me navre parce que je ne crois pas qu'il y ait un bon ou un mauvais jeu. Et du coup, quand je m'entends dire "J'ai mal maîtrisé.", ça me navre pour les mêmes raisons. J'aspire à ce qu'on reformule le débriefing d'une façon plus charitable telle que : "Je m'attendais à --------------, c'est arrivé à X%, et par rapport à ça, j'ai été [sentiment], ou je ne m'attendais pas à cela, et du coup j'ai été [sentiment] parce que je voulais [attente]."


Retour du joueur d'Eyota après relecture du compte-rendu :

Je l'ai lu rapidement mais je trouve qu'il met bien en évidence le fait que l'histoire a été assez peu ponctuée d'enjeux et de dilemmes. Les seuls vrais dilemmes entre Allison et Washington sont mis en avant mais sincèrement en partie je trouvais qu'Allison s'en sortait à chaque fois sans vraiment devoir sacrifier quelque chose. Effectivement avec Eyota, je n'ai croisé aucun réel dilemme.

Bref, je ne reviens pas sur le fait que le système, plus utilisé, aurait sans doute permis à la partie de décoller plus vite. La pause qui a amené les climax a été en cela bienvenue.

Concernant ta dernière remarque, je te rappelle juste que malgré les petits soucis "techniques", le joueur d'Allison et moi avons beaucoup apprécié la partie, notamment en raison de l'ambiance qui se dégageait, La partie n'était certes pas parfaite, mais rares sont les parties parfaites; l'important est que nous y avons -toi aussi j'espère- trouvé du plaisir de jeu et que ce n'était pas du temps perdu.


Réponse de Thomas :

Bien sûr que non, ce n'était pas du temps perdu, et j'étais pour ma part satisfait, dans la mesure où une carence d'adversité est somme toute un problème qui concerne les joueur.se.s et moins le MJ (dans le sens où en temps que MJ, je trouve autant mon plaisir à décrire qu'à incarner une adversité).

Je me demande si le fait qu'on ait eu un théâtre contemporain, de surcroît assorti d'un agenda « tranches de vie » n'a pas contribué à la faiblesse de l'adversité, dans le sens où d'ordinaire à Inflorenza, j'utilise le surnaturel ou le réalisme pour m'aider à définir des prix à payer intéressants, et je suis moins familier à le faire dans un contexte plus réaliste. J'ai moins rencontré le problème dans mes autres tests de l'Autoroute des Larmes, car on mettait le surnaturel en jeu bien plus rapidement.


Retour du joueur d'Allison après lecture du compte-rendu :

Je confirme que j'étais dedans du début à la fin. J'ai passé un bon moment et je trouve que le système de choix/sacrifice est pas mal du tout. Pour revenir sur le cas d’Alison et Washington, en effet aux premiers abords cela ne semblaient pas être des sacrifices importants. Je pense néanmoins que tout se joue dans "jouer le jeu" de la part du joueur. Je m'explique. 

Lorsque Thomas me fait comprendre qu'Alison doit accepter le dîner en tête à tête avec son comparse en échange de son aide, je comprend qu'il applique la règle du choix/sacrifice. A partir de là je me dois aussi de comprendre l'orientation subtile que Thomas donne au problème : "accepter ce RDV est un sacrifice donc cela doit être voire devenir problématique rétroactivement pour Alison". C'est ainsi tout naturellement qu'en tant que joueur je dois modifier le comportement de mon personnage pour refléter cette évolution. Soudain ça devient vraiment problématique pour Alison d'accepter ce dîner. 

En conclusion un sacrifice n'est pas obligatoirement basé sur une donnée a priori problématique mais il peut générer une telle donnée a fortiori.


Réponse du joueur d'Eyota :

Yeeeees! :)
C'est très bien vu cette distinction entre d'une part l'émergence d'une problématique pour le personnage et d'autre part la création d'une problématique a priori, par le joueur pour le personnage. L'influence sur l'arc narratif du perso est dans les deux cas présentes en effet.


Réponse de Thomas :

Je t'avoue que je ne m'attendais pas à cet angle de vue, je te remercie Christophe pour me l'avoir signalé !

J'ai conçu pour impliquer les joueurs qui jouent en plaidant pour leur personnage (i.e., une fois qu'ils ont créé leur perso, ils évitent de raconter des choses qui nuisent à leur personnage ou le dévalorisent). Dans mes idées, je proposais une suite de prix à payer jusqu'à trouver le truc qui embête bien le personnage / le joueur, et par exemple quand j'ai proposé le dîner, je l'ai fait parce que je pensais que c'était quelque chose d'embêtant / source de tension pour le personnage / le joueur (pas hyper embêtant, mais je me chauffais, après j'ai enchéri, surtout vers la fin avec la défection de Washington).

Le fait que tu t'impliques volontairement en créant un problème pour ton personnage parce que tu veux répondre aux signaux que je t'envoie en tant que MJ, c'est une belle preuve de fair play, et ça me montre que le jeu a quelque chose à offrir à ceux qui jouent en posture d'auteur (i.e. qui n'hésitent pas à raconter des choses qui nuisent à leur personnage ou le dévalorisent, si ça peut créer une plus belle aventure, ou favoriser le jeu collectif). C'est une autre face de la monnaie que je n'avais pas prévue mais je suis très heureux d'apprendre qu'elle existe, ça augmente les capacités du jeu. A moi de voir si je dois la formaliser, ou si c'est aussi bien que ça reste un truc non écrit, émergent.
Outsider. Énergie créative. Univers artisanaux.
Ma page Tipee.
Avatar de l’utilisateur
Pikathulhu
Dieu d'après le panthéon
Messages : 3250
Inscription : dim. août 22, 2010 7:26 pm
Localisation : Morbihan
Contact :

Re: [CR] Les jeux d'Outsider

Message par Pikathulhu »

MARS

Horreur spatiale et organique, et réflexions sur la solubilité de l'horreur métaphysique dans le jeu.

Jeu : Innommable, horreur métaphysique par Christoph Boeckle

Joué le 24/10/2015 au Festival Les 24 H du Jeu (Theix, Morbihan)
Personnages : Sujet 34, Fab', Sophia, Luc

Image
crédits : Darwin Bell, Euan, futile boy, Gordana AM, theojunior, licence cc-by-nc


L'histoire :

Le monde libre est soumis à une pollution industrielle. L'environnement est détruit. La nature ne subsiste, sous une forme corrompue et hostile, que dans un territoire enfermé derrière des murs : Millevaux.
Dans le monde libre, il n'y a plus de nature. Les hommes vivent dans la pollution et la seule nourriture qui reste est un aliment en tablette aux ingrédients inconnus : le Soleil Vert.
L'humanité a colonisé la Lune et Mars.
On dit que les colons de Mars se sont rebellés contre la gouvernance terrienne. On dit qu'il s'y passe des choses terribles. Mais pour certains, Mars est la promesse d'un avenir différent. Si Mars devient indépendante, migrer sur Mars c'est comme effacer son ardoise.

Ils sont six. Ils veulent quitter la Terre pour Mars et se sont associés pour voler un vaisseau de marchandises.
Il y a Prisca, une femme déterminée. C'est la seule de la bande qui soit armée. C'est elle qui a repéré le vaisseau dans le spatioport.
Il y a Lime, un jeune pilote pâle et blond au visage rond. C'est lui qui va piloter le vaisseau.
Il y a Fab', le hacker. Traqué par des organisations, il veut se mettre au vert. C'est lui qui sur le conseil de Prisca, a piraté le réseau du spatioport pour leur permettre de filer à bord du vaisseau. Fab' a embarqué avec EFCA, son petit robot à tout faire, qui lui sert notamment du café, d'où son nom.
Il y a Sujet 34. Il a été victime d'expérimentations. Il a réussi à s'échapper du laboratoire où il était détenu, et il veut fuir vers Mars. Il a monté dans la soute du vaisseau en passager clandestin, il ne sait même pas que le vaisseau a été volé. Sujet 34 a monté avec Kiki, son écureuil de compagnie, lui aussi échappé du laboratoire.
Il y a Sophia. C'est une psy qui s'intéresse aux migrants. Elle décide de faire une expérience en immersion, elle va pouvoir étudier les autres passagers, et aussi les migrants une fois qu'elle sera sur Mars. Elle a emporté un livre magique, qui contient toutes les histoires.
Enfin, il y a Luc. Il a perdu sa femme, et depuis il est inconsolable. Il veut aller sur Mars pour tout recommencer à zéro. Il porte une pierre de Mars en pendentif, qui lui rappelle l'espoir de fonder une nouvelle vie.

1 Vous ne reverrez pas la Terre

Une fois que le vaisseau volé a quitté le spatioport, on aperçoit la Terre depuis la verrière du poste de pilotage. D'abord, c'est un spectacle à couper le souffle : à part le pilote, aucun n'a jamais vu son monde natal depuis l'espace. Puis la Terre se réduit jusqu'à devenir une tête d'épingle, et les
Chelsea, et les passagers sont saisis du sombre pressentiment qu'ils ne reverront jamais la Terre.

2 La boisson O se déplace

En fouillant la soute, les passagers découvrent une grosse cuve hermétique qui porte le symbole "danger biologique", et d'où sourd un bruit à la fois métallique et liquide.
Ils découvrent aussi Sujet 34 et son écureuil, caché derrière les nombreuses caisses de ce vaisseau de marchandises.
Les passagers sont d'abord en colère, mais ils l'accueillent vite parmi eux, puisque après tout, eux-même ont volé le vaisseau, à part Prisca, qui rappelle le danger d'être à court d'oxygène ou de provisions, et se comporte comme si elle avait une autorité sur les autres, et met souvent la main à son pistolet à impulsions.
Puisqu'on parle de provisions, les passagers vont voir ce que contient le garde-manger. Ils trouvent des tablettes de Soleil Vert et aussi une mystérieuse boisson en poche, qui porte juste la lettre "O" sur l'étiquette. Ils essayent d'en faire sortir d'une poche, et ils constatent que la boisson se déplace vers les humains, comme si elle voulait être bue. Ils décident prudemment de ne pas consommer de cette marchandise.
Fab' vérifie dans les registres et constate que la boisson n'est pas répertoriée.

Pour pallier à une éventuelle pénurie de nourriture, Sophia convertit une des sections du vaisseau en site horticole. Elle avait amené avec elle des graines de végétaux et aussi des bulles de verre qui contiennent un écosystème miniature, avec de l'eau, des micro-crevettes et des micro-algues qui sont censées se développer en autonomie.

Chelsea, l'IA du vaisseau prend la parole avec une voix féminine monocorde, met plusieurs fois les passagers en garde contre toute pratique contraire au protocole. Fab', excédé par l'autorité de Chelsea, tente de la pirater, sans succès. Il parvient juste à écrire un message fantaisiste dans le terminal : Coucou.

EFCA veut lui servir du café, mais il lui sert de l'huile de vidange. Fab' boit la tasse pleine d'huile de vidange, ce qui lui attaque la gorge et l'estomac.

Lime prouve par des hésitations et des manœuvres ratées qu'il est un pilote très expérimenté. A se demander s'il ne veut pas fuir la Terre pour fuir ses responsabilités dans un quelconque accident...

Chelsea ordonne la nuit artificielle et somme les passagers d'aller dormir dans leurs minuscules couchettes, qui sont juste des tubes individuels déconseillés aux claustrophobes.

Avant d'aller dormir, Lime va se confier à Sophia, en tant que psy. Il lui explique qu'il a très peur, et Sophia lui dit de garder le moral.

Luc, enfermé dans sa couchette, entend une voix étrange et métallique lui parler. Elle dit : "Coucou..."

3 La destination a un visage humain

Les turbulents passagers ne restent pas tous couchés. Certains vont dans le cockpit, ils y trouvent Chelsea qui étudie le plan de vol qu'elle leur a prévu. Il est prévu d'amarsir dans un désert, sur une colline qui prend l'aspect d'un visage humain hurleur. Chelsea rassure les passagers en affirmant que ses alliés se trouvent dans cette colline, qui est une base rebelle, et qui leur assurera une protection et un avenir.

4 Vous êtes en danger

Un passager se rend dans le cockpit plus tard dans la nuit. Ils y trouvent Chelsea, matérialisée sous la forme d'une projection humaine : une jeune femme au visage grave, avec des cheveux blancs. Chelsea lui intime de retourner se coucher, et de respecter ses directives. "J'agis pour vous protéger. Vous êtes en danger."

5 La graine germe

Le lendemain, Sophia constate avec stupeur que les graines ont déjà germé, et les pousses sont de belle taille. Dans les bulles de verre, les crevettes font chacune la taille d'un petit doigt. La rapidité de ce développement est anormale.


Les passagers se restaurent avec du Soleil Vert. Luc découvre un morceau de cartilage dans sa tablette. Celle de Sophia fait un bruit d'os qui craque. Ils comprennent avec effroi que le Soleil Vert est fait à partir de la chair humaine des personnes décédées : les humains du monde libre se nourrissent d'eux-même, en circuit clos.

Les passagers veulent ouvrir la cuve, sans succès. Prisca s'emporte et leur ordonne de renoncer à leurs tentative. Elle sort son pistolet et leur interdit l'accès aux soutes.

La nuit suivante, les passagers entendent du bruit. Ils sortent de leurs couchettes. Tout est en apesanteur et on ne peut pas rallumer les lumières. Kiki se met à muter : il déploie des ailes d'écureuil volant et commence à voler dans les coursives. Les personnages vont voir dans le cockpit. Ils y trouvent Chelsea et Prisca qui leur expliquent qu'il y a des défaillances dans le vaisseau. L'un des passagers descend avec Prisca vers la section horticole, d'où proviennent les bruits. Il descend le long du couloir, dans le noir, il sent que le couloir est envahi d'algues, et il se fait attaquer par une crevette mutante, amorphe et sans carapace ! Il arrive à tuer la crevette mais pas sans blessure.

Les passagers arrivent à la serre horticole, et la découvrent envahie d'algues géantes, une vraie jungle. Ils s'apprêtent à dépressuriser la zone, mais alors que le panneau se referme, Luc aperçoit sa femme décédée derrière le hublot, et il arrête le processus pour la sortir de là. Sa femme ne semble pas se souvenir qu'elle est morte.

Tout le monde est réuni dans le cockpit pour s'organiser. Une patrouille de l'espace est repérée, et Lime doit manœuvrer en manuel pour déjouer leurs radars, malgré la pression il y parvient, soutenu par les autres passagers.

Le clone de la femme de Luc demande à Chelsea de passer une valse et propose à Luc de danser sous les étoiles, mais Luc refuse cette valse, confusément il sent encore que cette chose n'est pas vraiment sa femme.

Fab' arrive enfin à pirater Chelsea. Il en fait une entité à leurs ordres et reconfigure son avatar pour qu'elle ressemble à une top model.
Peut-être échauffé par l'effort qu'il produit à l'assister, EFCA ne va pas bien. Il veut lui servir un café mais lui sert un gobelet de sang chaud. D'où vient ce sang ?

Les passagers s'embrouillent avec Prisca sur la marche à suivre et elle lâche entre ses dents : "Vous êtes si... inférieurs !". Ils lui demandent des comptes, et elle révèle qu'elle avait un plan, qu'elle est au service d'un Dieu dont la puissance dépasse leur entendement, qu'elle devait le convoyer pour Mars pour servir sa race, et que ces imbéciles d'humains n'étaient pas censé causer de problème, et alors les passagers entament un combat avec elle. Elle s'avère une combattante redoutable, elle tue Lime avec son fusil à impulsions, et les autres passagers encaissent de sérieuses blessures avant de pouvoir la tuer.

De plus en plus de bruits proviennent de la soute. Les passagers comprennent que le problème vient de là. C'est sans doute le contenu de la cuve. Il faut dépressuriser la soute. Les passagers enfilent des combinaisons spatiales et descendent en face de la soute. Ils ouvrent le panneau et derrière, tout l'espace est envahi par une monstrueuse entité, yeux, mucus, cornes, dents, masse impossible et hybride de chairs en perpétuelle mutation. Les combinaisons mutent à son approche, EFCA explose en crépissant son maître de morceaux de cervelle, comme s'il était devenu humain avant de mourir sous le choc.

Luc entre dans la soute, sa femme crie : "Non !". Mais elle vient de le perdre à nouveau. Les autres passagers ferment le panneau, la chose arrache et dévore le bras de Luc, mais celui-ci lui laisse volontiers cette amuse-gueule, il profite de cette diversion pour baisser la manette de dépressurisation, et tout le contenu de la soute se vide dans l'espace, y compris Luc, qui s'est sacrifié pour la bonne cause.

Par les hublots, on aperçoit une masse hideuse et noire

qui

s'éloigne

s'éloigne

s'éloigne ?


Liste des outrages subis par les personnages :

Sujet 34
+ dos paralysé
+ blessure
+ Balle dans le genou

Attache : Kiki l'écureuil
+ Kiki volant

Fab'
+ Bu de l'huile de vidange
+ Décharges d'électricité
+ Crise d'angoisse
+ Entend les sentiments

Attache : EFCA
+ Café à l'huile de vidange
+ Gobelet de sang
+ Explosion de cervelle

Luc
+ Cartilage dans le Soleil Vert
+ Saignement du nez et du crâne
+ Combi mutante
+ Bras crevé

Attache : désir de recommencer à zéro
+ Valse refusée
+ ...
+ Désir abandonné

Sophia
+ Soleil Vert fait un bruit d'os qui craque
+ Combi mutante
+ Timpas broyés

Attache : le livre qui contient toutes les histoires


Retour des joueurs :

Joueur de Fab :
+ La prise de dés est une mauvaise chose et une bonne chose. On n'est pas limité par une classe de personnage.
+ Cela suit l'histoire comme on se l'imagine, on se sent pas forcés.

Joueur de Sujet 34 :
+ Pas de compétences, ici on joue plus sur l'ambiance.
+ On est plus libre que dans d'autres jeux de rôles, il y a juste l'idée finale.


Retour personnel :

Encore une fois, je me suis lancé en ayant peu préparé. J'avais juste en tête qu'il y avait une conspiration des Confrères des Masques d'Or, ces presque-humains aux pouvoirs spéciaux qui vivent clandestinement parmi les humains. Les Confrères ont migré en masse vers Mars, et c'est eux qui ont déclenché la guerre d'indépendance. Ils ont mis au point un plan pour faire venir Shub-Niggurath, le Dieu de la Fertilité qui est à l'origine de Millevaux. Ils pensent pouvoir le contrôler et il devrait les aider à remporter la guerre d'indépendance et à massacrer tous les humains qui seraient restés sur Mars, Mars deviendrait alors une planète entièrement habitée par des Confrères des Masques d'Or.
En gros, la Source, c'était Shub-Niggurath et les Antagonistes, c'étaient les Confrères, personnifiés par Prisca, et toutes les manifestations engendrées par la présence de Shub-Niggurath dans le vaisseau : la crevette, le clone de la femme de Luc...
C'est quand les joueur.se.s ont élaboré leur concept de groupe et que j'ai demandé à chaque personnage pourquoi il voulait quitter la Terre, que le fait que le vaisseau était volé avait émergé. J'ai juste imaginé que Prisca avait fait ajouter la cuve de Shub-Niggurath parmi les marchandises, puis avait intrigué pour voler le vaisseau avec un équipage réduit de collaborateurs humains naïfs, qui n'auraient pas dû lui poser de problème.

La boisson O était de l'orgone, fluide organique originaire de Millevaux, qui est à la fois une nourriture, une drogue, une énergie et un produit mutagène. J'ai improvisé sa présence dans le vaisseau sur le tas.

Je me questionne sur l'équilibrage. C'est ma première partie où je monte à 4 personnages, et je me demande si le jeu ne devient pas easy win à ce stade. Sujet 34 et Sophia ont par exemple survolé le débat, en termes d'outrages, alors que le jeu est beaucoup plus dur avec 2 ou 3 personnages.
L'autre souci, c'est que finalement, si la difficulté des conflits augmente en cours de jeu, rien n'est impossible en revanche. Lors du conflit final avec Shub-Niggurath, qui est quand même un Dieu (qui est même le seul Dieu dans l'univers de Millevaux), les joueurs ont pu se débarrasser de lui juste en appuyant sur un bouton d'ouverture de sas. Même si je me suis permis un doute sur le fait qu'on en était débarrassé, il est assez clair que Shub-Niggurath n'atteint pas Mars. Pas cette fois...
Je veux dire, ça ne me dérange pas en tant que MJ. Une fois la partie terminée, je sais que je peux me faire mon interprétation, et dire que Shub-Niggurath arrivera sur Mars la prochaine fois. Mais j'ai eu peur que ça dérange les joueurs. Ils se débarrassent d'un Dieu lors du climax, est-ce que ça ne fait pas pétard mouillé pour eux ? Est-ce qu'ils n'auraient pas préféré que ce soit irréversible ?

Je n'arrive pas à trancher la question. D'un côté, le principe qu'on rencontre la Source lors du climax et qu'on puisse la contrer en réussissant un jet avec la difficulté maximale, me paraît cohérent d'un point de vue ludique. La liberté des joueurs est respectée, ils ont une prise sur les événements tant qu'ils acceptent de faire courir des risques à leur personnage. Mais si on se réfère au genre narratif de l'horreur métaphysique, la rencontre finale avec Shub-Niggurath aurait dû se clôturer différemment : les personnages auraient été fascinés, paralysés, détruits, ou plongés dans une hallucination cauchemardesque totale...

J'en reviens à une idée que je cultive depuis quelques temps. Comme un jeu de rôle est un jeu, et une aventure, et non pas une histoire, la notion de genre narratif y est caduque. C'est une chimère que de vouloir émuler un genre narratif tel qu'on les connaît au cinéma ou en littérature, parce qu'en jeu de rôle l'aventure est émergente, et se soumet aux contraintes un jeu, c'est-à-dire offre un espace de liberté aux joueurs dans un cadre.

À moins de concevoir un jeu, différent, où ça finit toujours mal à la fin, mais j'ignore si ça peut avoir un intérêt, d'une parce que l'incertitude quant à la fin fait que c'est intéressant et que c'est un jeu, et de l'autre côté parce que même si on réfléchit dans une logique de genre narratif, l'horreur métaphysique ne se conclut pas toujours sur une défaite absolue des personnages : parfois les personnages ont le sentiment d'avoir échappé ou d'avoir contré l'horreur finale, même s'ils gardent la peur diffuse que la nécessaire fin tragique ne soit qu'une partie remise, une menace dans le hors-champ du jeu.
Outsider. Énergie créative. Univers artisanaux.
Ma page Tipee.
Avatar de l’utilisateur
Pikathulhu
Dieu d'après le panthéon
Messages : 3250
Inscription : dim. août 22, 2010 7:26 pm
Localisation : Morbihan
Contact :

Re: [CR] Les jeux d'Outsider

Message par Pikathulhu »

KEYBOARD CAT

Enquête tragi-comique, tunnels de dialogues à la Tarentino et réalités dispersées pour cette traque d'un impitoyable serial killer, par la plus foutraque équipe de tous les temps.

Jeu : Wonderland, piégés dans les réalités.

Joué le 30/10/2015 aux Utopiales
Personnages : Tatayoyo, Jeremy Sanders, Ronald, Razor, Jonathan V.Dibert, Viktor "Sale Fouine" Kurkoff


Image
crédits De3P-photographer, jaydoubleyougee, julochka, lockacid licence cc-by-nc & Charlie Schmidt domaine public vivant


Le théâtre :

Les personnages font partie d'une section spéciale du FBI chargée de traquer les tueurs en série. Cette fois-ci, ils ont affaire à Keyboard Cat, un tueur mystérieux. Sa signature : sur les comptes Wonderland de ses victimes, il laisse une vidéo humoristique d'un chat roux vêtu d'un sweat bleu qui joue du synthé.
La trame se résume à cette prémisse, tout le reste émerge en jeu.


Feuilles de personnage :

Elles ont été rédigées avant que le jeu commence. C'est important de le souligner.

Tatayoyo
Handicap : daltonien
Attache : médaillon de ma mère morte violée et tuée par un clown fou.
Ressource : Beretta 17 coups
Motivation : Devenir le mal qui détruira le mal (les vilains)
(devenue Motivation : le suicide ?)
Objectif : prendre la place de Keyboard Cat
Destin : attaqué par des clowns psychopathes

Jeremy (Hachaya) Sanders
Handicap : Paranoïa
Attache : photo de mon enfant
Ressource : indics dans le milieu "huppé" de Wonderland.
Motivation : mon enfant s'est perdu dans Wonderland.
Objectif : Détruire Wonderland.
Deston : premier homme à aller sur Mars.

Ronald Carter
Handicap : se trompe toujours entre la droite et la gauche
Attache : boîte d’allumettes donnée par mon cousin au troisième degré du côté de mon père (personne importante pour moi).
Ressource : Keyboard Cat me parle.
Motivation : Admiration. Croit comprendre les motivations du tueur (sera sacrifiée, pour être remplacée par la motivation : Vengeance)
Objectif : protéger Keyboard Cat en secret (sera réécrit en "Tuer Keyboard Cat").
Destin : devenir le meilleur joueur de Seven Wonders du monde.

Agent Razorbayeknikovitchy -> DarkSasukedu44 sur Wonderland
Handicap : Je... j... n'en... a... ai...pa...papas.
Attache : montre à gousset héritée de ma grand-mère décédée dans un accident de fête foraine pendant son spectacle de femme à barbe.
Ressource : Une IA-clone qui peut prendre ma place dans les situations qui l'exigent.
Motivation : Éviter que le mal me gangrène.
Objectif : Comprendre Keyboard Cat et analyser les origines de sa démence.
Destin : Monter un élevage de licornes arc-en-ciel.

Jonathan V.Dibert Magna Carta
Handicap : Mon fils est handicapé, il survit grâce à Wonderland, sa seule porte sur le monde.
Attache : Fils gravement handicapé suite à accident de la route, je conduisais.
Ressource : mon smartphone, toujours connecté. Il me permet de rester en contact avec ma famille.
Motivation : Rendre Wonderland plus sûr afin que mon propre fils puisse grandir en lieu sûr. Que cela soit "Wonderland".
Objectif : Supprimer la menace Keyboard Cat par tout les moyens. Peu importe les moyens, seul compte le résultat.
Destin : si mon fils meurt, je perds toute raison de vivre.

Viktor Kurkoff alias "Sale Fouine"
Handicap : cible des ragots
Attache : ma vieille cabane dans les arbres loin de toute civilisation.
Ressource : Enigma 2015, site secret de décryptage moderne (sacrifiée)
Motivation : Utiliser Keyboard Cat pour surveiller Wonderland.
Objectif : Effacer toute existence de Keyboard Cat.
Destin : Doit effectuer le premier face à face réel avec Keyboard Cat.


L'histoire :

Dans la section du FBI qui traque les serial killers, il y a un agent très spécial. Ronald Carter est gitan. C'est un après-midi de grande chaleur, il est dans la piscine, il flotte dans une bouée. Toute sa famille est là. Les tantes, les grands-mères, les neveux, les cousins. Ils sont en train de jouer à Seven Wonders, toute la famille est mordue de ce jeu, c'est rare les jeux de cartes où tu peux jouer à sept, c'est bien pour les familles nombreuses, alors ils improvisent un tournoi de Seven Wonders. Ronald a son cousin préféré à sa gauche, et il voit bien que son cousin, il a un jeu pourri, il va perdre, quoi qu'il se passe. Alors Ronald adopte une tactique, il soutient son cousin à fond, comme ça ils sont à deux contre sept, et grâce à cette tactique, il finit par gagner la partie. Le cousin a l'air content que Ronald l'ait soutenu malgré sa lose. Il lui offre une Marlboro. Cigarettes de contrebande, bien sûr. "Tu fermes les yeux là-dessus, cousin ?" Bien sûr. Le cousin lui fait : "Tu sais, j'ai rencontré une fille, c'est une strip-teaseuse. Elle est canon. Tu vois, au départ, je me suis dis que c'était pas une fille pour moi, mais en fait elle me plaît bien. Je veux que tu la rencontres, trouve-toi une nana et on se fait un restau tous les quatre, tu vas la rencontrer, tu verras que c'est une fille bien, et tu pourras en parler en bien à la famille, pour que la famille elle comprenne que c'est sérieux entre nous, même si c'est une strip-teaseuse."
"Je veux lui offrir un cadeau, pour lui faire comprendre que c'est du sérieux. Un beau cadeau qui montre que je la traite comme une dame. Tu offrirais quoi à ta gonzesse, toi ?
- Je sais pas, une caravane ?
- Ça fait pas le mec qui s'emballe, une caravane ? Genre, on se connaît depuis deux semaines, et je veux déjà t'emmener en vadrouille dans l'Arkansas ? Non, je veux lui offrir un cadeau qui soit rien qu'à elle... Je sais pas... T'as quoi comme loisirs en ce moment ? Un truc qui te botte ?
- Moi, je me lancerais bien dans les combats de chiens...
- Ah ouais, ça c'est cool... des combats de pitbulls ! T'aurais un pitbull, tu l'appellerais comment ? Tu choisirais quelle couleur ? Tu crois que ça lui ferait plaisir à ma blonde si je lui offrais un pitbull ? Tu crois que ça existe, les pitbull roses ? Où alors il faut les peindre ? Tu crois que ça lui ferait plaisir, un pitbull rose ? Je prends un mâle ou une femelle ?
- Plutôt une femelle, quand même.
- Tu sais quoi, je trouve que c'est une sacrée bonne journée. Une chouette journée. Tu sais, ce soir, j'ai un coup à faire. Tiens, je veux que tu prennes soin de ça en mon absence."
Ils ont pas arrêté de fumer des Malbac de contrebande en causant, et toujours le cousin les allumait avec une boîte d’allumettes, une boîte du club de strip où il a rencontré sa nana, et c'est cette boîte qu'il tend à Ronald.


Scène de crime. Un laboratoire de métamphétamine, dans le désordre le plus total. La victime : le Chapelier, un dealer notoire. On l'appelait le Chapelier parce qu'il avait toujours ces bérets, les Kangol, et aussi parce qu'il frimait un max, toujours. Là, le Chapelier est étendu au sol et il frime plus du tout. Sa bouche est bourrée de médocs, va savoir s'il est mort d'overdose ou juste étouffé. Sur sa poitrine est posé son téléphone portable. Il joue une vidéo de Keyboard Cat. Deux experts dépêchés sur les lieux. Razor, et Quinn, le chef de la section, une rousse sévère toujours en tailleur. Quinn demande à Razor de faire son boulot de profiler, de rentrer dans la tête de ce malade. Qu'est-ce qui le motive à faire ses crimes ? "J... Je... n...ne... s..sai...sai...sais... pas !", répond Razor.

Autre scène de crime. Un clown a appelé le 911 pour dire qu'il était en danger de mort. La section débarque. C'est l'agent Tatayoyo (c'est un surnom... Oui, bien sûr que c'est un surnom...) qui arrive en premier dans le chapiteau. C'est un nerveux, en plus il a une hantise des clowns depuis qu'un clown a violé et tué sa mère. Il ne réfléchit pas deux secondes, il sort son Beretta 17 coups et descend le clown. Pas possible de couvrir une bavure pareille : Razor embarque Tatayoyo dans sa voiture, direction la garde à vue. Le téléphone portable du clown s'est allumé. Il joue la vidéo de Keyboard Cat.

L'agent Jonathan V.Dibert est en voiture avec son fils, il l'emmène à l'école. Son fils lui dit de conduire moins vite, il a peur. Mais Jonathan est pressé.
"T'es toujours pressé !
- Excuse-moi d'avoir un boulot ! Les criminels se chassent pas tous seuls !
- Pense au moins qu'on va à l'école de cirque cet après-midi avec l'école, c'est là que tu devras aller me chercher. Et roule moins vite, j'ai peur !"
Une voiture leur file le train. C'est celle de Razor. Ce con passe tout son temps libre à verbaliser les excès de vitesse. Jonathan monte dans les tours.
Son smartphone résonne. Excédé, son fils s'en saisit, il veut le jeter par la fenêtre. Saleté, il aurait dû verrouiller les portes arrière ! Jonathan lui attrape le bras et peut sauver son portable, mais il se déporte violemment sur la gauche...

Le cousin de Ronald conduit un camion de contrebande. Ronald est assis à côté de lui, ils papotent, le cousin explique qu'il va aller voir les pitbulls, pour en choisir un pour sa blonde. Ils fument des malbacs de contrebande. Et soudain, le choc.

Le camion est défoncé et la voiture de Jonathan est pliée en deux. Le cousin sort du camtard, il a l'air bloqué dans sa conversation, il ne réalise pas qu'il y a eu un crash. Il a des bouts de verre partout. Du sang. Le gamin est salement touché.

L'agent Kurkoff va dans son bureau. Il voit que les tiroirs ont été ouverts, ses papiers ont été fouillés. Il sursaute quand il réalise que l'agent Tatayoyo est aussi dans son bureau.
"Qu'est-ce que tu fous là ?
- Je me suis trompé de bureau !"
Ils disent tous ça. Ils sont tous à l'espionner dans cette section.
Il fait le tour des bureaux, et il tombe sur Jérémy Sanders et sa coéquipière Frenza. Frenza est une grande blonde, trop maquillée, minijupe, boucles d'oreilles créole. Elle mâche du chewing-gum en permanence. Elle est assise les pieds sur son bureau, et lit tranquillement les dossiers sur Keyboard Cat qu'a accumulés Kurkoff.
"Qu'est-ce qui te prend de fouiller dans mes affaires !
- Ta gueule ! C'est toi le taré ! T'as vu tout ce dossier que t'as fait sur Keyboard Cat ! On dirait un album photo de fan ! Tu te paluches en pensant à lui ! T'es rien qu'un gros pervers détraqué !"
Kurkoff reprend son dossier, et s'en va, dans une fureur totale, mettre des verrous sur tous ses tiroirs.
Ronald Carter passe par là. Il chourave une agrafeuse. En fait Ronald n'arrête pas de carotter du matériel administratif. Là, il repart avec un gros rouleau de papier essuie-mains sous le bras. Tout ça, ça part chez les gitans.
Frenza se tourne vers Sanders : "Ils sont tous allumés dans cette section. À la dernière minute, on ne pourra compter que sur nous deux. T'es prêt à assurer le coup ?"

Tatayoyo est dans la salle de garde à vue. Personne ne vient l'interroger. Il y a juste un téléphone portable posé sur la table. Le téléphone du clown. En fond d'écran, le clown, toujours maquillé, a posé sur son canapé avec sa femme et ses enfants. Le téléphone sonne. Tatayoyo décroche. "Salut... C'est Keyboard Cat à l'appareil. ça a dû être dur pour toi de revoir ce clown... T'as vu cette photo ? Tu trouves pas qu'il a l'air de tenir sa famille en otage ? Et ce taré a même pas enlevé son costume pour prendre une photo de famille. Tu le reconnais ? C'est celui qui a fourré et tué ta mère. Considère que je t'ai fait un cadeau. Ça a dû être dur, je veux dire perdre ta mère à cause d'un putain de clown ? Tu sais ce qui me révolte ? C'est pas qu'il l'ait fourrée, c'est pas qu'il l'ait butée... Non, c'est la manière. Ce taré a pas enlevé son costume de clown pour le faire ! Je veux dire, tu trouves pas que c'est un manque de respect ? C'est ça le problème, y'a plus de respect...
- Je vais te trouver, et je vais te démonter..."

Ronald court dans une galerie des glaces. Il a été contacté par Keyboard Cat, qui voulait le brancher sur un coup. Pour Ronald, qui admire en secret Keyboard Cat et le considère comme un nettoyeur des rues, c'était une aubaine unique. Ronald est paumé dans cette putain de galerie des glaces. Lui qui a toujours confondu sa gauche de sa droite, il a bien du mal à suivre les instructions que le tueur lui donne au téléphone. Au QG, la section est déjà en train de trianguler l'appel. Ils ont un signal.
"Si tu prends à gauche, tu vas pouvoir me rencontrer. Si tu prends à droite, tu vas trouver ma future victime."
Ronald se concentre pour pas se gourer de direction. Il veut d'abord rencontrer Keyboard Cat. Quel qu'en soit le prix.
Et pour une fois, il prend la direction qu'il voulait.
C'est une loge d'artiste de cirque, avec le miroir et les ampoules et tout un barda de maquillage posé sur la coiffeuse.
Assis en face du miroir, il y a un type en costume de clown blanc avec un masque de chat. "Je suis content de te rencontrer, Ronald. Tu sais ce qui me hérisse le plus ? Le manque de respect. Par exemple, tu prends tous ces jeunes, ils vont au McDrive, ils repartent avec tous leurs sacs et leurs cartons, et ils les jettent par la vitre de leur bagnole quand ils ont fini. Je veux dire, l'environnement, c'est pas une poubelle ! Tu trouves çà normal ? Hein, t'en penses quoi ?"
Posé sur la coiffeuse, un camescope montre ce qui se passe dans la pièce en face. On y voit le cousin de Ronald. Il est attaché à une chaise, et pendant qu'il causait avec Keyboard Cat, il s'est fait dévorer par un pitbull peint en rose !
Ronald pète un câble. Il arrache le masque de Keyboard Cat, mais découvre que ce n'est qu'un mannequin.
Il se précipite vers la pièce où se trouve son cousin préféré, mais c'est trop tard. Son smartphone se met à jouer la vidéo de Keyboard Cat.

La section en entier fonce vers le signal qui a été triangulé. Mais ils n'arrivent pas à la galerie des glaces. Ils arrivent à un autre chapiteau, un de ces petits cirques minables. Le sol est jonché de bons pour des places à moitié prix, distribuées en surnombre par le cirque par rapport au nombre réel de places à demi-tarif qu'ils peuvent proposer. Le parking est plein, il y a de la lumière et de la musique sous le chapiteau. Keyboard Cat est forcément là-dessous. Ils entrent. Razor est éberlué. Un gamin de quinze ans habillé en Monsieur Loyal présente à tous un spectacle... de femme à barbe ! C'est une femme à barbe, comme sa grand-mère jadis morte pendant un de ses numéros, et elle chante l'Ave Maria. Le public fait des grands "chut !" à la section. Monsieur Loyal allume un cercle de feu, et la femme à barbe saute au travers... Au moment où elle passe à l'intérieur du cercle, les flammes deviennent bleues et triplent de volume. La femme s'écroule au sol, une torche humaine, la barbe en feu. La section boucle le périmètre et intervient direct, mais il est trop tard pour la sauver. Razor trouve un téléphone portable installé au pied du câble en feu, et relié à un système électronique qui a dû servir à activer à distance l'ajout d'un produit accélérant dans le feu.
Le téléphone joue la vidéo de Keyboard Cat.

Jonathan va chercher son fils à la sortie de l'école de cirque. Celui-ci est vêtu d'un costume de clown blanc en papier crépon, avec un chapeau conique en carton. Il porte un gros ballon rouge, mais en fait il est maussade. Il monte dans la voiture. Il se plaint que Jonathan va retourner au travail dès qu'il l'aura déposé. Jonathan lui explique qu'il n'a pas le choix, qu'il ne peut pas prendre de congés, pas tant que les tueurs courent dans la nature. Jonathan lui fait promettre de l'amener à Dysneyland ce week-end. Ils feront le train fantôme, et les montagnes russes, et tous les manèges. Il prendra un des trois cents jours de congés qu'il lui reste, il répondra pas au téléphone si Quinn appelle. Ils passeront tout le week-end ensemble à Dysneyland. Il lui fait promettre.

Kurkoff interroge Monsieur Loyal. Le jeune sort une litanie sur le manque de respect, alors Kurkoff lui met vachement la pression. Le jeune finit par craquer. Il est prêt à en dire plus sur Keyboard Cat si on lui accorde l'immunité pour sa collaboration, et si on lui garantit que personne ne pourra espionner leur conversation. Kurkoff l'amène dans sa tour de mémoire pour plus de sécurité. C'est le souvenir d'une cabane de pêche où il allait pour être tranquille, loin de la civilisation, loin de tous ces toquards qui l'espionnent en permanence. Le jeune explique que Keyboard Cat l'a menacé de mort s'il ne laissait pas ce téléphone portable au pied du cercle en feu. Il donne les coordonnées des appels qu'il a reçu, et Kurkoff lance son super logiciel espion à la traque du signal.

Tatayoyo a bien fini en taule pour son crime. La vraie, avec le pyjama orange, et tous les mecs qu'il a jetés en cabane qui lui gueulent derrière les barreaux comment ils vont lui mettre la misère. Tatayoyo est appelé au parloir. Son gardien de prison, c'est Razor, qui a été dégradé pour mauvaise conduite. Tatayoyo entre dans le parloir sécurisé, et Razor, qui a dû se faire acheter, ferme derrière lui. Le type qui se présente au parloir, est habillé en costume de clown blanc, avec la totale, la fraise, les boutons en pompon noir, les culottes bouffantes. Et un putain de masque de chat.
Tatayoyo décroche le téléphone. "Tu vois, ce qui me désole, c'est ce qui va t'arriver.". Il lui montre une vidéo sur son téléphone portable. On voit les autres taulards, ils sont dans les douches, et ils sont en train d'enfiler des masque de clown. "Ces types, ils ont tous ces couteaux, tu sais, ces couteaux de taulards, qui sont fait avec des lames de rasoirs avec un manche en PQ aggloméré. C'est complètement dingue le temps qu'ils doivent passer à fabriquer ces couteaux. Tu vois, ce qui me choque, c'est pas ce qu'ils vont te faire. C'est pas la violence qui me choque. C'est qu'ils aient accepté d'enfiler ces masques de clown pour le faire. Tu vois, ça c'est un manque de respect. Je te laisse une chance pour t'en sortir dignement."
Il lui passe un objet sous la vitre du parloir. C'est son Beretta.
"Il reste qu'une seule balle. Fais-en bon usage."
Et ce taré de Keyboard Cat quitte la pièce.
Tatayoyo manque de passer à l'acte. Mais Razor vient le chercher, pour lui annoncer qu'il est libre. Kurkoff vient juste de hacker les logiciels du procureur pour pourrir le dossier et obtenir un non-lieu. Il en a complètement grillé son logiciel Enigma-15, mais Tatayoyo est libre.

Jonathan et Jérémy sont à Dysneyland avec leurs fils. Il est tard, ça devrait même être fermé, mais les deux gamins ont insisté pour aller dans la piscine à boules, alors les agents ont joué de leur badge pour faire patienter les vigiles.
Les gamins jouent dans la piscine à boules, elle est vraiment grande, si grande qu'ils n'ont même pas pied dedans. Le fils de Jeremy lui demande d'aller jouer avec lui, mais son père lui répond qu'il préfère attendre dehors. L'enfant plonge dans les boules aussi profondément qu'il peut. Un peu après, le fils de Jonathan vient voir les deux parents, il pleure et il dit que le fils de Jeremy ne remonte pas. Jeremy et Jonathan fouillent la piscine à boules à fond, mais pas moyen, ils ne le retrouvent pas. Il est perdu. À jamais. Perdu dans ce Dysneyland virtuel. Jeremy est effondré. Il se jure de détruire Wonderland, quelque soit les conséquences. Même s'il sait très bien que sans Wonderland, le fils de Jonathan ne pourra pas communiquer avec son père, maintenant qu'il est dans le coma, depuis l'accident, et que Jonathan perdrait toute raison de vivre sans son fils.

Jonathan a interrogé toutes les personnes présentes sous le chapiteau, il a épluché toutes les vidéos des scènes de crime, et il a enfin trouvé le fil rouge, la personne présente sur les lieux à chaque fois : Frenza, la coéquipière de Jeremy. Ils foncent à son domicile, et bien sûr elle a pris la poudre d'escampette, et il y a plein d'indices qui l'accusent. Jonathan se réunit avec les autres membres de la section, et ils mettent en place une souricière. Ils savent que Ronald a le pouvoir d'attirer Keyboard Cat, puisqu'il est en relation avec lui. Ils vont organiser un tournoi de Seven Wonders, chez les gitans.

Jonathan, Ronald et le fils de Jonathan se promènent dans une fête foraine. Quand il allait le visiter, Ronald lui a appris à jouer à Seven Wonders, et l'enfant est devenu fan. Pour tout dire, il est même rapidement devenu très fort à ce jeu. Il faut dire qu'il avait tout le temps qu'il voulait pour y jouer. L'enfant réclame de participer au tournoi de Seven Wonders, Jonathan bien sûr refuse. Il dit : "Tu es privé de tournoi, tes notes à l'école sont trop catastrophiques.
- Mais c'est dégueulasse, je suis toujours puni !"
Razor débarque, il engueule le gamin : "Co...co...Connard ! Arr...r..ête d...de t...te com...compo...porter comme un...un handicapé ! Re...rega...garde-m...moi, je reste...te..te digne !
- Et si je ramène de super notes, je pourrai y aller ?
- Oui, tu pourras y aller."
Et l'enfant ramène de super notes. Bien sûr. Quand on ne dort pas, on a tout le temps de faire des merveilles.

C'est le tournoi de Seven Wonders. Ils ont loué un grand chapiteau, ils l'ont loué au vieux Pepe, un chef forain, un vieux qui arrête pas de râler sur le manque de respect qu'ont les jeunes, un type qu'ils ont longtemps suspecté d'être Keyboard Cat, d'ailleurs.
Incidemment, c'est même le premier tournoi international de Seven Wonders. Les gitans ont appelé l'auteur du jeu, il a dit qu'il n'y en avait pas encore, alors il leur a accordé que celui-là soit le premier. L'enfant de Jonathan est là aussi, en lit roulant, avec toutes les machines qui le maintiennent en vie, et la machine qui le connecte à Wonderland. Quand il participe à une manche, le tournoi se passe en réalité augmentée.
Jonathan est sur les dents. Il a prévu l'artillerie lourde, y'a une section surarmée du SWAT en arrière. Il surveille son fils de près.
Pas de trace de Frenza jusqu'à la finale, qui se déroule en réalité augmentée, vu que le gamin y participe. Et Ronald aussi. Putain, il va peut-être devenir champion du monde de Seven Words. Après ça, adieu le FBI. Razor se dit que s'il quitte le FBI à son tour, ce sera pour monter un élevage de licornes sur Wonderland. Il le fait déjà comme passe-temps, mais il passerait bien à la vitesse supérieure. Alors un des joueurs annonce qu'il était un prête-nom, que tous ces coups lui étaient dictées par une personne sur Wonderland, et que cette personne va rentrer pour prendre part à la finale. La personne qui rentre alors sous le chapiteau, c'est Frenza. Elle se campe au milieu des joueurs et fait : "C'est quoi, ce merdier ?". Razor entend un grondement arriver... Une licorne se ruent dans le chapiteau. Razor sort son flingue, des détonations dans tous les sens, mais c'est inutile, ou trop tard... La licorne transperce le torse de Razor. Celui qui a vécu par la licorne périra par la licorne. Le coup était virtuel, mais celui qui a programmé l'animal a désactivé les sécurités neuronales de Wonderland. Pour Razor, le coup est si violent qu'il meurt aussi bien dans Wonderland que dans la réalité.
Il s'écroule au côté de Frenza, qui a été criblée de balles. Le portable de Frenza s'allume. La vidéo de Keyboard Cat. Putain, Frenza était juste une victime de plus.

Kurkoff sait qu'il a les moyens de convaincre Keyboard Cat de le rencontrer en vrai. Il sait aussi que ça pourra lui être fatal, mais il est temps d'en finir.

Il est dans sa cabane. Tatayoyo est planqué dans une armoire, avec son Beretta. Les autres de la section sont planqués un peu partout autour de la cabane, avec des armes lourdes.
La personne qui entre, c'est la chef Quinn. Kurkoff l'invite à converser discrètement avec lui, dans sa tour de psyché.

La tour de psyché de Kurkoff, c'est le bureau du FBI. Ses collègues passent et repassent en l'espionnant d'un air suspicieux. Il y a des micros et des caméras partout. Un peu comme dans la réalité... Tous les gars de la section sont réunis dans la tour de psyché. Alors Quinn se met à table :
"Vous comprenez pas, ce qui me choque, c'est votre manque de respect... Le manque de respect pour l'insigne ! Vous êtes censés être la crème de la police, le dernier rempart de la civilisation, et au lieu de ça ! Kurkoff, tu passes ton temps et le budget du FBI a surveiller tout le monde. Tatayoyo, tu te balade avec un flingue illégal et tu fais des trous dans les victimes. V.Dibert, tu utilises ton boulot comme prétexte pour pas t'occuper de ton gosse. Razor, au lieu d'enquêter, tu passes ton temps à faire la circulation, et quand on te dégrade, tu deviens un gardien de prison corrompu. Et toi, Carter, bordel ! A cause de toi et de ta filière gitane, y'a plus une foutue agrafe, une foutue pochette ou un foutu trombone dans cette boutique ! Comment tu veux que le FBI arrête les criminels si on peut même pas agrafer un putain de dossier ! J'ai jamais vu une équipe de baltringues pareille !"

Elle est rouge de colère. Elle agite une pile de papiers et les envoie voler.

Blam. Blam. Blam ! (répéter dix-sept fois)

Tatayoyo a vidé son chargeur. Putain, ça fait du bien.

Seul Sanders était absent de cette souricière-là. Il avait un autre objectif. Détruire Wonderland. Il a contacté les milieux huppés, pour savoir où étaient les serveurs du réseau. On lui a répondu, en ricanant : "Tu crois qu'il existe des serveurs assez puissants pour héberger une telle réalité virtuelle ? Bien sûr que non ! Wonderland utilise le cerveau des gens comme serveurs !" Alors il a demandé s'il y avait pas quand même un focus. "S'il y a un focus, ce serait peut-être le cerveau du directeur de Wonderland."

Alors il est allé au siège social. Bien sûr, la secrétaire ne lui a pas accordé de rendez-vous, mais il l'a ignorée. Flingue au point, il a passé la porte du directeur.

De l'autre côté, il y avait juste un lit d'hôpital à roulettes. Un gamin dans le coma. Le fils de Jonathan.

Alors Jeremy a fait feu.

C'était l'été. C'était vraiment une belle journée. C'était l'anniversaire du fils de Jeremy. Toute la famille était invitée, et toute la section aussi, et on faisait ça chez les gitans, parce que y'avait la piscine, les bouées sur lesquelles on pouvait se laisser aller, et on jouait à Seven Wonders.
Ronald cause avec son cousin, son cousin lui parle de sa nana, qui est strip-teaseuse. Il lui dit que c'est vraiment une belle journée. Il lui laisse sa boîte d'allumettes.
Le fils de Jeremy et celui de Jonathan montent sur le plongeoir. Ils crient pour que leurs parents les prennent en photo en train de faire la bombe.
C'est Quinn qui gère le barbecue, elle est en train de cuire les steaks. Un gitan lui passe un rouleau d'essuie-tout. Avec l'emblème du FBI. Quinn devient toute rouge.
Frenza cause avec Razor. Comme toujours, ils s'engueulent, parce qu'ils peuvent se piffer. En fait, Razor s'énerve dès que quelqu'un a une conversation soutenue avec lui, parce qu'il ne peut pas tenir la cadence. Mais quand même, Frenza se calme vite. Elle lui sourit. Elle lui dit :
"Tu sais pourquoi je mâche tout le temps du chewing-gum ?
- N...N...Non..."
Elle enlève son chewing-gum et se le colle sous l'oreille :
"Pa...pa...par ce que...que ç...ça m'em...m'empêche de bé...bé...bé...gayer !"


Règles utilisées :

Pour la création de personnage, chaque joueur écrit six éléments : un handicap, une attache, une ressource, une motivation, un objectif, un destin. Quand le personnage veut accomplir quelque chose d'important, je peux demander le sacrifice d'un des éléments en échange. Le personnage peut réécrire de nouveaux éléments, mais ils ne sont plus sacrifiables. Si le personnage a sacrifié son destin, ou a sacrifié les 5 autres éléments, il est éliminé. Si un personnage aggrave sa situation, il gagne un joker, qu'il peut dépenser une fois pour obtenir ce qu'il veut sans faire de sacrifice.
Je fais des tours invisibles, c'est à dire que j'alterne les scènes focalisées sur un personnage. Au début de chaque scène, je ne précise jamais si ça se passe dans la réalité, dans un rêve, dans Wonderland, dans le présent, dans le futur ou dans le passé. Les autres personnages peuvent faire irruption dans la scène quand ils veulent, sous le moindre prétexte. Les personnages peuvent utiliser à leur compte tout ce qui est dit en jeu, et on ne fait pas d'appartés ou de papiers traîtrise. Les tours de mémoire (première partie du jeu) sont des réalités virtuelles de poche construites à partir des souvenirs des personnages, qui permettent de se réunir en toute discrétion (comprendre les figurants ne pourront pas utiliser les infos), mais elles sont hackables au bout d'un moment, il faut alors leur préférer les tours de psychés, qui sont des réalités virtuelles de poche construites à partir de l'inconscient des personnages.
Une fois que j'ai fini un tour de table, je demande aux joueur.se.s de montrer leurs pouces (vers le haut, plus d'intensité, au milieu, on reste comme ça, vers le bas, moins d'intensité). Je suis la directive du moins-disant (par exemple, il suffit qu'une seule personne pointe le pouce en bas pour que je baisse l'intensité).

Retour des joueur.se.s :

Joueur de Jeremy Sanders :
+ Je me suis bien marré
+ A 6 personnages, sur ce jeu, c'est compliqué. 4 personnages, ça aurait été plus équilibré
+ Pour le peu de choses qu'il y a sur la feuille de perso, ça développe l'imaginaire.

Joueuse de Jonathan V.Dibert :
+ Pro : la feuille de personnage, le système tel qu'il est sur le papier (l'attrition).
+ Pro : jouer avec les émotions
+ Pro : les tours de psyché
+ Pro : l'impossibilité de déterminer le réel du virtuel.
+ Pro : on joue sur une trame temporelle fixe alors qu'en fait on alterne scènes au présent, flash-back, flash-forward.
+ Pro : les systèmes de tour de table permettent la mise en avant de chaque personnage via une scène.
+ Pro : enchaînement des scènes.
+ Pro : dynamisme (sur le papier).
+ Con : Pendant les scènes solo, ça manque d'interactions entre personnages : il faudrait faire un lien, qui ne ferait pas partie des 6 choses qu'on peut sacrifier.
+ Con : On ne ressent pas le système d'attrition (seulement trois personnages ont dû sacrifier une chose sur leur six, et sinon deux personnages ont atteint leur destin), du coup on joue pour ainsi dire sans système, ça manque de tension.
+ Con : Quel est le but, l'objectif du jeu ?
+ Con : la partie n'avançait pas vite (lié à la table ? Au fait qu'on était six personnages ?)
+ Con : système du tour de table par scène : pas convaincue. Manière un peu artificielle de mettre en avant les personnages ? Bridage des joueurs pro-actifs ? Nécessité de l'établissement d'un groupe soudé afin de faciliter les interactions.
+ Lors de l'utilisation de la tour de mémoire, ça manque de description / compréhension du lien émotionnel. On ne lit pas dans le souvenir les émotions du personnage.
+ Con : manque de dynamisme dans la pratique.

Joueur de Ronald :
+ L'as de pique, ça n'a pas été utilisé. On n'est pas tenté de se mettre volontairement en difficulté pour en gagner.

Joueur de Razor :
+ Peut-être réguler l'intervention des autres pendant les scènes solo, par exemple avec un système de jetons.
+ Permettre au joueur dont c'est la scène solo de participer au paramétrage, par exemple en lui permettant d'énoncer trois choses vraies au début de la scène.


Retour personnel :

Le fait de ne plus préciser à quel époque où dans quelle réalité on est, ça change tout. Pour potentialiser les ressources des personnages, j'ai accumulé les flash-back pour rejouer des moments-clés de leur vie, les rendant plus forts et plus concrets que si c'était resté de simples mentions sur la feuille de personnage. J'ai bien pris mon temps, comme la scène dans la piscine avec le cousin, qui a bien dû durer dix minutes, un quart d'heure, parce que j'avais prévu de faire du mal au cousin de Ronald juste après, et je voulais donc lui donner un maximum d'importance. Partir dans des longs tunnels de dialogue sur des sujets anodins, comme dans les films de Tarentino, c'était ma façon de donner de l'importance aux éléments sur la fiche des personnages.

A un moment, quand j'ai demandé les pouces, le joueur de Razor en a profité pour demander à ce qu'il y ait moins de temps consacré aux persos en solo, et plus de jeu collectif, et partant de cette demande, je me suis débrouillé pour que les scènes suivantes puissent facilement accueillir tout le monde, d'où les scènes de souricière avec toute la section présente. Cela confirme ce que je pensais : demander les pouces, c'est aussi l'occasion de permettre aux joueurs de faire d'autres recommandations en mode méta, et ça c'est salutaire, car comme ça on corrige le tir en cours de jeu.

Si je suis très fier de ce qu'on a raconté ensemble (j'avais un groupe très porté sur le comique, mais ils ont complètement appuyé mon virement vers le tragique), je rejoins les critiques sur les problèmes de rythme. Je donne raison à la joueuse de Jonathan quand elle dit qu'il manque un schéma relationnel entre persos qui amènerait plus de jeu collectif.

Je pense que je vais tester la prochaine fois un système de besoin : chaque joueur écrit en quoi il a besoin de chaque autre personnage. Je trouve qu'un besoin amène plus de jeu qu'un simple lien.

La joueuse de Jonathan a fait justement remarquer que j'avais eu au final très peu recours à mon système d'attrition. Sans doute que ce système se serait bien fait ressentir si j'avais demandé un sacrifice à chaque scène. Or, j'ai fait beaucoup de scènes d'exposition, où je ne demandais pas de sacrifices. Je ne sais pas encore si c'est un problème, dans le sens où je trouvais ces scènes intéressantes. C'est peut-être un problème si on se retrouve avec un jeu où se contente d'écouter un MJ raconter une belle histoire, et c'est sûrement un problème si les joueur.se.s s'ennuient quand la scène ne concerne pas leurs personnages, alors même que ces joueur.se.s seraient venus pour découvrir l'univers.

Peut-être aussi que je testerai une partie avec les règles du jeu Les Cordes Sensibles (qui porte l'aspect émotionnel et les schémas relationnels que je recherche), et une autre avec les règles du jeu Innommable (qui porte les révélations et l'aspect mindfuck que je recherche aussi). Il est possible que je sois en train de rechercher une sorte de fusion heureuse entre les esprits de ces deux jeux.
Outsider. Énergie créative. Univers artisanaux.
Ma page Tipee.
Avatar de l’utilisateur
Pikathulhu
Dieu d'après le panthéon
Messages : 3250
Inscription : dim. août 22, 2010 7:26 pm
Localisation : Morbihan
Contact :

Re: [CR] Les jeux d'Outsider

Message par Pikathulhu »

TRAQUE PANFORESTIÈRE

Mindfuck tactique, obsessions forestières, guerre des univers et dérapages incontrôlés, un test trépidant de Millevaux Mantra !

Jeu : Millevaux Mantra, multivers forestier par Batronoban & Thomas Munier (crossover entre Mantra et Millevaux)

Joué le 16/04/2016 au festival Ramène tes Jeux

Personnages : L'avocat, le justicier

Image
crédits : Mike Kempenich, PacificKlaus, publicenergy, TheoJunior, Vince O'Sullivan, cc-by-nc & WD 45, cc-by & anonymes, costa acsinte, Lewis Hickes, domaine public & Antoine Pierre Nobilet, par courtoisie


L'histoire :

Quand le Justicier et l'Avocat reprennent leurs esprits, ils découvrent qu'ils sont dans un bunker souterrain aux murs couverts de lichens et de racines. Au milieu d'eux, un sarcophage égyptien. Leur corps est recouvert de mousses vertes, à l'exception de la tête. Le Justicier possède une dague de téléportation et l'Avocat un presse-agrumes magique. A leurs pieds, une trappe. Dans le fond du bunker, un escalier qui conduit de la surface. Au-dessus de leurs têtes, ils entendent des grognements de sanglier et des bruits de tronçonneuse, qui se rapprochent d'eux ! Ils ouvrent le sarcophage dans l'espoir de s'y cacher, mais en sort une momie siamoise, deux corps soudés dos à dos par la colonne vertébrale et par l'occiput : l'un des corps est le double du Justicier, l'autre celui de l'Avocat ! La momie est armée d'une dague et d'un presse-agrumes et agresse nos deux héros. Le Justicier utilise sa dague pour les téléporter sous la trappe, mais au passage il est blessé par la momie et son corps se momifie à son tour !

Passés sous la trappe, ils chutent dans un puits de terre aux parois grouillantes de racines et d'asticots. Au fond du puits, une mare noire et puante. Sur les parois, des entrées de galerie, par chaque galerie on aperçoit un univers différent. Avec la dague de téléportation, ils s'accrochent dans une paroi. Par la galerie la plus proche, ils voient une femme avec un corps sculptural et un masque de corbeau, perchée sur une pyramide maya, et brandissant un couteau de sacrifice. Ils se disent que c'est un chemin risqué, mais cela leur paraît encore plus risqué de faire de l'escalade pour atteindre une autre galerie, alors ils s'enfoncent dans celle-ci. La pyramide maya est environnée de brumes à couper le souffle, à l'horizon on voit les cimes de montagnes. La femme au casque-corbeau a déjà sacrifiée des dizaines d'hommes qui gisent nus et ensanglantés à ses pieds. Les deux derniers qu'elle s'apprête à égorger sont... les doubles du Justicier et de l'Avocat, nus et hirsutes ! Le Justicier saute sur la femme-corbeau et la plante de sa dague, mais elle a le temps de le blesser aussi, et sa tête se transforme en tête de corbeau, un bec lui sort du visage et l'éclate pour faire place à sa nouvelle tête. Un gigantesque corbeau avec un oeil sur chaque plume apparaît dans les nuages et fond sur eux. Le Justicier parvient à le frapper dans l'aile, crevant une dizaine d'yeux, et le dieu-corbeau se déroute et disparaît sous la pyramide. Leurs doubles leur explique qu'il y a une guerre des multivers, et que les seigneurs de cette guerre veulent leur peau, ainsi que celles de leurs doubles, parce qu'ils sont "spéciaux". Les Corax, ou peuple corbeau sont aux ordres du Lion, l'un des seigneurs de cette guerre des univers. Il faut quitter la pyramide au plus vite, car le dieu-corbeau va revenir.

Ils ont le choix entre descendre au cœur du temple ou descendre les escaliers. Ils optent pour les escaliers. La pyramide est couverte de lianes et de feuilles, la descente est difficile, mais faisable tant qu'on s'accroche. Arrivés au pied de la pyramide, ils constatent que la pyramide flotte à deux mille mètres au-dessus de la jungle, arrimée au sol par des lianes arborescentes ! Ils descendent le long des lianes. Pour y parvenir sans encombre, le Justicier fait appel au souvenir d'une vie antérieure où il était traqué par les loups et avait dû engager toutes ses forces vitales pour s'en sortir, et ainsi ils achèvent leur descente sans encombre. Ils arrivent dans la canopée des arbres, chargée de milliers d'oiseaux. Ce sont des oiseaux exotiques, perroquet, toucans, aras, mais ils ont tous un plumage noir et certains ont des becs très étranges. Une grande partie d'eux s'envole à leur approche, mais ils peuvent parler avec un oiseau moins-farouche, un oiseau au bec en forme de tube, il dit qu'il se nourrit des âmes humaines, et pourra les faire sortir de cet univers s'ils lui offrent l'âme de l'un d'entre eux. L'Avocat et le Justicier, tous deux épris d'équité, refusent un tel sacrifice. Ils s'en tireront autrement. Le double de l'Avocat est prêt à se sacrifier s'ils lui permettent de passer une nuit avec une jolie femme en échange, mais l'Avocat lui répond, sans façons.

Les doubles leurs proposent de regagner le village arborigène de leur peuple, pour y trouver un moyen de fuir cet univers. Ils évitent de descendre au sol, car c'est le domaine des loups-jaguars affamés. Ils avancent dans la canopée de liane en liane, mais à un moment les lianes rompent. L'Avocat et les doubles tombent sur le sol spongieux gorgé de larves et crépi de végétation. Le Justicier a la jambe prise dans une liane. Les loups-jaguars, rapides, presques invisibles, lui arrachent la tête et arrachent aussi le bras de l'Avocat... Le Justicier meurt... et reprend conscience aussitôt... en possédant le corps de son double !
Alors que deux loups-jaguars se disputent son bras, l'Avocat se rue sur la dague du Justicier tombée au sol, mais il se fait tuer, et son double aussi dans la foulée.

L'Avocat et le Justicier se retrouvent dans la peau d'ouvrier chinois sur le chantier de la Grande Muraille de Chine. On construit la muraille pour endiguer une forêt vivante qui progresse sans fin. Le Justicier fait tomber une pierre d'un coup de pioche, et sous cette pierre, ils trouvent le cadavre ensanglanté d'un ouvrier... qui est le double de l'Avocat ! Ils comprennent que le contremaître violent qui les fouette est l'assassin. Ils lancent une mutinerie et le contremaître est tué. Les soldats arrivent pour mater la mutinerie, et le Justicier leur désigne un meneur au hasard... qui s'avère être son propre frère dans ce monde ! Les soldats s'apprêtent à jeter les trois corps dans une fosse commune qu'ils vont recouvrir de chaux, mais le Justicier et l'Avocat insistent pour qu'ils aient une sépulture décente... et découvrent alors une perle de conscience.

Le double du Justicier reprend conscience. Il est dans un cabinet d'avocats. En face de lui, un double de l'Avocat, en costard et tutu, unijambiste de surcroît ! Il s'avère qu'il était en train de lui expliquer le danger qu'il courait. Une collègue avocate unijambiste arrive en béquille, une femme superbe. Elle leur annonce que des employés de la firme Corax ont demandé à voir l'Avocat, ils arrivent bientôt mais d'abord ils vont voir John... qui est le double du Justicier dans cet univers ! L'Avocat possède son double, mais il n'a pas trace de son passé dans cet univers (bien qu'il ait souvenir d'y avoir vécu dans une vie antérieure), il bombarde sa collègue de questions. On dirait que cet univers est proie à une guerre de terroristes à échelle mondiale, et ce cabinet est chargé de représenter les victimes des mines anti-personnelles.
L'Avocat veut des informations sur la firme Corax. Sa collègue lance une recherche sur Balkanet, le nœud d'internets précaires qui remplace l'internet unifié depuis la guerre. C'est dangereux comme toute incursion dans Balkanet. Elle lui apprend que la firme Corax est une firme de tueurs à gages. Le Justicier se planque derrière la photocopieuse. Soudain, la collègue est la cible d'une attaque virale depuis le Balkanet, elle est frappée par un virus-sanglier. Sa tête se déforme atrocement, des défenses lui poussent... elle a maintenent une tête de sanglier ! Elle se met à fouisser la moquette.

L'Avocat demande à un autre de ses collègues, venu faire des photocopies, s'il est possible de guérir la femme-sanglier. L'autre lui répond que dans la Zone Scientifique, ils devraient pouvoir faire quelque chose pour elle.

Une équipe d'hommes et femmes en costards noirs passent dans le couloir, direction le bureau de John : les Corax. Nos héros veulent fuir, ils ont le choix entre passer par les couloirs ou par la fenêtre. Ils tentent la fenêtre. Le bâtiment est environné de forêt, au loin on voit des immeubles en ruines dépasser des arbres. Ils sautent par la fenêtre avec la femme-sanglier et arrivent en face d'une barrière de barbelés. La femme-sangliers creuse un tunnel et passe de l'autre côté, mais les barbelés-ronces envahissent le tunnel aussitôt, et nos héros ne peuvent pas la rejoindre. La femme-sanglier s'enfonce dans les arbres, rendue à la vie sauvage. Ils escaladent le mur dans l'espoir de rejoindre l'héliport au sommet de l'immeuble. Des piques de sécurité commencent à sortir du mur. Le Justicier arrive au sommet, il attrape le bras de l'Avocat, mais l'Avocat est devenu tout mou. Il vient d'être embroché par des piques, c'est fini pour lui. Le Justicier monte dans l'hélicoptère et décolle tant bien que mal. A l'entrée du bâtiment, un SUV de la firme Corax le prend en chasse. Une batterie de mitrailleuse sort de son plafond et asmate l'hélico. L'hélico se crashe dans la mer de racines.

L'Avocat et le Justicier reprennent conscience. Ils sont le corps d'autres doubles d'eux-mêmes. Ils sont en tenue de commando, équipé d'une mitraillette et d'une grenade, dans un hélico de combat, avec d'autres doubles d'eux-mêmes, équipés pareils. Un siamois de doubles d'eux-mêmes, soudés par le dos et l'occiput comme la momie, est en train de les briefer. Le double du Justicier vient de se crasher en hélico dans la mer de racines. Il faut l'exfiltrer avant que les Corax ne l'atteignent, et le ramener en lieu sûr : vers la Zone Scientifique. L'Avocat et le Justicier se font parachuter au-dessus de la mer de racines et l'hélico repart. Dans leur descente, ils voient des Corax en costar noir sur des moto anti-grav noires et effilées survoler la mer de racine, et les descendent à la mitraillette. Ils récupèrent le double du Justicier dans la carcasse de l'hélico et partent à pied à travers la mer de racines, direction la Zone Scientifique.

Ils sont accostés par une personne revêtue d'une burqa jaune en loque, impossible de savoir s'il s'agit d'un homme ou d'une femme. Ielle leur explique qu'elle s'appelle le Roi en Jaune et représente une troisième faction dans la guerre des univers, entre l'Androgyne-Roi qui contrôle le passage entre les mondes et le Lion qui contrôle une bonne partie des univers. Ielle est sur le point de maîtriser le Pétrole, la source de pouvoir majeure dans cette guerre, mais pour y parvenir, elle a besoin de leur aide, et leur offre refuge. L'Avocat et le Justicier décident de lui faire confiance. Ils laissent le double partir seul vers la Zone scientifique. Le Roi en Jaune écarte des racines et révèle un puits de béton avec une échelle rouillée qui descend dans ses profondeurs. Ils descendent et parviennent dans un réseau de galeries désaffectées, envahi par une mousse blanche et par les feuilles mortes. Le Roi en Jaune leur dit qu'ils ne doivent pas être vus ensemble dans cette zone, et leur dit de le.a rejoindre dans les Tombeaux. Ielle leur confie des vêtements de clochards - pour faire couleur locale - et s'éclipse ensuite dans une galerie. L'Avocat et le Justicier découvrent qu'ils sont dans un ensemble de galeries de métro, d'égouts, de catacombes, de conduits de service, et de tunnels de contrebande. Il y a beaucoup de graffitis, des symboles anarchie, des slogans comme "tous les flics sont des batards"... Ils rencontrent une troupe de clochards, barbes, bonnets, mitaines, amassés autour de braseros dans une station de métro abandonnée. Ils arrivent à se faire passer pour des clochards d'un autre secteur et découvrent que ce lieu souterrain est une sorte de poche de résistance, et que des démons hanteraient la surface. Ils demandent où se trouvent les tombeaux et on les conduit à la chamane. C'est une femme aux vêtements en loques, à la peau et aux ongles crasseux, mais au visage très propre et très beau. En fait, c'est le double de la collègue de l'Avocat. Elle les soumet à une énigme s'ils veulent trouver les Tombeaux. Ils doivent d'abord avaler un champignon psilocybile...

Ils se retrouvent à planer à l'intérieur d'un grand cube blanc. Des pores s'ouvrent sur toutes les parois et des racines à croissance ultra-rapides commencent à en sortir et menacent de les empaler et les étouffer. Ils ont trente secondes pour répondre à l'énigme suivante : "On ne le voit pas, mais sans lui on meurt." L'Avocat trouve aussitôt qu'il s'agit de l'air, et l'énigme est résolue.

Ils reprennent leur esprit dans un ascenseur délabré. La chamane appuie sur le bouton "moins l'infini". Pendant la descente, elle essaye de leur faire avouer leurs motivations. Le Justicier se rappelle une vie antérieure où il était commerçant. Il se retrouve dans une grande halle à la verrière envahie de lierre, des étals tenus par des asiatiques et des africains, des cloportes géant qui courent partout au sol et un boucher qui leur court après avec un hachoir. Il se voit dans cette halle en train de négocier âprement avec la chamane. Au final, il la persuade qu'ils sont dans le bon camp, et elle leur promet son soutien inconditionnel.

Ils sont arrivés à l'étage moins l'infini. Du goudron suinte des portes. Ils lui demandent de rester ici en soutien, et ouvrent les portes. Ils arrivent dans une caverne immense dont on ne voit pas la fin. Le sol est couvert de goudron. L'air est tordu comme s'il y avait un incendie. Ils marchent longtemps et soudain arrivent en face du Roi en Jaune. Ielle fait maintenant dix mètres de haut, sa burqa qui glisse sur le sol lui donne l'aspect d'un fantôme. Le Roi en Jaune leur raconte la genèse du monde et ils l'observent avec lui comme s'ils y étaient. D'abord l'Hommonde au milieu du vide noir, homme blanc roulé en boule, puis le serpent noir à qui il donne naissance par la bouche et par l'anus, serpent qui le trahit, l'enserre jusqu'à le faire éclater. Des millions de boules blanches expulsées dans l'infini, les plus grosses donnent des mondes, les plus petites donnent des êtres, ils reconnaissent des doubles d'eux-mêmes, nus et blancs.

Ils tournent autour d'une sphère blanche, planète-univers, avec eux des millions d'êtres qui forment un anneau autour de la planète, sous leur pied, une infinie mare de pétrole, la mare de l'inconscient-collectif fruit de la mort des êtres. Bientôt, c'est tout un anneau de cadavres qui tourne avec eux, et les cadavres tombent les uns après les autres dans le pétrole.

Ils reprennent conscience dans la caverne, le Roi en Jaune dit d'une voix immense qu'il est sur le point de contrôler le Pétrole, il y a un gigantesque puits rempli de pétrole à leurs pieds, et sur les côtés, deux grosses colonnes de flamme apparaissent. Il lui manque un dernier ingrédient, deux enfants de l'Hommonde, s'ils se sacrifient pour ielle et plongent le pétrole, ielle contrôlera enfin cette mare de l'inconscient collectif !

Ils trouvent ce marché équitable et sont prêts à accepter... Mais le Justicier observe le Roi en Jaune davantage. De gros tentacules jaunes sortent de sa burqa. Ils se rappelle d'une vie antérieure dans un château médiéval... Il avait été trahi par son plus fidèle allié et jeté en pâture à la vindicte populaire... Il se rappelle le bas peuple qui s'apprêtait à se saisir de lui et se servir de son corps comme bélier pour enfoncer une porte du château... Il se rappelle les tentacules jaunes qui sortent de leurs narines, de leurs yeux, leurs langues-tentacules quand ils hurlaient après lui... Pour sûr, le Roi en Jaune n'est pas de leur côté, il n'est que du sien.

L'avocat lui dit qu'ils vont d'abord chercher une troisième double : la chamane. C'est une ruse, et l'avocat utilise ses souvenirs de plaidoyer pour être convaincant. Il se revoit dans un tribunal, le Roi en Jaune fait office de juge et frappe du marteau sur le pupitre. Le Roi en Jaune accepte, mais qu'ils se hâtent de revenir ! Ils courent vers la porte d'ascenseur.

Ils la passent.

Et se retrouvent en combinaison spatiale, à l'intérieur d'un grand cube de cuir. Les pores du cuir se dilatent et relarguent des millions de mouches qui essayent d'envahir leurs combinaison. Ils flottent jusqu'à un quartier de viande avarié en suspension au milieu du cube, grêlé de centaines d'œufs de mouches et d'asticots. Le Justicier enlève son casque, les mouches s'infiltrent dans sa combi, il essaye de manger de la viande mais c'est si infect qu'il vomit. L'Avocat et le Justicier évitent de retenter, ils pensent que pour trouver la perle de conscience, il faut crever chaque œuf de mouche, et c'est ce qu'ils fond... détruisant alors chacune des perles de conscience que ces œufs représentent.

Et ainsi ils retournèrent au pétrole primordial.


Feuilles de personnages :

Le Justicier
Idéal : Justice
Objet : Dague de téléportation
Réminiscences de départ :
Je suis mort en me faisant trahir (utilisé)
J'ai chassé des loups dans la nature pour survivre seul (utilisé)
Réminiscences acquises en jeu :
J'ai grandi dans une ville où le commerce était très présent (utilisé)
J'ai escaladé le Mont Fuji

L'avocat
Idéal : Aide et justice pour tous, mais surtout pour les filles mignonnes
Objet : presse-agrumes magique
Réminiscences de départ :
Exercé dans un cabinet d'avocats unijambistes en bikini (utilisé)
J'ai déjà réussi à faire fonctionner le Condor Centenaire, une copie chinoise du Faucon Millenium


Commentaires :

Durée :
2h1/2

Règles utilisées :
C'est la première mouture d'un système prévu pour le supplément Millevaux Mantra, un crossover entre l'univers de Millevaux et le jeu de rôle Mantra, de Batronoban (multivers étranges et felliniens)

Il mixe les règles de base de mantra (gestion de perles comme ressources) et un système de résolution maison qui utilise un d6 : quand un personnage veut réussir une action difficile sans utiliser sa réminiscence, il jette un d6 et doit viser un score inférieur ou égal au nombre de personnages impliqués dans l'action + un bonus de 1 si au moins un objet utilisé et un bonus de 1 si au moins un idéal utilisé. Le résultat dit si l'action réussit ou échoue, plus un effet collatéral qui vise à déclencher à la fois des scènes typiques de Mantra (changement d'univers, visions-flash...) et de Millevaux (utilisation des six marqueurs).

Pour densifier le vertige logique, je floute totalement la temporalité et la location.

Table de résolution des actions difficiles :
S = nombre de personnages impliqués + bonus d'idéal ou d'objet
X = résultat du d6
Quand la table indique « ou », c'est au choix de la joueuse.
X=1 Réussite douloureuse ou échec révélateur (= ajout d'une nouvelle Réminiscence sur la feuille de personnage)
1<X<S Réussite
X = S Réussite douloureuse ou échec
X = S+1 Échec révélateur
X > S+1 Échec douloureux

Table des douleurs (rejeter 1d6) :
1 Perte d'une ressource
2 Vision flash = le MJ fait une révélation aussi horrible qu'utile pour le personnage
3 Blessure thématique (retirer sur la table des thèmes)
4 Possession par un Ancien
5 Changement de zone de jeu (retirer sur la table des zones de jeu)
6 Mort

Tables des thèmes
1 Ruines
2 Forêt
3 Oubli
4 Emprise
5 Égrégore
6 Horlas

Table des zones de jeu
1 Sous-Monde
2 Autre univers
3 Futur
4 Passé
5 Rêve
6 Au-delà ou forêt limbique

Profils des joueurs :
Joueurs confirmés, mais débutants à Millevaux comme à Mantra (le joueur du Justicier a joué juste une fois à Inflorenza)

Brainstorm initial :
Les règles de Mantra demandent au joueur de définir trois réminiscences, j'ai déjà limité à deux et même là j'ai trouvé la création longuette (par longuet j'entends 10 mn).

Défis :
+ Voir s'il est possible d'exploiter les univers de Millevaux et de Mantra à parts égales
+ Tester le système de résolution
+ Vérifier s'il est bien possible de jouer sans préparation comme c'est mon ambition pour ce crossover
+ Proposer un mode de jeu bien spécial : mindfuck, tactique, et improvisé à la fois.

Mise en jeu :
Quelques exemples d'effets en jeu de la table de résolution des actions :
+ Blessure thématique : frappé par la momie, le justicier devient un mort-vivant
+ Blessure thématique : frappé par la prêtresse, le justicier développe une tête de corbeau
+ Perte de ressource : la femme-sanglier s'échappe de l'autre côté des barbelés-ronces

Il y a eu aussi des changements d'univers, mais ma mémoire défaillante m'empêche de départager ceux provoqués par une douleur de ceux que j'ai décidés en tant que MJ.
La table des douleurs a aussi deux fois donné la mort, mais là encore il m'est impossible de départager ces moments des moments où les personnages sont morts des suites d'un échec.

Retour du joueur de l'avocat :
Les mini-jeux (aka les Réminiscences), c'est une bonne idée, mais ça casse le rythme de jeu.

Retour du joueur du justicier :
+ Le concept de multivers, c'est intéressant. Selon les choix, tu as plusieurs lignes temporelles.
+ Des fois, on est dos au mur : on a un seul choix intéressant, ou aucun.
+ A rejouer, je dépenserais rapidement mes perles actuelles pour arriver dans des Réminiscences et tenter d'accumuler des perles permanentes pour devenir immortel.
+ D'un univers à l'autre, on peut observer quelle part l'humanité à joué dans l'apocalypse forestière, on peut arriver pile au moment où la nature se déchaîne, c'est intéressant.

Retour personnel :
+ Pour donner raison au joueur du justicier, je n'ai pas toujours été le meilleur quand il s'est agi de leur proposer des choix tactiques équilibrés. Ainsi, quand ils sont dans la canopée, je leur ai demandé si pour rejoindre la tribu arborigène, ils passaient par la canopée (le plus safe en apparence) ou par le sol (le domaine des loups-jaguars), clairement ils étaient obligés de répondre par la canopée. Pourtant, hormis ce passage, je pense avoir proposé des choix équilibrés. Mais peut-être ne l'étaient-ils que dans ma tête, dans le sens où j'avais prévu à peu près le même nombre de jets de dés selon l'option qu'ils auraient choisie, mais qu'en narratif une option leur paraissait nettement plus avantageuse que l'autre à chaque fois. Il me semble qu'il n'existe qu'un seul remède à ce problème : penser à toujours proposer des choix un minimum informés, et en proposer le plus souvent possible, et toujours répondre "oui mais" aux propositions des joueurs (ainsi, c'est un joueur qui a supposé qu'il y avait un héliport au sommet de l'immeuble, j'ai dit oui, sans sourciller, mais j'ai rajouté des piques de défense sur le mur).
+ L'autre fois où j'ai été faible du point de vue tactique, c'est sur l'énigme de l'air. Sur le coup, en impro, j'ai été incapable de trouver une énigme qui représente un peu de challenge. Il m'est venu l'idée de chronométrer l'énigme en trente secondes pour pimenter, mais le joueur de l'Avocat a trouvé en une seconde... Le palliatif à ce genre de problème, c'est accumuler les défis tactiques jusqu'à en trouver un qui mette vraiment les joueurs à l'épreuve.
+ Hormis ces deux point qui me semble un faible bémol, le défi pourtant ardu du mindfuck+tactique+improvisé me paraît entièrement relevé !
+ Univers de Millevaux et de Mantra exploités à parts égales. Ce qui a émergé lors du playtest, c'est que tous les multivers étaient forestiers, alors que dans ma tête, Millevaux c'était un seul univers. C'était beaucoup beaucoup plus cool de dire que tous les univers étaient Millevaux, et d'y juxtaposer la mythologie de Mantra (Androgyne-Roi, le Puits des âmes, le Pétrole, le Lion, les Anciens...). L'autre émergence, c'était de confronter les personnages à leurs doubles dans le multivers, et à leur permettre de les posséder. Du coup, les doubles faisaient d'excellents personnages de rechange en cas de décès, et ça consolidait la mythologie de Mantra à mon sens.
+ Je suis bluffé par le système de dé. Mantra liste une série de scènes cool (changement d'univers, événements traumatiques, morts de personnages, etc...) qui induisent des pertes de perles. L'idée en rajoutant un dé, c'était de relier le résultat du dé à une arborescences de possibilités. A chaque fois qu'on jette un dé, il va se passer un truc cool sur lequel on va rebondir. ça a complètement sous-tendu mon impro. ça, plus la table des périls et les réminiscences des personnages dont je me suis servi pour générer des univers, j'ai obtenu des images fortes en peu d'efforts. Les formulations étaient telles que les joueurs comprenaient de suite ce que je proposais, contrairement au système classique d'Inflorenza qui nécessite une plus grande gymnastique mentale.
+ Le seul truc que j'avais préparé, c'est ma scène de départ et aussi quelques images en tête d'environnements forestiers (que j'ai omis de caser en totalité), et tout le reste a émergé, ça a fonctionné sans problème. Je raconte pas si j'avais eu la table des aventures ou l'almanach.

A implémenter dans les règles :
Limiter la création de personnage à une réminiscence. Remplacer la notion d'échec avantageux par la notion d'échec réminiscent (on échoue mais on gagne une nouvelle réminiscence à inscrire sur sa fiche).
Rajouter une table de détails forestiers que j'ai développée dans la foulée.
Rajouter quelques conseils pour mener tactique.
Principe de non-datation : élargir à avant l'apocalypse : on ignore si on est avant, pendant ou après l'apocalypse forestière.

Retour de Batronoban :

- qu'appelles-tu "tactique"?
- que penses-tu de la remarque du type sur les Réminiscences?
- quel est l'objectif de changer / fusiinner Le fonctionnement des Réminiscences en énigmes comme celles là?
- comptes tu fournir une liste de Réminiscences comme Mantra ou pars-tu sur quelque chose d'autre?
- les perles sont-elles aussi importantes et significatives avec tes changements?
- pourquoi le d6?

Ma réponse :

A. Le tactique : je trouve que Mantra se focalise beaucoup sur les défis de stratégie donnés aux joueurs : résoudre des puzzles pour trouver des perles de conscience, se sortir de tous un tas de dangers, trouver le meilleur positionnement dans la guerre des univers... Il y a aussi des éléments esthétiques (plein plein) et moraux, mais à mon sens c'est la tactique qui domine, le moral et l'esthétique sont à son service, et donc pour Millevaux Mantra j'ai essayé de maintenir cette dominance du tactique.
B. J'ai du mal à savoir si je suis d'accord avec lui. Disons que si on fait vraiment du Millevaux Mantra (pas uniquement du mantra avec Millevaux parmi le choix des univers), il faut que la forêt domine, donc si une réminiscence est pas trop forestière, on a l'impression de sortir du jeu. C'est pour ça que j'ai "forestisé" la réminiscence de la grande muraille de Chine, mais peut-être pas assez aux yeux du joueur. La Réminiscence du cube de cuir, je l'ai fait jouer telle quelle parce qu'elle était très Millevaux dans son côté horreur organique et qu'elle faisait renvoi vers la scène du cube blanc (peut-être que le cube blanc me vient de la lecture de Mantra, qui m'a fait penser au film Cube)
C.Si tu parles de l'énigme du cube blanc, c'était pas une réminiscence. C'est juste que je voulais faire jouer une péripétie entre le métro et la caverne du roi en jaune, et j'ai tiré "enigme", et ça m'est venu de le jouer comme ça, même si en effet ça ressemblait beaucoup à une micro-réminiscence (ce qui est cool, même si l'énigme était pourrie)
D. Non, je vais juste conseiller de "forestiser" les réminiscences de Mantra ou d'utiliser la table des Périls ou d'autres tables que j'aurai publié entre temps (table des aventures, almanach)

E. Oui, même plus. Chaque douleur entraîne une perte d'une perle actuelle, la mort la perte d'une perle permanente. Le jeu est plus speed parce qu'on peut perdre une perle à chaque jet de dé (proba environ 1 chance sur 2), en deux heures et demi on avait consommé les 4 perles permanente de mes deux joueurs, c'est pour ça qu'on avait arrêté. J'ai vraiment travaillé pour mettre en valeur ton système et l'accélérer plutôt que pour l'écraser.
F.Parce que c'est la granularité qui me convient pour mes tables. C'est pas du tout du Inflorenza comme ce que tu as pu voir dans le livre de base, c'est un mix entre les innovations d'Inflorenza qui ont suivi la parution, et mes travaux sur d'autres jeux, et des idées spécifiques à Millevaux Mantra
Outsider. Énergie créative. Univers artisanaux.
Ma page Tipee.
Avatar de l’utilisateur
Pikathulhu
Dieu d'après le panthéon
Messages : 3250
Inscription : dim. août 22, 2010 7:26 pm
Localisation : Morbihan
Contact :

Re: [CR] Les jeux d'Outsider

Message par Pikathulhu »

VOIR AU TRAVERS

Drame au sein d'une famille qui a été et d'une famille qui aurait dû être, cruauté du destin.

Jeu : S'échapper des Faubourgs, cauchemar de poche dans une banlieue hallucinée
http://outsider.rolepod.net/catalogue/s ... faubourgs/

Joué le 08/11/2015 sur google hangout
Personnages : Léon, Armel, l'Agent de propreté

Partie enregistrée sur ma chaîne youtube (la vidéo montre l'évolution du plateau de jeu) :
Séquence 1/2
Séquence 2/2

Image
crédits : Bert Werk, licence cc-by-nc, galerie sur flickr.com


L'histoire :

C'est la vieille ville, sa grand'place piétonne, ses pavés bombés. C'était le plus cossu des centre-villes, avant qu'il ne tombe en décrépitude, avant que la nuit il ne devienne la proie des zonards. Léon, l'opticien, sait par où c'est arrivé. Il y a ce passage piéton sous la voie ferrée. A l'intérieur, il y a une porte, qu'on ne voit que la nuit. C'est arrivé par là.
Léon voit beaucoup de choses. Il a inventé des lunettes qui lui permettent de voir le plus grand défaut de chaque personne. Ses lunettes-là, elles ne sont pas à vendre. Il les garde pour lui, il a trop peur que quelqu'un en fasse un mauvais usage.
Dans la maison de Léon, il y a son fils, Armel, qui devrait dormir. Armel a vingt ans. Il souffre d'asthme chronique depuis toujours. Et ses études en souffrent beaucoup. Il végète à la fac, il sèche beaucoup de cours. Il garde le lit. Mais cette nuit, il a fugué. La porte était ouverte en bas, et il a sorti. Il est allé vers le passage. Il a trouvé la porte. Derrière, c'était un couloir, crépi de toiles d'araignée, ça lui a rappelé son asthme. Mais il a ignoré sa peur, il est entré dans le couloir, et il est arrivé de l'autre côté. Aussitôt après, il a commencé une crise, et il a aspiré à maintes reprises dans sa ventoline pour se calmer.
Il y a trouvé son père, Léon, qui lui a dit de rentrer à la maison. Armel lui a expliqué ses intuitions. Qu'il n'était plus possible de rentrer à la maison, qu'il fallait s'échapper des faubourgs, mais que ce serait difficile, et même insupportable, qu'il faudrait tuer des monstres pour prendre des clés, et qu'il n'y aurait pas de sortie pour tout le monde.
Ils ont trouvé l'Agent en train de balayer la grand-place, vieux bonhomme de soixante-quinze ans. Personne ne sait son nom, tout le monde l'appelle par sa fonction, l'Agent de Propreté, même lui se désigne ainsi. Léon et Armel le connaissent bien. Léon lui fait des lunettes à prix réduit, car il a pitié de lui. Armel utilise son argent de poche pour lui payer des ménages : l'Agent balaie sa chambre régulièrement, car Armel ne supporte pas la poussière, et pour cette raison ne peut pas faire le ménage régulièrement. Armel demande à l'Agent de Propreté s'ils peuvent s'entraider, mais pour l'Agent, le combat semble perdu d'avance. Il ne se voit pas d'avenir hors des Faubourgs, il ne pense pas pouvoir s'en échapper de son vivant. Son balai est tout usé. Il a des échardes qui lui mettent les mains en sang.

Plongé dans la nuit, il y a le quartier des rêves brisés. ça ressemble à un mélange d'école et de bureaux. Il y a une cour de récréation, avec un tourniquet qui tourne seul sous le vent en grinçant. Il y a des immeubles de bureaux, et dans ces bureaux, tous les projets que les gens des Faubourgs n'ont jamais mené à bien. Il y a les maquettes d'architecture qu'Armel n'a jamais réalisées. Il y a la famille que l'Agent n'a jamais eue, et les métiers heureux et authentiques qu'il n'a jamais pratiqués. Armel demande : "Papa, qu'est-ce qui t'attend dans le bureau des rêves brisés ?". Léon préfère ne pas répondre.

Une personne arrive à leur niveau. C'est la femme de Léon, la mère d'Armel. Elle demande à Armel ce qu'il fait là à cette heure-ci, elle lui demande de retourner au lit. Armel voit en elle la personne qui l'a cloué au lit toute sa vie, qui lui interdisait de sortir pour qu'il ne prenne pas froid, pour qu'il ne se fasse pas mal. Qui l'a paralysé à trop prendre soin de lui. Pour lui, ça ne fait aucun doute, sa mère est l'un des monstres dont il faut prendre les clés. Léon tente de le raisonner. Il voit surtout la femme qu'il a aimé, avec qui il vit depuis tant d'années, qui lui a donné un enfant.

Armel ne peut se résoudre à lever la main sur elle. Il fuit, et se rend au bureau des rêves brisés. Il veut voir de ses yeux les plans et les maquettes d'édifices qu'il aurait faites s'il n'avait pas passé autant de temps au lit. Il imagine des bâtiments beaux et légers, outrepassant leur fonction première pour atteindre des sommets esthétiques. Mais quand il arrive dans la salle qui lui est dédié, tout est carbonisé ! Les maquettes sont noires et fondues ! Il y a quelqu'un dans la salle, un agent du fisc, qui parle en chiffres et en langage cabalistique. L'agent lui dit : "J'ai brûlé tout ça parce qu'il vaut mieux que tu te résigne. Embrasse plutôt des études dans la fiscalité. On recherche du monde, personne ne veut être contrôleur des impôts. Ce sont des études faciles, et tu seras fonctionnaire. Signe ce contrat." Armel n'en peut plus, il se saisit du stylo que lui tend l'agent et il le frappe avec, rageusement, jusqu'à ce que l'agent du fisc ne bouge plus. Puis il repart avec ce stylo, le stylo des engagements lourds, le stylo qui a servi à l'Agent pour signer son CDI de balayeur, le stylo qui a servi à Léon pour signer son registre de mariage.

Léon non plus ne lèverait pas la main sur cette femme. Alors l'Agent s'approche d'elle, la mère, qui commence à le rabrouer, à l'accuser d'avoir entraîné son fils et son mari au dehors, qui le rabaisse à son petit rôle de balayeur. Alors l'Agent réplique. Il dit à la mère des choses tellement méchantes sur elle, qu'elle meurt d'une crise cardiaque. Il trouve sur elle une liste, la liste des choses qu'elle voulait faire dans sa vie.

Un immeuble s'écroule, bloquant l'accès au bureau des rêves brisés. Armel tente de dégager les décombres, ça lui coûte énormément d'efforts, il avale beaucoup de poussière, il perd sa ventoline dans les gravas. Bien que la voie soit libre pour retourner au passage, il reste caché dans les décombres, il a besoin de reprendre son souffle, reprendre son souffle, reprendre son souffle. Il appelle l'Agent et Léon à l'aide.

L'Agent a changé les graffitis sur les murs avec son sang. Il a voulu rouvrir le passage vers le bureau des rêves brisés, mais il n'a pas dû vouloir assez fort, car il arrive dans un autre quartier, le quartier ecclésiastique. C'est un vieux quartier qui était dévolu au membres du clergé, qui est depuis longtemps devenue une zone en proie aux lascars. Il y a encore des vieilles chapelles et des vieux presbytères, mais il fait tout le temps nuit, et les enfants qui s'y rendent disparaissent à la faveur de l'obscurité. Dans ce quartier, il y a un monstre familier des enfants, la petite souris. Elle n'est plus le petit animal généreux et complice. Aujourd'hui, elle s'est pervertie comme les enfants, qui sont maintenant pourris gâtés, capricieux, méchants. Elle demande des choses horribles en échange de ses services. Elle ne prend plus l'apparence d'une petite souris, mais l'apparence de la plus grande peur de chacun. Et quand l'Agent se présente à elle, la petite souris prend l'apparence de la femme qu'il aurait dû épouser, et qu'il a plaqué sur l'autel, par peur de s'engager. La mère de Léon. Léon aurait dû être son fils s'il avait osé franchir le pas. Elle est en robe de mariée. Elle a une bouche horrible, écartelée, pleine de dents, elle l'invite à l'embrasser. L'Agent n'en peut plus, il la massacre à coup de balais, et à son doigt il récupère l'objet qu'il n'a jamais osé lui passer : son alliance.

Léon pense que pour rouvrir le passage vers Armel, il faut y mettre du cœur, y mettre du lien. Il se saigne, il s'arrache des cheveux, il pense fort à son fils, et il arrive à redessiner la porte avec son sang et ses cheveux, et enfin Armel peut le rejoindre. Léon essaye de trouver d'autres portes de sortie. Il se dirige vers le quartier de la Mort. Et découvre que ce quartier est l'inconscient de Léon. Il découvre ce qu'il connaissait déjà grâce à ses lunettes, mais le voir en vrai l'effraye tellement qu'il recule. C'est une ville en ruines. Il y a des bougies à toutes les fenêtres. Et des grands projecteurs plaquent sur les façades des passages de la vie de l'Agent. On le voit abandonner sa future épouse sur l'autel. On voit son témoin la réconforter. Ce témoin, c'est celui qui deviendra la père de Léon.

Armel repasse sous le passage, malgré les toiles d'araignée. Il entend au-dessus de sa tête le train qui passe, ce train qui symbolise tous les trains qu'il n'a jamais osé prendre. C'est décidé, s'il s'échappe des faubourgs, il prendra le train, il voyagera, il osera, il réalisera ses rêves. L'asthme, c'est dans sa tête. Il peut le surmonter.

Quand Armel arrive de l'autre côté, Léon le prend dans ses bras pour le rassurer. C'est une chose qu'il ne fait jamais, alors Armel est un peu crispé, mais ça arrive quand même.

Léon se dit qu'il peut essayer un autre quartier, alors il va voir le quartier de l'échappatoire, après tout c'est leur voie de sortie, mais quel n'est pas son effroi, quand il constate que c'est la même chose, même décombres, mêmes bougies, mêmes films muets de la vie de l'Agent projetés aux façades !

Il y a aussi ce parc d'enfants. Les enfants y jouent encore alors que l'endroit est devenu dangereux, la pelouse de la boue, les jeux géants des pièges mortels. Comme un roi dans cette cour des miracles enfantine, il y a le neveu de Léon. Ses parents - la sœur de Léon et son beau-frère - ne l'ont pas du tout bien élevé, en tout cas pas selon les principes de Léon. Ils ont divorcé et ils ont tous les deux tenté de séduire l'enfant pour en avoir la garde, lui offrant tout ce qu'il voulait, lui passant tous ses caprices. Le neveu en est devenu méchant. Il a commencé à harceler et à martyriser ses camarades. Léon veut aller le voir pour lui donner une bonne correction. Mais une barrière d'enfants aux visages inexpressifs se dresse entre lui et le neveu, qui arbore un sourire hypocrite.

Armel comprend que quand Léon dit vouloir "corriger" ce môme capricieux et tyrannique, il s'apprête à aller trop loin. Il essaye de l'en dissuader, de lui dire que le neveu n'apprendra rien du tout s'il le tue, mais Léon n'écoute pas. Il écarte les enfants à coups de baffe, il arrive en face du neveu. Le neveu crie : "Ne me touche pas, t'es pas mon père !". Les autres gosses se rassemblent en en ronde autour de lui et commencent à le narguer. Léon sent le stress en lui et si dit que s'il fait peur à un enfant, les autres s'en iront. Alors il prend le neveu par les épaules et le jette violemment contre une des haies en fer qui entourent les différents jeux. L'enfant se heure la nuque, celle-ci cède et il meurt sur le coup. Et sur lui, Léon trouve un ours en peluche. Un petit ours en peluche protecteur.

Léon avait parlé à Armel de l'estrade. Un lieu de haute couture, une rampe de défilé infinie où passent des mannequins anorexiques sans s'arrêter, sous le feu des projecteurs. Les contemplent une foule de personnes superficielles, qui colportent des ragots et commentent le spectacle avec cruauté. Elles s'empiffrent au buffet garni, sans réaliser qu'on leur sert des larves et autres pourritures. Léon lui a expliqué que ce lieu représentait le pire défaut d'Armel : son avidité. Sur la rampe passe et repasse une femme superbe, la femme qu'Armel courtise depuis des années, alors qu'elle est et sera à jamais au-dessus de ses moyens, une femme qui par sa simple beauté a eu tout ce qu'elle voulait dans la vie sans avoir besoin de le demander. Tout le contraire de l'Agent, qui est né sans aucun talent, sans aucune force, qui a dû subir. Tout le contraire de Léon, qui a repris la boutique d'opticien de son père, parce que c'était ainsi, c'était juste, il l'a accepté, il a même aimé son métier, même si aujourd'hui, s'il s'échappait des faubourgs, il ferait autre chose, mais quand même, sa petite sœur, son père ne lui a rien demandé, elle a bien fait ce qu'elle voulait, elle est tombé amoureuse d'un bellâtre qui n'en voulait qu'à sa dot, elle a élevé son fils n'importe comment, alors que Léon passait sa vie à s'inquiéter pour Armel, et Armel, lui il n'a jamais voulu accepter sa condition, il rêvait d'une belle vie, au bras d'une femme superbe comme ce mannequin, alors qu'il aurait dû se résigner à vivre une vie normale, à la hauteur de ses capacités, une vie qu'il aurait pu mener avec son asthme, au lieu de ça il s'est enfermé dans des rêves. Armel se demande s'il ferait bien d'aller à l'estrade, et de tuer ce mannequin, si c'est ce que son père veut.

Mais Armel n'ose pas, il ne veut pas tuer des personnes trop proches de lui, alors il file vers le quartier ecclésiastique. Il sait que la petite souris est revenue, ça va une petite souris, il peut la tuer sans remords. Mais la petite souris prend l'apparence de sa plus grande peur, elle prend l'apparence de sa mère, il la trouve derrière une chapelle, à l'ombre, dans un endroit incongru, qui lui dit, apeurée : "Mon enfant, que fais-tu là ? Je t'en prie, rentre à la maison, tu vas prendre froid, il va t'arriver malheur." En pleurs, Armel se saisit du stylo et il lui poinçonne le cœur, encore et encore. Et sur elle, il trouve une photo, un polaroid décoloré. Une photo de Léon qui le tient dans ses bras quand il était bébé, une photo que sa mère gardait toujours sur elle, dans son portefeuille, contre son cœur.

Armel croise l'Agent, qui dit que Léon a perdu l'esprit. Qu'il voit le mal partout, par exemple tout le mal qu'il dit de lui, sur sa vie gâchée, qu'il aurait pu être le père de Léon s'il s'était comporté autrement, sur l'avidité et la lâcheté d'Armel. Il dit que Léon est devenu un monstre des faubourgs. Armel essaye de le raisonner, non Léon est juste une victime des circonstances comme nous tous, mais l'Agent n'écoute pas, il fonce vers le parc, vers Léon. Léon comprend ce qui va se passer. Il donne ses lunettes à l'Agent et lui demande de les convier à Armel, de lui dire d'en prendre grand soin, qu'il les lui lègue, qu'il comprendrait sûrement beaucoup de choses. L'Agent prend les lunettes et il tue Léon avec ce qui reste du manche de son balai, et il récupère l'ours en peluche sur son corps, maintenant il a trois clés. Il a pouvoir en donner à Armel, ou sortir en premier et écrire son nom sur le papier pour qu'Armel puisse sortir en second.

Dans le quartier de l'échappatoire, la petite souris renaît, elle revient, hydre manipulée par l'esprit de Léon. Elle se traîne vers le parc. Armel lui crie que ça ne sert à rien de se venger de l'Agent. Armel s'est trop agité en faisant la chasse aux monstres. Il a perdu tout son souffle. Il sait qu'il va mourir, là, dans le quartier ecclésiastique, ses poumons vidés. Mais l'hydre-petite souris-Léon n'écoute pas. Elle court vers le parc, elle court vers l'Agent. Aux pieds de l'Agent tombent les objets qu'il avait glanés.

L'ours en peluche. Boum.

L'alliance. Tinc.

Et, flap, flap, la liste.

La liste des choses que la mère d'Armel, la femme de Léon, voulait tant accomplir avant sa mort.


Quartiers :

bureau des rêves brisés
quartier ecclésiastique
inconscient de l'Agent
parc
estrade


Confinements :

immeuble brisé
enfants


Monstres :

fisc
petite souris
mère
neveu
mannequin


Clés :

stylo contrat
photo
liste
alliance
ours


Retour du joueur de l'Agent :

+ Le jeu est intéressant.
+ L'histoire et ses problématiques sont sympas.
+ J'avais peur de pas réussir à intégrer mon perso, mais ça s'est fait.
+ Mais ça manquait d'interaction entre personnages, c'était trop formel aussi.
+ Si j'avais joué avec des amis, le côté RP en aurait pris un coup, parce que c'est toi, en tant que MJ, qui a poussé au RP à travers ton personnage d'Armel.
+ La mécanique de jeu est trop présente dans la fiction à mon goût.
+ Je me suis senti contraint par les mécaniques, surtout sur la fin. Je pensais avoir fait un beau coup en tuant Léon, mais le joueur de Léon a pu agir de suite après sous la forme d'un monstre-joueur et tuer mon personnage : je n'ai pas eu l'opportunité de jouer le final qui m'intéressait, à savoir faire un choix entre passer le premier et laisser un mot pour qu'Armel s'échappe à ma suite, où me sacrifier à lui pour qu'il puisse s'échapper seul avec mes clés. Du coup, j'ai trouvé que ça annihilait le côté tactique : tu veux faire un beau coup, mais tu en es puni tout de suite.
+ Mais finalement, c'était logique qu'on soit contraint dans la fiction...
+ L'histoire est très intéressante et c'est la mécanique qui l'a entraînée. [réponse de la joueuse de Léon : mais on peut le retrouver dans d'autres jeux avec un partage large des responsabilités. On essaye de faire des bonnes histoires, y'a une profondeur, on est investi.]
+ Dans les jeux à partage large de responsabilités que j'ai testés, le rythme est lent, parce qu'on décrit longuement et qu'on se pose beaucoup de questions sur qui peut prendre la parole pour dire quoi. J'attends d'en trouver un où le rythme serait plus enlevé.


Retour de la joueuse de Léon :

+ En terme de système, je préfère Inflorenza où je suis libre d'agir comme je veux et je peux co-construire avec les autres joueurs.
+ J'ai eu du mal à comprendre le principe de la rose des vents.
+ L'environnement était trop flou. Nos actions n'étaient pas réfléchies, j'arrivais pas à me concentrer sur l'objectif de trouver des clés pour sortir. Le besoin de décrire et de comprendre les règles me prenait trop d'énergie.
+ J'ai trouvé que le rythme était super lent. Souvent je suis MJ alors j'étais expansive, j'avais peur que les autres s'ennuient pendant que je parlais. [réponse du joueur de l'Agent : en fait, c'est un jeu basé sur l'écoute.].
+ Pour inventer des monstres et des quartiers, y'avait pas de problème, c'était pour le reste que j'étais en difficulté.
+ Tu dis que c'est un jeu sans MJ, mais c'est pas tout à fait vrai. Celui qui a lu le livre tient un rôle de MJ. Tu as plusieurs fois fait des dialogues pour des monstres, et tu utilisais ton personnage d'Armel pour amorcer le RP ou pour nous transmettre des infos.
+ L'histoire m'a intéressée, même si la mécanique ne me convient pas. Trop de contraintes créatives. Ces trois heures de jeu étaient fatigantes. [réponse de Thomas : le hangout ajoute des contraintes supplémentaires, je ne pouvais pas vous faire des démonstrations manuelles de la rose des vents, où vous conseiller sur les actions à faire].
Outsider. Énergie créative. Univers artisanaux.
Ma page Tipee.
Avatar de l’utilisateur
Pikathulhu
Dieu d'après le panthéon
Messages : 3250
Inscription : dim. août 22, 2010 7:26 pm
Localisation : Morbihan
Contact :

Re: [CR] Les jeux d'Outsider

Message par Pikathulhu »

L'ÊTRE DE PIERRE

Premier test de Marchebranche, poésie naïve à Millevaux, exploration de donjons et embranchements narratifs.

Jeu : Marchebranche, aventures initiatiques dans un monde de forêts en clair-obscur.

Joué le 15/11/2015 en cercle privé

Personnages : l'artisan, le saltimbanque, le mage

Image
crédits : theo junior, licence cc-by, navarrohouston, domaine public, galeries sur flickr


Feuilles de personnages :

Au début du jeu :

Artisan
Saltimbanque
Mage

A la fin du jeu :

Voyageur (ex-Artisan), expérience 1
Atouts : Coeur
Spécialité : X Comprendre la langue des horlas
Équipement : X Corde (X noirceur : électrique)
Compagnon : X Robot de pierre
Souvenirs : X Rebellion contre une conspiration horsain

Saltimbanque
Équipement :
0 Bonnet à grelots (noirceur : les grelots sont devenus des têtes qui piaillent)

Mage
(noirceur : capturé par l'ogre > noirceur guérie)


L'histoire :

L'artisan, le saltimbanque et le mage sont trois Marchebranches. Ils arrivent à l'auberge du Hibou Noir, un relais de voyageurs au milieu de la forêt. L'endroit est rustique, avec des tables et des tabourets ronds en chêne. Dans l'auberge, trois personnes leurs promettent chacune une carte du Tarot de l'Oubli en échange de leur aide. Il y a le rémouleur, un petit homme jaunâtre en cagoule, qui veut qu'ils se rendent dans des ruines souterraines pour réactiver une relique. Il y a l'aubergiste elle-même, une femme bien portante, qui leur explique qu'elle doit épouser un homme, mais que celui-ci devait traverser toute la forêt pour venir la marier, et qu'il n'est pas arrivé. Il a dû lui arriver quelque chose en chemin, elle veut que les Marchebranches la retrouvent. Et enfin, il y a un enfant, qui vivote en réparant des clous. Il leur dit qu'il est le septième fils d'un septième fils, et qu'à cause de ça des sorciers le pourchassent pour faire de lui une composante magique pour leurs potions.

Après quelques réflexions, les Marchebranches optent pour la mission du rémouleur : se rendre dans des ruines souterraines pour réactiver une relique.

Ils trouvent les ruines au milieu de la forêt. C'est un grand puits artificiel, il y a des grandes portes de pierre le long des parois. Une brume monte du fonds du puits. Le mage envoie une petite boule de lumière éclaire le fonds du puits. On discerne alors un sol de pierre où est gravé le dessin d'un engrenage.

L'artisan fabrique une corde avec des racines et ils descendent au premier niveau inférieur. Il y a ensuite des escaliers qui doivent courir tout le long des niveaux inférieurs, mais ils comprennent qu'un troll vit dans ces lieux. Alors avec la corde, ils se font glisser le long de la paroi, d'étage en étage, pour atterrir au fonds du puits. Là, ils constatent qu'il y a une dizaine de portes tout le tour. Il y a un symbole cabalistique sur chaque porte et on retrouve les mêmes sur les sommités de l'engrenage. Les aventuriers commencent à inspecter les lieux, ce qui leur fait perdre le temps qu'ils avaient gagné en descendant en rappel : le troll descend à leur rencontre et capture le mage !

Il va pour repartir, d'un pas pataud, mais le saltimbanque l'attire à lui en chantant et en faisant tinter les grelots de son bonnet. L'artisan fait du bruit avec ses outils. L'ogre s'arrête donc dans le dernier niveau inférieur, alors les aventuriers le rattrapent et lui reprennent le mage.

Ils retournent sur l'engrenage. L'artisan trouve une manivelle cachée, il l'actionne, l'engrenage s'élève et l'artisan peut le faire tourner de manière à remettre les symboles cabalistique en face des portes. Neuf des dix portes se referment alors. Les aventuriers entrent par la porte restante, ils arrivent dans une cave où est entreposé une grosse machine en forme de chaudron, garnie de bobines de cuivre et de câble qui partent dans toutes les directions. Sans comprendre vraiment le rôle de cette machine, les aventuriers la réactivent. Après une grande vibration, la machine envoie du courant électrique vers tous les câbles. Les aventuriers remontent vite fait à la surface. L'artisan monte dans un arbre, et voit des grands arcs électriques à divers points de la forêt.

Ils se dirigent vers l'un d'eux et trouvent un tumulus de pierre en forme d'igloo, qui porte des glyphes au sens mystérieux. L'entrée du tumulus ressemble à une bouche. Deux yeux de verre s'ouvrent sur deux pierres en haut de la "bouche". Des bras de pierre sortent soudain de l'édifice et s'ébrouent. Le tumulus se redresse et révèle des jambes de pierre qui étaient enfouies sous la terre.
L'artisan jette sa corde à l'intérieur de l'être de pierre et ils s'y hissent tous. Ils trouvent un poste de commande. Ils essayent d'en comprendre le fonctionnement, et y parviennent, mais ils ont coincé la corde dans un mécanisme, et maintenant elle est devenue électrique. L'artisan actionne quelques manettes et arrive à prendre le contrôle de l'être.

Ils rentrent à l'auberge à bord de ce robot minéral. Quand il le voit, le rémouleur ne se sent plus de joie. Ils ont réalisé son rêve de faire renaître l'Âge d'Or ! Il se frotte les mains, apparemment le temps où il gagnait une misère en aiguisant des socs de charrue est fini : il a des projets en tête.
Il les gratifie d'une carte du Tarot de l'Oubli. Les aventuriers se départagent entre eux pour savoir qui la mérite le plus : on opte pour l'artisan.
Quand il prend la carte, l'artisan se rappelle un de ses souvenirs perdus : il s'est jadis rebellé contre une conspiration de horsains, des êtres à demi-humains, à demi-horlas, qui avaient pris le pouvoir en douce. Que sont-ils devenus ? Recherchent-ils toujours l'artisan ? Le souvenir ne le dit pas.
L'artisan décide maintenant d'embrasser une nouvelle vocation, celle de voyageur. Il contrôle un peu mieux l'être de pierre, qui devient son nouveau compagnon. Il garde sa corde, mais tant qu'elle reste électrifiée, il sait que s'il s'en sert, il sera contaminé par la noirceur...


Playlist :

Image
Tome X, par Erang (dungeon-synth, musique médiévale, dark folk pour un monde de châteaux et de chasses)


Durée de jeu :

3/4 d'heure


Le jeu :

Cela se passe à Millevaux, mais dans un Millevaux qui pourrait tout aussi bien être un univers de fantasy. Les références à l'Europe ont disparu, la civilisation de l'âge d'or n'est pas notre civilisation, mais une civilisation mythique qui n'a laissé sur terre que des reliques de ses passages, objets à la technologie arcanique.

Le côté crade de Millevaux s'estompe pour laisser place à un côté sauvage et naïf, à mi-chemin entre Miyazaki, Zelda, Moebius et la Légende des Sept Boules Vertes (BD de Laurent Parcelier, grosse grosse inspi pour Marchebranche : http://le-multivers.forumpro.fr/t4765-l ... -dessinee)

Dans Marchebranche, on incarne des pèlerins de la confrérie des Marchebranches. Les Marchebranches sont à la recherche de leur pays natal, dont ils ont oublié l'emplacement. Ils le recherchent pour ne pas au succomber au Vide, la souffrance morale qui affectent ceux qui ont trop oublié. Ils acceptent de faire des aventures contre un paiement bien particulier : une carte du Tarot de l'Oubli, qui leur permettra de regagner un souvenir.
Au début d'une campagne, trois figurants proposent chacun une aventure au groupe, avec en promesse du paiement une carte du Tarot de l'Oubli. Ces aventures sont tirées au hasard, inspirées des 36 situations dramatiques de Georges Polti, que j'ai développées en 216 situations dramatiques, en donnant 6 exemples par situation dramatique, un par marqueur de Millevaux (1 ruines 2 forêt 3 mémoire 4 emprise 5 égrégore 6 horlas).

Il doit y avoir d'autres tables, ainsi une table de 36 rencontres, une table de 36 animaux, 36 horlas ou encore 36 lieux, mais elles n'étaient pas prêtes pour ce test.
Les joueurs se créent un personnage de niveau zéro : ils ont juste besoin de lui trouver un nom et une vocation : voyageur, artisan, saltimbanque ou mage (ici, je n'avais qu'un joueur, mais le jeu étant axé sur la coopération, je lui ai fais créer trois personnages. Il a omis de leur créer un nom, on les appelait donc par leur vocation).
Une fois que le groupe a choisi une aventure, on la résout en quelques conflits. Lors d'un conflit, les joueurs établissent ce qu'ils cherchent à atteindre, ils gagnent un d6 pour la description de leur action, un d6 s'ils s'appuient sur leur vocation. S'ils ont plus d'expérience, ils peuvent gagner un d6 par souvenir, équipement ou compagnon utilisé, mais au total un joueur ne peut jamais lancer plus de 3d6.

Chaque joueur établit l'action qu'il veut faire et lance ses dés. Pour réussir l'action, il faut faire un double. Il y a deux chiffres spéciaux : le double 1 rapporte une réussite, à condition d'encaisser une noirceur. Le double 6 rapporte une réussite critique, le simple 6 une réussite normale. On peut aussi utiliser le 6 pour se défendre contre un adversité capable d'infliger des noirceurs. On peut aussi donner ce 6 à une autre personnage pour le défendre. Une fois les dés lancés, chaque joueur peut donner des dés à d'autres joueurs pour leur permettre d'avoir un double et de réussir son action. Si le MJ avait déterminé que l'adversité était capable d'infliger des noirceurs (le nombre de noirceurs que peut alors infliger une adversité d'un seul coup est compris entre [score d'expérience du personnage le plus expérimenté +1] et [score d'expérience du personnage le plus expérimenté -1], elle répartit ces noirceurs entre les personnages qui n'ont pas réservé de 6 pour se défendre. Le joueur choisit si son personnage encaisse la noirceur ou si elle est défalquée sur un de ses équipements ou un de ses compagnons. Le MJ décrit ensuite en quoi consiste la noirceur. Tous les joueurs qui ont réussi leur action racontent comment ils réussissent, et le MJ raconte comment l'adversité, si elle est toujours présente à la fin du conflit, se retire, au moins temporairement.

Les noirceurs, c'est un terme générique pour définir les dégâts. Elles peuvent être de simples blessures, ou encore être associée à l'emprise ou à l'égrégore. C'est un concept malléable (directement inspiré des Outrages dans le jeu Innommable, de Christoph Boeckle : http://www.silentdrift.net/innommable/).
Un personnage d'expérience zéro est éliminé du jeu dès la première noirceur. Les personnages plus expérimentés peuvent encaisser autant de noirceurs que leur score d'expérience avant d'être éliminés.

Toute noirceur peut être soignable, mais chaque noirceur est différente à guérir, et nécessitera de recourir à des spécialistes ou à des remèdes variés.

Les équipements et les compagnons peuvent encaisser une noirceur. S'ils en encaissent une deuxième, ils sont définitivement retirés de la feuille de personnage : le personnage n'en a plus le contrôle, ou encore l'équipement ou le compagnon est détruit.

Un personnage peut utiliser un équipement ou un compagnon qui a encaissé une noirceur, mais à condition d'encaisser une noirceur supplémentaire. L'équipement ou le compagnon confère alors non pas un d6, mais un d4, qui est un dé spécial, parce qu'on ne le lance pas : on lance les autres dés, puis on chosit le résultat que fait le d4 (cela facilite l'obtention de doubles, mais ne permet pas de faire de 6, donc n'accorde pas de défense ou de réussite critique).

Le MJ peut à tout moment interdire une action à un personnage à cause d'une de ces noirceurs ; il lui offre en compensation un d4 que le joueur pourra lancer plus tard à la place d'un d6. Il ne peut y avoir plus de d4 en circulation que le nombre de joueurs.

Si un personnage veut tuer une autre personne, qu'elle soit un humain, un animal ou un horla, il encaisse une noirceur.

Quand un personnage encaisse plus de noirceurs que de son niveau, le MJ en reprend le contrôle. Le joueur peut créer automatiquement un nouveau personnage, de même niveau que l'ancien, de préférence choisi parmi les compagnons (s'il s'agit d'un compagnon d'un autre personnage, il faut l'aval du joueur). Si les personnages parviennent à guérir la noirceur d'un personnage, ils peuvent le faire revenir en jeu. Si entre-temps, le joueur avait refait un nouveau personnage, il peut choisir d'incarner l'un ou l'autre à tour de rôle.

Quand les personnage ont résolu une aventure, ils peuvent retourner voir leur commanditaire, celui-ci donne la carte du tarot de l'oubli qui est en sa possession à un des personnages les moins expérimentés. S'il y en a plusieurs, les personnages doivent se départager entre eux, et attribuer la carte à celui qui a le plus contribué à la réussite de l'aventure.

Quand un personnage récupère une carte du Tarot de l'Oubli, il gagne un score d'expérience. Il détermine s'il perdure dans sa vocation ou change de vocation (entre voyageur, artisan, saltimbanque et mage). Il peut ensuite cocher l'atout lié à sa nouvelle vocation : coeur pour voyageur, force pour artisan, esprit pour saltimbanque, pouvoir pour mage. Plus tard, le personnage peut utiliser ses atouts cochés pour obtenir un d6 dans une action. Le personnage obtient également un nouveau souvenir, associé à la carte qu'il vient de récupéré : le MJ tire sur la table des situations dramatiques pour donner l'intitulé du souvenir, le joueur choisit s'il développe lui-même le souvenir ou s'il laisse le MJ développé.
Le joueur se rajoute une spécialité, choisie dans le tableau des vocations de sa spécialité (six entrées par niveau d'expérience). Il peut choisir une entrée de niveau inférieur à son niveau actuel, mais pas de niveau actuel. Quand le personnage utilise une de ses spécialités lors d'une action, cela lui rapporte 1d6.
Enfin, le joueur coche une case de plus dans Équipements et dans Compagnons : les équipements et les compagnons placés dans les cases cochées permettent d'obtenir un d6 supplémentaire quand on les utilise.

Quelque soit le niveau, le personnage ne pourra jamais jeter plus de trois dés pour une action. Le passage de niveau augmente la quantité d'opportunités pour le personnage, pas sa puissance.

Quand les personnages atteignent le niveau 6, le sixième souvenir est la localisation de leur pays natal. Les aventuriers de niveau 6 ne peuvent plus progresser en expérience, ils se consacrent à rejoindre leur pays natal ou à une autre aventure de leur choix.

Il peut y avoir beaucoup de nuances autour de ces cartes du Tarot de l'Oubli : des fausses cartes, des figurants qui proposent un autre paiement, des cartes volées, des cartes maudites... Il peut aussi se passer des choses si les personnages perdent les cartes qu'ils ont acquises (essentiellement, ils perdent le souvenir qui y est associé, et peuvent aussi perdre un score d'expérience).

Quand une aventure est résolue, un nouveau commanditaire se présente aux personnages pour qu'il y ait toujours au minimum le choix entre trois aventures.


Feuille de personnage actuelle


Commentaires sur le jeu :

+ Déjà, le joueur et moi étions très satisfaits de l'ambiance, et de la rapidité du jeu.

+ J'ai été décontenancé parce que quand tous les personnages échouaient à leur action, l'aventure tombait à plat. Alors, j'ai improvisé la règle suivante : si tous les personnages échouent leur action, le MJ décrit comment le conflit se finit, mais ne tourne pas tout en leur désavantage : il décrit une réussite partielle ou une information. Finalement, les dés servent à savoir qui décrit majoritairement l'issue. Plus les joueurs réussissent, plus ils ont la mainmise sur l'issue du conflit, plus ils ratent, plus le MJ monopolise la narration.

+ Le joueur était un peu déçu par le conflit joué pour reprendre le mage capturé par l'ogre : dans ma tête on jouait le conflit pour récupérer le mage, dans la tête du joueur c'était un conflit pour rattraper l'ogre dans un premier temps. Résultat, il a réussi ses actions et j'ai décrit qu'il récupérait le mage, alors que le joueur attendait un peu plus de fight avec l'ogre. Je dois veiller à bien laisser les joueurs déterminer l'objectif du conflit, ça permet de ne pas les décevoir en faisant une ellipse sur quelque chose qui leur paraissait intéressant.


Nouvelles règles à playtester :

+ Pendant que les personnages se consacrent à une aventure, le contenu des autres aventures progresse, et les personnages seront informés des conséquences. Ainsi, dans cette partie, j'aurais pu annoncer, lorsque les aventuriers étaient retournés à l'auberge, que l'aubergiste était partie toute seule dans la forêt retrouver son promis, et que les sorciers étaient déjà dans l'auberge, à la recherche de l'enfant.

+ Considérer que les choses ne sont pas finies sous prétexte que les personnages se sont acquittés de leur mission. Ainsi, dans cette partie, les personnages ont bien remis en marche la relique, mais on n'en a pas fini avec cette histoire : que fait-on de tous ces robots de pierre qui se sont réveillés ? Ne vont-ils pas causer des ravages ? Ne vont-ils pas tomber en de mauvaises mains ? Ont-ils un cœur ? Idéalement, un nouveau commanditaire peut se présenter et offrir une mission qui soit plus ou moins corrélée à la mission précédente.

+ Prévoir que les personnages soient plus proactifs et s'en donnent les moyens : par exemple, à la suite de ce test, les personnages auraient pu s'intéresser aux robots, et proposer leurs services au bourgmestre local, en lui demandant une carte du Tarot de l'Oubli en échange. Bien sûr, le bourgmestre local, vu la complexité de se procurer une carte de Tarot, va vouloir prendre la main sur l'intitulé exact de la mission : il va leur demander de désactiver les robots, ou au contrôle de les faire basculer sous son contrôle... Bref, il faut que ça constitue de la matière à une vraie aventure.

+ Avant que le MJ attribue une carte du tarot de l'Oubli, il doit d'abord en tirer le contenu. Il annonce ensuite aux joueurs, non pas le contenu qu'il a tiré, mais le nom d'une arcane majeure du tarot à laquelle le contenu lui fait penser (par exemple "Les amoureux" pour "la personne commet un crime passionnel"). Il jette aussi un dé. 1-3, le joueur pourra développer lui-même le souvenir à partir du contenu (correspond à une carte tirée à l'endroit). 4-6, ce sera le MJ qui développera à partir du contenu (correspond à une carte tirée à l'envers). Ceci amène plus de choix. Exemple : "Vous êtes trois personnages à vous disputer cette carte. Il s'agit des Amoureux, tirée à l'envers. Vous êtes toujours tous les trois intéressés par cette carte ?"

+ Lors d'un passage de niveau, on peut effacer une de ses spécialités pour la remplacer par une spécialité de même niveau issue du tableau de sa vocation actuelle.
Outsider. Énergie créative. Univers artisanaux.
Ma page Tipee.
Avatar de l’utilisateur
Pikathulhu
Dieu d'après le panthéon
Messages : 3250
Inscription : dim. août 22, 2010 7:26 pm
Localisation : Morbihan
Contact :

Re: [CR] Les jeux d'Outsider

Message par Pikathulhu »

LA PHOTOGRAPHIE

Deux frères, un retour dramatique vers une ville radioactive, une séance intense à partir de rien.

Jeu : Inflorenza minima, le jeu de rôle des contes cruels dans la forêt de Millevaux

Joué le 24/04/2016 avec l'équipe du podcast de la Cellule

Personnages : Karl, Mallory

Image
crédit : skippy13, licence cc-by-nc, galerie sur flickr.com


L'histoire :

Mallory s'entraîne au base-ball en tapant des balles contre une vieille grille en fer rouillé devant les feuillages. Ce jeune homme blond vit pour deux choses : faire du sport et protéger son grand-frère Karl. Un enfant s'approche. Son visage est ridé comme s'il était très vieux. Il demande à Mallory de lui apprendre à jouer au base-ball. Mallory lui tend son gant tout fripé et lui envoie quelques balles très douces. L'enfant peine, mais finit par en rattraper une.

Mallory fouille dans sa mémoire pour savoir à quelle occasion il aurait déjà vu un enfant atteint d'une telle maladie. Il se rappelle le jour où avec son frère, ils ont fui la ville de Priax à cause de la radioactivité. Il était en combinaison anti-radiations, il attendait son frère resté dans leur maison pour récupérer des affaires. Il a vu un enfant avec une jambe coincée dans les décombres, il voulait de l'aide. Mallory l'a libéré, mais il n'a rien pu faire de plus, il n'avait aucune combinaison à lui donner. Alors, à cause de la radioactivité, l'enfant s'est mis à vieillir sous ses yeux.

Retour au présent. Mallory va chercher de l'eau pour l'enfant. Il va dans leur cabane. Le groupe électrogène turbine pour faire tourner le purificateur d'eau. Boc, boc, boc. Il rapporte de l'eau à l'enfant.

Karl est équipé de pied en cap. Il a enfin trouvé une carte. Il est prêt pour retourner à Priax. Il veut y retrouver une photographie de leur famille, car c'est le dernier souvenir qu'il en a. Son souvenir est resté dans la photographie, alors il veut la récupérer pour s'en rappeler. Mallory a prévu de l'accompagner, pour le protéger.

Arrive l'Anglaise. C'est la fille qui répare leur matériel, elle vient parce que le groupe électrogène fait des siennes. Elle est rousse, toujours en salopette pleine de cambouis et chargée d'outils, dont cette grosse clé anglaise qui lui vaut son surnom. Mallory est amoureux d'elle, mais il s'est gardé de l'avouer pour l'instant.

L'Anglaise veut partir avec eux, car sinon elle va rester toute seule et va devoir se trouver une autre communauté. Mallory insiste pour qu'elle les accompagne. Elle leur demande s'ils comptent passer par la rivière, plus praticable mais surveillée par les pillards, ou par la forêt, plus mystérieuse.

L'enfant insiste pour aller avec eux. Karl dit qu'il est impotent, qu'il va les ralentir, il ne comprend pas pourquoi l'enfant voudrait retourner à Priax. L'enfant dit qu'il connaît le chemin. Il est venu par la forêt. Karl demande comment il a pu trouver le chemin. L'enfant dit qu'il a accepté une infortune, et ainsi il a chargé son cœur, ce qui lui a permis de faire le chemin tout seul. Ils l'acceptent dans le groupe.

Il leur faudra des combinaisons anti-radiations pour eux quatre. Cela tombe bien, ils en ont juste assez. Ils n'en avaient que deux quand ils ont fui Priax, mais depuis, Mallory a fait ce qu'il faut pour s'équiper.

Flash-back. Quand Mallory s'est procuré les combinaisons. Il se rend à la péniche du vendeur de reliques, une embarcation déglinguée qui glisse le long du fleuve, avec des enfants en capuche qui montent la garde, armés de longs fusils couverts de bandages. A l'intérieur, celui qui tient la boutique porte un énorme œdème sur le visage. Il vend des outils et des objets de première nécessité, mais aussi beaucoup d'objets-souvenirs : montres, horloges, alliances, photos. Dans ce monde, la mémoire vaut de l'or. Il peut céder deux combinaisons à Mallory, mais en échange, il veut la médaille de Saint-Christophe qu'il sait que Karl porte en sautoir. Il donne un savon à Mallory pour qu'il fasse une empreinte de la médaille, ensuite le boutiquier lui pressera une copie sans pouvoir, et il pourra l'interchanger avec la vraie médaille. Mais si cette médaille intéresse le boutiquier, c'est bien pour ses pouvoirs. C'est une médaille qui protège sur la route. Sans la médaille, ils risquent de perdre une personne pendant l'expédition. Alors Mallory tente de lui proposer un autre troc. Il lui confie sa casquette de base-ball. Le boutiquier croque dans la casquette pour voir si c'est un objet-souvenir truqué.

Mais c'est un vrai. Cette casquette lui a été confiée par ses parents. Il contient le souvenir de ses parents. Mallory est prêt à s'en séparer car il pense que ses parents sont morts.

Soudain, ses parents entrent dans la péniche. Sa mère se précipite dans ses bras. Elle veut le dissuader de donner la casquette, de les oublier. Il dit qu'il les perdrait une deuxième fois. Mais Mallory a besoin de ses combinaisons, pour la bonne cause. Alors il donne la casquette. Sa mère retient ses larmes, son père n'ose rien dire. Ils font leurs adieux en silence et redescendent dans les eaux. Mallory voit encore les cheveux de sa mère émerger de l'eau. Puis plus rien. Mais il a pu récupérer les combinaisons.

Ils partent dans la forêt vers Priax, guidés par l'enfant-vieux. Ils lui ont demandé son nom, il a dit qu'il s'appelait Feuille.

C'est l'heure du bivouac. Autour du feu, Feuille réclame une histoire. Mallory pense qu'il a intérêt à charger son cœur pour la suite. Alors, il va raconter plus en détail comment il a abandonné Feuille. Il fait alors même qu'il sait que cela aura un impact négatif sur les sentiments que l'Anglaise pourrait avoir pour lui.

Flash-back. Ils sont en train d'évacuer Priax. Mallory a une combinaison, mais il ne peut la donner à l'enfant qui vieillit. Il lui dit d'attendre là, qu'il va revenir. Il lui confie son gant de base-ball. L'enfant lui demande de promettre que le jour où il reviendra, ils feront ensemble un match dans le grand stade de Priax. Mallory promet. Il rejoint son frère dans leur maison. La maison est remplie des reliques qu'a collectées son frère au fil du temps. Des cafetières, des horloges, des photos, des ustensiles. Une myriade d'objets-souvenirs. Un trésor. Mallory lui confie sa combinaison. Il faut partir maintenant ! Karl hésite, il n'y a que très peu de place dans la poche de sa combinaison. Il prend quelques objets, mais il se résigne à laisser sur place la photographie de sa famille. Il se promet de revenir la chercher.

Mallory a fini de raconter son histoire. De l'autre côté du feu, Mallory le fixe, puis détourne le regard. Elle sera désormais incapable de l'aimer.

Monde parallèle.
Dans ce monde, Mallory a donné sa combinaison à l'enfant, et Karl a pu faire tirer par Mallory un chariot rempli de reliques. Dans ce monde, c'est Karl qui tient la péniche aux reliques. Leurs parents sont avec eux, ils tiennent la boutique avec Karl. Mallory est sur le toit de la péniche, en fauteuil roulant. Son corps est perclus de vieillesse. Feuille, a ses côtés, a gardé sa jeunesse. Il demande à Feuille d'aller chercher l'Anglaise. "Tu sais qu'elle viendra, mais ce sera par pitié.", répond Feuille. Mallory insiste, alors l'Anglaise vient les visiter. Tous les trois, ils jouent au base-ball. Feuille place le gant élimé dans la main de Mallory. L'Anglaise lui lance des balles toutes douces pour qu'il puisse lui rattrapper sans qu'elles tombent dans l'eau.

Retour au présent.
Le groupe a progressé dans la forêt. Le compteur Geiger de l'Anglaise s'est mis à crachoter, alors ils ont enfilé les combinaisons. Ils arrivent à un endroit où une vieille femme aux longs cheveux gris a le pied pris dans un piège à loups. Karl dit que c'est un fantôme, un horla, elle devrait être morte, sans combinaison. Mais Mallory s'approche. La dame dit s'appeler Érable. Elle vient de Priax. Elle a perdu sa combinaison plus loin, dans les ronces vivantes. Et là, elle s'est prise dans ce piège à loup posé par les braconniers qui rôdent dans le secteur. Elle dit qu'elle est partie de Priax parce que son mari est mort, et maintenant elle est à la recherche de ses enfants.

Mallory la libère et la soigne. Il comprend qu'elle est en danger si elle reste seule et sans combinaison. Érable dit qu'elle connaît l'emplacement d'un trésor à Priax et qu'elle peut les y conduire en échange de leur escorte. Karl précise son intention à propos du trésor : il ne veut pas devenir un usurier de péniche. Il veut utiliser ce trésor, soit le vendre, soit utiliser la mémoire qu'il contient, pour fonder une communauté solide. Karl précise ainsi qu'il n'est pas motivé par l'appât du gain mais pas l'intérêt du plus grand nombre.
Il reste le problème qu'Érable a perdu sa combinaison. Mallory lui confie la sienne. Il décharge son cœur pour gagner la chance d'en retrouver une à Priax, celle du mari d'Érable.

Mais sur le chemin vers Priax, Mallory vieillit à chaque pas, et chaque pas est douloureux. Quand ils arrivent, son visage s'est creusé d'un large sillon de rides.

Priax. Les arbre qui ressortent des fenêtres des immeubles. Les grandes avenues soviétiques. Le parc d'enfant, avec son tourniquet rouillé. La fête foraine abandonnée. Grande roue couverte de lierre, auto-tamponneuses en décrépitude, figées dans une dernière collision.

Érable confie à Mallory la combinaison de son mari. Comme promis, Mallory amène l'enfant au stade de base-ball. Le stade est immense, couvert de feuilles. Cela fait longtemps qu'ils n'ont pas vu un endroit aussi vaste sans couvert d'arbres. Qu'ils n'ont pas autant vu le ciel. Le stade est comme baigné de lumière. C'est comme si on était dans l'au-delà. Et Mallory a toujours été fasciné par la lumière, par ce qu'elle signifiait. Il est temps de se faire quelques home-runs.

L'Anglaise, Karl et Érable se rendent sur les gradins, au loin. L'Anglaise les acclame, mais le cœur n'y est pas. Érable serre la main de Karl. Elle lui dit : "Je suis heureuse".

Alors qu'ils se frappent ces balles promises depuis longtemps, Feuille dit à Mallory : "Je ne t'ai pas expliqué comment j'ai fait pour charger mon cœur. J'ai troqué mon espérance de vie. Ce soir, je vais mourir. J'aurais pu confier ma combinaison à Érable, cela n'aurait rien changé pour moi. Mais je t'ai laissé faire à ma place. Je voulais que tu comprennes ce que ça fait."

Mallory s'arrête un instant.

Il enlève sa combinaison. Fini pour lui d'être un petit-frère. Il est temps pour lui d'être grand-frère. Il prend Feuille dans ses bras. Puis il lui relance la balle. Ils continuent le match.

Karl hésite. Il pourrait encore courir, forcer son frère à remettre sa combinaison. Mais il préfère charger son cœur, pour les épreuves qui l'attendent encore. Est-ce pour respecter la volonté de son frère, pour l'intérêt de sa future communauté, ou par égoïsme ? La chose n'est pas tranchée.

Érable le conduit à la maison où se trouve le trésor. Karl reconnaît tout : les cafetières, les pendules, les ustensiles, les portefeuilles chargés de photos. C'est à sa propre maison qu'Érable l'a conduit. Il y a un jerrycan d'essence au sol. Érable sort un briquet et une photographie. La photographie de la famille de Karl. Elle lui demande de choisir entre le trésor et la photo. S'il prend le trésor, elle brûlera la photo. Elle lui dit de renoncer à ses cafetières, de choisir sa famille. Karl lui dit qu'elle n'est qu'un horla, qu'elle brûle la photo !

Érable allume le briquet et met le feu à la photographie.

Flash-back. Karl est dans sa maison, en train de prendre les quelques objets qui tiennent dans ses poches de combinaison. C'est le moment où il renonce à prendre sa photo. Mallory le presse de partir. Ses parents sont au fond de la maison. Ils disent qu'ils vont garder le trésor jusqu'à son retour. Karl promet de revenir. Mais la maison brûle, parce que ce souvenir est à l'intérieur de la photo. La maison brûle, et Karl est persuadé qu'Érable va brûler avec elle.

Retour au présent. Érable s'asperge d'essence. Elle dit : "Je sors de la maison, pour ne pas abîmer ton trésor".

Elle sort, et elle allume son briquet à nouveau.


Les personnages :

Karl
Quête : retourner à Priax retrouver la photographie de sa famille
Symboles : "médaillon", "fraternité", puis "nord"

Mallory
Quête : protéger son frère durant la traversée
Symboles : "sport", "lumière"


Commentaires :

Durée :
1h1h/2

Règles utilisées :
Inflorenza minima, avec moi en MJ, sans aucune préparation préalable, et sans aucun matériel (j'aurais pu utiliser la playlist Millevaux mais me suis abstenu pour démontrer le potentiel du jeu en brut)

Profils des joueurs :
Expérimentés. Le joueur de Karl avait déjà joué quatre fois avec moi dans l'univers de Millevaux, mais le joueur de Mallory, jamais.

Brainstorm initial :
Limité à la création des personnages.

Défis :
+ C'était une séance spéciale puisque c'était une démo en préambule d'une émission One-Shot pour le podcast de la Cellule.
+ Je voulais faire tourner le jeu en brut : zéro matériel, zéro préparation. Le plus proche du jeu brut que j'avais fait jusqu'à présent, ce fut une séance avec une préparation limitée à six mots (L'inconnu) et une autre sans préparation mais avec utilisation de la playlist Millevaux (Orchidée, CR à venir).
+ Je voulais mobiliser la majeure partie des règles : codes de sécurité, prix à payer, symboles, charger son cœur, flash-backs, flash-forwards, obole...

Debriefing :

+ Je vais éviter de m'étendre pour laisser la primeur au podcast de la Cellule.

+ De mon point de vue, les défis ont été relevés.

+ Le joueur de Mallory et moi avons rencontré une sacrée émotion de jeu.

+ Les joueurs ont été très proactifs et ont pris en main le système, réclamant notamment à charger son cœur, genre de comportement pro-actif que je vois rarement. J'ai toujours tendance à dire que le jeu fonctionne mais si seul le MJ comprend les règles, néanmoins quand les joueurs s'y mettent, ça crée encore une tension supplémentaire.

+ Le joueur de Karl a eu le sentiment que dans Inflorenza Minima, et dans plusieurs autres jeux moraux, on faisait de grands sacrifices pour atteindre au final un objectif minime. Je comprend cette impression, pour autant je vois les choses différemment. L'économie du jeu, basée sur les prix à payer, offre vraiment au personnage l'opportunité d'atteindre son objectif. Si l'objectif atteint est décevant, c'est peut-être qu'il était décevant au départ. Le personnage de Karl a manqué son objectif puisqu'il a perdu la photographie, mais il avait depuis longtemps bifurqué vers un nouvel objectif (récupérer le trésor pour financer et instruire une communauté) et surtout il a manqué la vraie opportunité que les règles lui offraient d'avoir le beurre et l'argent du beurre : il lui suffisait de décharger son cœur (chargé en acceptant rien moins que la mort de son frère) pour avoir le trésor ET la photographie. Je comprends qu'un jeu où il est obligatoire de perdre ou de gagner une chose minuscule après des immenses sacrifices peut apporter comme frustration. J'estime qu'Inflorenza minima propose une expérience différente : il est possible de gagner de grandes choses, c'est juste que c'est cher en sacrifices. Après chacun analyse comme il veut l'ironie que ça comporte. Cela comporte une certaine violence et c'est légitime de ressentir de l'inconfort et de préférer jouer à autre chose. Ces remarques que ce joueur nous a faites au sujet de son inconfort sont très utiles pour moi, pour continuer à penser le jeu de rôle moral, à évoluer.

+ L'utilisation concentrée des règles a entraîné un train de conséquences très complexes, une pelote qu'on pourrait détricoter à l'infini. Dans le podcast, le joueur de Mallory essaye de résumer une scène et cela l'oblige à expliquer toutes les autres scènes tellement elles sont imbriquées.

+ Cela, et la réaction d'inconfort du joueur de Karl me fait penser qu'avec Inflorenza minima, on atteint une expérience de jeu moral vraiment radicale, plus encore que ses modèles.

+ Je suis conscient d'être allé très loin dans le climax, que ce soit celui de Mallory ou celui de Karl (notamment avec l'immolation d'Érable, parti du fait que le joueur de Karl avait suggéré qu'Érable allait brûler avec la photo). L'inconfort du joueur de Karl s'en est trouvé renforcé. C'était un de ses inconforts où il devenait pour lui douloureux de jouer, alors que notre inconfort au joueur de Mallory et à moi était au contraire fertile en intensité de jeu. Le joueur de Karl sous-entend dans le podcast que les codes de sécurité sont inefficaces, car il n'osait pas les invoquer de peur de ruiner notre plaisir. Je crois pour ma part que les codes de sécurité ne peuvent être efficaces que si on veut bien croire en leur efficacité. Dès lors qu'on les aborde avec scepticisme et qu'on refuse de les utiliser, ils sont en effet caduques. En revanche, pour donner raison au joueur de Karl, je crois que si j'avais de temps à autres demandé aux joueurs si ça allait, ou si je leur avais demandé les pouces, il aurait pu se sentir autorisé à signaler son inconfort, et je suis certain qu'on aurait amendé le jeu pour le meilleur.
Outsider. Énergie créative. Univers artisanaux.
Ma page Tipee.
Avatar de l’utilisateur
Pikathulhu
Dieu d'après le panthéon
Messages : 3250
Inscription : dim. août 22, 2010 7:26 pm
Localisation : Morbihan
Contact :

Re: [CR] Les jeux d'Outsider

Message par Pikathulhu »

[Jeu de rôle] Lady Rossa.

Enregistrement d'une partie dédiée au jeu de Macbesse où l'on incarne des membres des Brigades Rouges italiennes !
Enjeux moraux et politiques, violence et résistance... Plongée dans la tourmente d'un monde gris.

Image
Outsider. Énergie créative. Univers artisanaux.
Ma page Tipee.
Avatar de l’utilisateur
Pikathulhu
Dieu d'après le panthéon
Messages : 3250
Inscription : dim. août 22, 2010 7:26 pm
Localisation : Morbihan
Contact :

Re: [CR] Les jeux d'Outsider

Message par Pikathulhu »

ASTRA JULITTA

Premier test de jeu de rôle en médiathèque, pour explorer notre commune comme on ne l'a jamais vue.

Jeu : Marchebranche, aventures initiatiques dans un monde de forêts en clair-obscur.

Joué le 21/11/2015 à la Médiathèque de Remungol (Morbihan)
Personnages : Brûme, Bobcasse, Edgar

Image
crédits : XIIIfromtokyo, billbarber, brother magneto, Fab5669, licence cc-by-nc-sa


L'histoire :

Trois marchebranches arrivent dans le village de Remungol : Edgar le mage, Bobcasse le saltimbanque, Brûme l'artisan.
Toutes les maisons sont en ruines et recouvertes d'une poussière blanche, sauf une seule qui reste debout, entourée d'une bannière de sécurité blanche et rouge, avec un panneau : "Attention, risque d'effondrement.". Devant cette maison, trois personnes les attendent pour leur proposer des missions en échange d'une carte du Tarot de l'oubli.
Une vieille voyante leur dit qu'il faut empêcher un vaisseau spatial de partir dans l'espace, à Saint-Nicodème.
Un gamin dit que ses parents et la plupart des habitants de Remungol sont sous l'emprise d'un mage qui vit dans la jungle d'Ewen et il veut qu'on les libère.
Un lépreux couvert de bandelettes veut qu'on le guérisse.

Les marchebranches décident de travailler pour le gamin dans un premier temps, et donc de libérer les habitants de Remungol de l'emprise du mage.
Ils mènent d'abord l'enquête dans le visage, et trouvent des habitants en train de démonter les ruines pour construire une statue à l'effigie du mage. Ils parlent à une femme qui sculpte le nez du mage dans une pierre de taille. Elle leur explique que le mage leur donne à manger des fleurs et des fruits, qu'ainsi ils n'ont plus besoin de chercher de la nourriture, et qu'ils lui rendent grâce pour ses bienfaits. Elle offre un de ces fruits à Edgar, un étrange fruit orange et boursouflé.
Les marchebranches veulent tester ce fruit sur quelqu'un, alors ils recherchent un habitant qui n'en ait jamais consommé. Le mage Edgar est capable de sentir une présence derrière les murs des ruines, et il réalise qu'il y a une petite fille dans une maison, cachée dans un chaudron. Mais il répugne à donner ce fruit maudit à manger à la petite fille, alors il passe son chemin sans la déranger.
Brûme crie à tue-tête qu'il répare les chaussures gratuitement. Un clochard en guenilles se présente à lui, ses chaussures ont la gueule ouverte comme des crocodiles, il veut bien qu'il les lui répare. Brûme lui demande alors de manger le fruit en échange, le clochard accepte. Ses yeux deviennent vitreux, et il dit qu'il doit aller voir le "Maître". Et il se dirige vers les jungles d'Ewen.
Les marchebranches le suivent à bonne distance. Le clochard arrive à l'entrée des jungles d'Ewen. Il y a une barrière, gardée par un ogre gras au visage jaune, garni de grosses dents carrées. L'ogre inspecte les yeux du clochard et le laisse passer.
Le mage Edgar jette un sort sur lui et les autres marchebranches pour qu'ils aient aussi les yeux vitreux, et ils vont voir l'ogre. L'ogre les laisse passer, mais il embarque le mage sous son bras : "Toi, je vais te mettre dans le pressoir, ça va faire du bon jus."
Il s'enfonce dans les jungles d'Ewen, où règnent lianes, cris d'animaux et arbres exotiques. Il enferme le mage Edgar dans un pressoir qu'il fait garder par le clochard. Il y a un mécanisme qui fait que le pressoir va se resserrer progressivement, jusqu'à ce que le mage soit tout écrasé. On voit des robinets en bas du pressoir, avec des gobelets remplis de jus. Le clochard s'en sert un verre.

Bobcasse convainc le clochard de retourner voir la barrière, il prend sa place à la garde du pressoir. Brûme détruit le pressoir, et ainsi libère le mage Edgar.

Ils aperçoivent une tour blanche en construction, entourée d'échafaudages, qui émerge de la canopée. Ils s'en approchent, et trouvent des habitants de Remungol tous en toge blanche. Ils en assomment trois et leurs prennent leurs toges blanches. Ils abordent d'autres habitants, qui leurs expliquent qu'ils construisent cette tour en l'honneur du Maître. Ils croisent le Maître, un petit mage à la peau jaune, qui jubile : "Quand cette tour sera achevée, j'accéderai au pouvoir suprême." Puis le Maître rentre dans la tour. Il y a de nombreux fruits magiques dans les arbres alentours, de toutes les formes. Les marchebranches en récupèrent un chacun, et essayent de s'infiltrer dans la tour. Edgar et Bobcasse veulent se faire passer pour des servants, mais ils sont refoulés. Brûme récupère une pioche et se fait passer pour un ouvrier constructeur. Il parvient à rentrer dans la tour et met un des fruits magiques dans le repas du Maître. Une fois qu'il a mangé le fruit, le Maître sort de la tour. Il a des yeux vitreux, et demande qui est son Maître, pour qu'il lui obéisse. Le mage Edgar se fait passer pour son Maître, et il le fait monter dans le pressoir pour le transformer en jus. Il vient de tuer une personne, et cela lui rapporte une noirceur. Le marteau qu'il avait récupéré sur le chantier devient maléfique, il a maintenant des pointes et a soif de violence. Edgar le cède à Brûme qui en aura peut-être plus besoin que lui. Edgar dit aux habitants de Remungol qu'il est leur nouveau maître, et il leur rend ensuite leur liberté.

Quand ils reviennent à Remungol, le gamin leur donne sa carte du Tarot de l'Oubli : une carte de l'Etoile, tirée à l'envers. Edgar la prend, il se rappelle alors un souvenir : il était à la recherche de l'Arbre-Soleil, un objet qui lui rapporterait beaucoup de pouvoir, mais qui se trouve au cœur d'une insondable forêt hantée. Il gagne en pouvoir et sait maintenant provoquer des émotions.
Un homme en costume arrive à la maison-debout en courant. Il est tout essoufflé et en sueur. Il tient une carte du Tarot toute froissée. "J'ai eu peur de vous louper !". C'est le témoin d'un mariage. Le frère du futur mari vient d'emporter la mariée, et le témoin a peur que ça cause un véritable désastre au sein de la famille du marié. Il leur demande de régler ça.
La voyante leur montre sa boule de cristal : on voit le vaisseau spatial de Saint-Nicodème, un vaisseau de pierre avec des tours et des flèches gothiques, environné de fumée blanche, et tremblant : il est sur le point de décoller, il faut intervenir maintenant ou jamais.
Le lépreux est maintenant allongé sur une civière : il sent que son souffle le quitte, il leur demande d'intervenir rapidement.

Le mage Edgar, qui se sent plus puissant qu'avant, part avec le témoin s'occuper de la famille du marié, tandis que Bobcasse et Brûme vont vers Plumeliau arrêter le vaisseau spatial.

Edgar et le témoin vont voir le mari, ils le trouvent dans la grange familiale, il aiguise sur une meule le couteau qui sert à tuer les cochons. Il est prêt à tuer son propre frère pour laver l'affront. Edgar revêt sa toge blanche et se fait passer pour "le prêtre de l'expiation". Il lui demande de se rappeler des bons souvenirs qu'il a pu avoir avec son frère ; le mari se rappelle que son frère l'a sauvé de la noyade quand ils étaient enfants. Il donne à Edgar un jour de répit pour rattraper la situation, après cela il tuera son frère.

Bobcasse et Brûme sont arrivés à Saint-Nicodème. Ils y trouvent un savant fou avec des lunettes d'aviateur et des cheveux blancs en bataille. Il joue d'un orgue pourvu de manettes, et qui a l'air de commander au vaisseau. Bobcasse veut le distraire avec son luth de saltimbanque, mais échoue, Brûme casse un réacteur avec son marteau maléfique, qui est détruit au passage, mais comme le savant fou n'a pas été distrait, il le repère et lui tire dessus avec un pistolet étrange couronné d'une bobine électrique : il lui tire dans la toge qui se met alors à muter et acquiert le pouvoir de métamorphoser son porteur. Le savant fou oblige l'artisan à reconstruire le réacteur qu'il a endommagé.
Ils entendent femme dans la plus haute tour, qui crie au secours.
Bobcasse monte dans la tour et trouve la femme. Elle est en combinaison de cosmonaute, sanglée à un poste de commande. Elle lui explique qu'elle est là contre son gré, le savant veut en faire un cobaye pour un voyage dans l'espace, mais elle ne veut pas du tout aller dans l'espace. Bobcasse la libère et redescend avec elle en rappel sur le flanc des tours du vaisseau. Brûme prend bien son temps pour réparer le réacteur et fait exprès de mal faire le travail : le vaisseau ne décollera jamais.

Ils retournent à Remungol et la voyante leur offre la carte des Amoureux, tirée à l'endroit : Bobcasse la prend, il se rappelle alors que sa famille s'est coupée en deux suite à une querelle, et maintenant il sait comprendre la langue des horlas, ces monstres qui hantent la contrée. Il devient un voyageur et développe ses qualités de cœur.

Edgar les retrouve à la maison-debout et ensemble, ils vont rechercher le frère et la mariée.
Ils les trouvent à commune de Locminé, plus au sud. De Locminé, il ne reste que l'église centrale, avec sa façade ancienne et son corps moderne, et la cabine téléphonique rouge sur la place. L'église et la cabine sont au bord de l'océan, il y a une plage de sable, des mouettes, des vagues. Le frère et la mariée, encore en robe, montent à bord d'une barque et se préparent à prendre le large. Bobcasse aperçoit des sirènes, qui se baignent non loin de là. Comme il sait maintenant parler la langue des horlas, il hésite à appeler ces monstres pour les faire croquer la mariée, mais renonce à une si cruelle idée.
Au lieu de ça, il raconte au frère et à la mariée sa propre histoire, sa famille déchirée à jamais à cause d'un drame équivalent. Brûme utilise sa toge changeforme pour prendre un temps l'apparence du mari et parler au frère, avant que la toge ne soit consumée par son pouvoir. Le frère se repend alors. Il aime la mariée, mais ne veut pas être la cause de la discorde au sein de sa famille. Alors la mariée part seule dans la barque, car elle ne veut pas retourner auprès du mari.
Les marchebranches ramènent le frère auprès du mari, ils se réconcilient, mais c'est crispé.
Ils les accompagnent pour aller retrouver leur famille, réunie autour de la table prévue pour le banquet du mariage. Ils veulent convaincre la famille de se réconcilier. La mère du frère et du mari veut qu'on aille récupérer la mariée de force, un convive s'empare du couteau du gâteau, un autre se sert de sa cravate pour étrangler : toute la famille semble prête à s’entre-tuer, et à s'en prendre aux marchebranches au passage.
Plus tôt dans l'aventure, la pioche de Brûme avait été touchée par une noirceur, elle avait acquis le pouvoir de moisir ce qu'elle touchait. Brûme utilise sa pioche moisissante pour pourrir la table du banquet, et tout ce qui pourrait servir d'arme dessus. Edgar le mage, drapé dans sa toge blanche, refait son numéro de prêtre de l'expiation, il essaye aussi de provoquer l'émotion de la tristesse sur la famille, et défend ses camarades contre d'éventuelles attaques. Finalement, c'est Bobcasse, en utilisant son coeur et son histoire, qui arrive à réconcilier la famille.

Le témoin donne sa carte du Tarot à Brûme, c'est une carte de l'Ermite piochée à l'endroit. Brûme gagne en expérience, maintenant il ignore la peur, le frère devient son compagnon de route, et se rappelle qu'il a connu la personne qui a créé les horlas, ces monstres qui hantent la contrée.


Image
crédits : Fabien Bouguennec, par courtoisie


Feuilles de personnages à la fin du jeu :

(les trois personnages étaient à expérience zéro en début de jeu) :

Brûme, artisan
Expérience 1
Atouts : Force
Spécialités : ignorer la peur
Equipements : x Pioche (Noirceur : moisissante)
Souvenirs : connaissance de la personne qui a créé les monstres

Bobcasse, ancien saltimbanque, aujourd'hui voyageur
Expérience 1
Atouts : Coeur
Spécialité : comprendre la langue des horlas
Equipements :
x Toge blanche
Marteau
Luth
Souvenirs :
Ma famille est déchirée par une guerre intestine à cause d'une histoire de vengeance

Edgar, mage
Expérience 1
Atout : pouvoir
Spécialité : provoquer une émotion
Equipements :
x toge blanche
fruit magique
Souvenirs :
x Quête de l'arbre soleil, source pouvoir, au fond de la forêt.


Du jeu de rôle en médiathèque :

Cette session est ma première (et visiblement, pas la dernière) tentative de faire du jeu de rôle en médiathèque. Je pense que cette activité a tout à fait sa place dans ses lieux, au carrefour du jeu, de l'imaginaire, de la littérature et de la rencontre sociale, des valeurs qui me semblent être celles des médiathèques contemporaines. Deuxio, c'est une expérience de jeu de rôle en milieu rural, puisque la commune ne comporte "que" 900 habitants, donc c'était un défi dans le défi.

J'étais parti sur une proposition de jeu en table ouverte, mais au final, mes trois joueurs sont restés à la table tout le temps, avec juste quelques interruptions pour l'un d'entre eux. A la fin de la session, je conserve les fiches de personnages des joueurs, pour les remettre à leur disposition s'ils reviennent la prochaine fois.

On part sur le samedi matin 10h-12h, à voir dans le temps si c'est le créneau le plus approprié. A voir aussi si on transformera l'essai avec une acquisition de livres de jeux de rôles par la médiathèque.

J'ai trouvé intéressant de situer les aventures sur la commune de la Médiathèque et ses environs, mais dans le futur forestier de Millevaux. Je me suis permis quelques clins d’œils que mes joueurs pourraient comprendre, ainsi la dernière maison debout, c'est une maison qui de nos jours menace de s'effondrer et est entourée par une bannière de sécurité, la jungle d'Ewen est un clin d’œil à une exploitation horticole du secteur qui s'appelle les Jardins d'Ewen, le vaisseau spatial, c'est la Chapelle Saint-Nicodème, sur la commune voisine de Plumeliau, qui est dotée d'une architecture gothique vraiment étrange, et quand je dis qu'à Locminé il y a la mer, c'est pour prendre en compte la montée des eaux, car aujourd'hui Locminé est à trois quart d'heures de voiture de la mer...

Je voulais aussi m'aider d'un livre sur l'histoire de la commune, mais il était emprunté, et j'avais une revue sur les contes et légendes de Bretagne, mais j'ai oublié de la prendre. Ceci dit, j'avais suffisamment de matériel et je n'ai pas été dépassé pour cette fois.


Commentaires sur le jeu :

Déjà, très satisfait du rythme. On a joué moins de deux heures, on a déroulé trois aventures, ce qui a permis à tout le groupe de passer d'expérience 0 à expérience 1. Cela correspondait à ce que je recherchais. J'imagine que le rythme ralentira une fois que les personnages auront un peu plus d'expérience et que le monde autour d'eux se sera étoffé, mais du coup aller aussi vite au début, ça me convient. Les joueurs ont pu visiter une demi-douzaine de lieux, et tenter une belle variété d'actions.

Les joueurs avaient l'air bien immergés et contents de leur expériences, ça c'est le principal. Certains avaient peut-être le projet de refaire du jeu de rôle de leur côté, ça c'est la cerise sur le gâteau.

Avoir joué à trois m'a permis de voir que le principe d'entraide fonctionne bien. A un moment, le mage Edgar a tenté l'expérience en solo, mais ça a été un peu technique pour lui comme pour Bobcasse et Brûme partis de leur côté. C'est ce que je voulais : un jeu où les personnages doivent s'entraider.

Lors du dernier conflit (réconcilier la famille autour de la table de banquet), j'annonce que les personnages risquent deux noirceurs. Bobcasse et le mage Edgar jouent des actions pour apaiser les familles, et Brûme utilise sa pioche pour faire moisir la table de banquet et tout ce qui pourrait servir d'arme dessus. Le joueur du mage obtient un 6 et le joueur de Brûme réussit son action de faire moisir la table de banquet.
Si j'avais joué d'après mes règles initiales, j'infligeais bien mes deux noirceurs : le mage est immunisé grâce à son 6, et donc j'en inflige une à Bobcasse et une à Brûme. Mais ce qui m'a paru plus logique au moment de résoudre, c'est que le 6 de Bobcasse serve à annuler une noirceur, et que l'action réussie de Brûme serve à annuler la deuxième noirceur, donc les personnages s'en sont sortis indemnes. Il me reste à savoir si ça ne rend pas les choses trop faciles. D'un côté, ça me permettra de monter l'adversité plus facilement avec la prise d'expérience (une adversité peut causer jusqu'à 7 noirceurs à expérience 6), de l'autre ça rend les choses plus fluides et permet une variétés d'actions ; certaines pour atteindre un objectif, d'autres pour contrer des noirceurs ; et le fait qu'on agisse pour défendre les autres augmente le côté coopératif du jeu.

J'ai un autre souci avec les noirceurs. Dans ma règle initiale, un personnage peut récupérer jusqu'à six équipement, même quand il est à expérience zéro. Quand il reçoit une noirceur, il peut la dévier sur un de ses équipements. Plus tard, il peut utiliser la noirceur de son équipement pour obtenir un d4 (qu'il ne lance pas, il chosit le résultat), alors même que l'équipement ne lui accorde pas de d6 (aucun équipement n'accorde de d6 à expérience zéro, et il faut atteindre l'expérience 6 pour que les six équipements accordent un d6). La contrepartie, c'est d'encaisser une noirceur supplémentaire, mais celle-ci peut aussi être déviée sur un équipement. Si un équipement reçoit deux noirceurs, il est détruit.

Dans cette partie, Brûme, qui est resté à expérience zéro tout le long du jeu, a bigrement optimisé sur cette règle. Elle a récupéré trois équipements, tous ont pris des noirceurs, deux d'entre eux ont même été détruits par une deuxième noirceur. D'une ces équipements ont fait sacrément bouclier (si l'on compte que l'un des équipements a été récupéré avec déjà une noirceur, c'est quand même 4 noirceurs que les équipements ont absorbés et que Brûme aurait encaissées sinon), de deux ça lui accordé 3 fois 1d4, ce qui a bien sauvé la mise au groupe. J'en viens à la conclusion que pour le joueur, la noirceur c'était plutôt sympa, et si on y réfléchit un peu, on peut exploiter la règle en ramassant un maximum d'équipements sur la route, même des cailloux ou des champignons si l'on veut, et s'en servir pour dévier les noirceurs à l'infini et fournir du d4 à l'infini. A terme, le personnage n'encaisse jamais de noirceur, et on ne peut plus avoir de scène de sauvetage, comme quand il fallu sortir le mage du pressoir. Et du coup, dans la tête des joueurs, la noirceur ce n'est plus le truc qu'il faut éviter, mais plutôt le truc qui les rend immortels et surpuissants. Il faut que je cogite pour dégonfler un peu tout ça, et refaire de la noirceur un truc séduisant, mais dangereux. Par exemple, en pensant systématiquement à mettre des bâtons dans les roues aux joueurs à cause de leurs noirceurs, sans leur accorder de bonus en échange, au moins une fois par aventure.
Outsider. Énergie créative. Univers artisanaux.
Ma page Tipee.
Avatar de l’utilisateur
Pikathulhu
Dieu d'après le panthéon
Messages : 3250
Inscription : dim. août 22, 2010 7:26 pm
Localisation : Morbihan
Contact :

Re: [CR] Les jeux d'Outsider

Message par Pikathulhu »

AUX GRANDS MAUX LES GRANDS REMÈDES

Émotion au rendez-vous pour ce nouveau tutoriel d'Inflorenza minima, cette fois-ci enregistré, avec Valentin en meneur !

Jeu : Inflorenza minima, le jeu de rôle des contes cruels dans les forêts de Millevaux

Partie enregistrée sur ma chaîne Youtube

Joué le 20/04/2016 sur google hangout
Personnages : Brute, Darren

Image
Crédits : devastar, fouquier, georgie sharp, Shawn Clawson, licence cc-by-nc, galerie sur flickr.com


Théâtre :

Aucune préparation préalable, tout est parti de la création de personnage et de leurs objectifs.


Feuilles de personnages :

Darren
Objectif : guérir de sa maladie de fourrure et d'écailles
Symboles : Volonté, Science

Brute
Objectif : amener Darren à accepter son nouvel état
Symboles : Acceptation, Animaux


L'histoire :

Darren a contracté une maladie en s'aventurant dans la forêt. Sa jambe a commencé à se couvrir de fourrures et d'écailles. Darren est un homme de science, il refuse de devenir un monstre et d'être rejeté. Il veut trouver un remède avant que la maladie ne couvre tout son corps.

Il s'en est ouvert à Brute. Brute est un homme massif, une barbe noire, des sourcils noirs, des mains énormes, d'où son nom. Mais en réalité, il est tout en douceur. Il passe son temps à ramasser les animaux éclopés et à les soigner de son mieux. Brute s'en est rapproché pour apprendre l'anatomie et comprendre son mal. Il a fini par s'ouvrir à lui de sa maladie.

Brute lui propose qu'ils refassent ensemble le chemin qu'il avait pris, pour comprendre ce qui a pu le mordre ou le piquer au passage. Connaissant l'origine de la maladie, ils devraient comprendre comment la soigner. Mais Darren a peur de retourner en forêt, il préfère rester en sécurité au village.

Brute est loin de désirer la guérison de Darren, au contraire il voudrait qu'il accepte sa nouvelle nature, car Brute voit les hommes, les bêtes et les monstres comme des personnes qu'il faut aimer de la même façon. En fait, il a le projet de perdre Brute en forêt pour qu'il ne retrouve pas l'origine de son mal et abandonne l'idée de chercher un remède.

Il insiste encore et Darren se laisse convaincre de refaire le chemin. Il faut partir de suite car dans un jour ou deux de violentes tempêtes vont éclater, avec leur lot d'inondations et de boues qui rendront la forêt dangereuse et effaceront le chemin. Mais Brute a deux animaux en convalescence qui nécessitent des soins constants : une renarde et un chat sauvage qui tous deux se sont pris une patte dans un piège de chasseur. La renarde est intransportable. Sans ses soins, elle ne passera pas la nuit. La mort dans l'âme, Brute la fixe dans ses grands yeux et lui fait ses adieux. Il charge le chat sauvage dans un panier qu'il fixe sur le dos de Darren ; Darren s'est engagé à le soigner en échange de l'aide de Brute.

Brute entraîne Darren au hasard dans la forêt. Darren commence à se douter de quelque chose. Brute propose qu'on bivouaque le temps de reprendre ses esprits. Il s'entête à le perdre, et Darren s'entête à retrouver le vrai chemin. Ils finissent par le retrouver mais cela prend du temps. Le ciel se couvre de nuages noirs, le retour au village ne se fera pas sans encombre.

Darren reconnaît enfin le chemin où il s'est promené le jour avant de se découvrir la maladie. Ils rencontrent un enfant qui a la même maladie, mais à un stade beaucoup plus avancé. Tout son corps est couvert de fourrures et d'écailles, et il a une tête de chien ! Darren est révulsé. Il est plus que jamais déterminé à s'éviter un tel sort. L'enfant et Brute lui demandent pourquoi il a si peur de devenir un homme-bête. Darren dit que sa femme l'a rejeté quand elle a découvert sa maladie. Il craint aussi le rejet du reste de la société.

L'enfant est capable de leur parler, il est disposé à leur donner des indices. Il les conduit dans une grotte où vit un vieillard qui a le même aspect bestial. Il vit entouré de livres. Il explique à Darren que c'est la connaissance qui a fait de lui ce qu'il est.

Darren se rappelle ce fameux jour où il se promenait dans la forêt. Il étudiait un livre, comme il faisait tous les jours. C'était un livre spécial, un livre sur la pharmacopée qui expliquait comment guérir les animaux de tous les maux. Brute l'accompagnait et il a insisté pour qu'il lise le livre, même si le livre risquait de le corrompre. Ensuite, pour tester l'efficacité de ses nouvelles connaissances, il lui a apporté un petit chaton sauvage qui ne se remettait pas d'une grippe, qui perdait ses poils. Darren a échoué à le guérir cette fois-là, le chat est resté malade. C'est le chat sauvage qui est dans le panier sur son dos aujourd'hui.

Le vieillard fabrique une décoction. Il dit que c'est le remède contre la maladie. Mais si Darren en boit, il perdra tous ses souvenirs, le souvenir de sa femme, tous ses savoirs. Il a jusqu'à demain matin pour se décider. Après, la maladie aura trop progressé, la potion pourra toujours le faire redevenir humain mais sera toxique pour lui, il lui restera moins d'un an à vivre.

Arrivent dans la caverne une femme, un enfant et une vieillarde. Ils ont l'air insouciants et heureux. Ils racontent les petits détails de leur journée, la vieillarde dit comment elle a ramassé telle baie. Mais ils n'ont aucun autre souvenir. Ils ont bu la potion pour redevenir humains et dès lors, ils ne se rappellent que de leurs dernières heures. Le vieillard et l'enfant-bête ont l'air maussades : impossibles d'avoir une vraie conversation avec ces miraculés incapables de se projeter dans le passé comme dans le futur.

Brute sait que le temps est compté. Il demande à Darren de soigner le chat sauvage tant qu'il en est encore capable. Darren lui avoue alors pourquoi il a échoué de le guérir la première fois. Il a simplement refusé d'en payer le prix. Ce chat a la maladie des os de verre, et la seule façon de l'en guérir, c'est de transférer à la maladie a un autre. Brute dit alors que le chat a trop souffert. Il demande à Darren de lui transférer la maladie. Darren essaye de le convaincre : il sera très difficile à Brute de continuer à soigner d'autres animaux s'il est cloué au même endroit, incapable de se déplacer ! Brute que le sacrifice d'une personne lui coûte encore plus que le sacrifice d'un ensemble. Alors Darren fabrique de quoi faire un échange sanguin avec les matériaux de fortune trouvés chez le vieillard, et il transfuse à Brute la maladie du chat. Brute sombre dans l'inconscience. Darren passe la nuit dans les cauchemars et la sueur.

Il se rappelle le soir où sa femme a découvert sa maladie. Il avait fait ce qu'il avait pu pour la cacher, il bandait sa jambe. Il trouvait sa femme si belle, il avait consacré tant d'efforts, de temps et de cadeau à la séduire, lui qui se trouvait laid. Et quand il lui a enfin montré sa jambe, à sa femme enceinte de lui, elle lui a dit de quitter leur foyer ! Elle ressentait peur et dégoût.

Il se rappelle le jour où il a confié le secret de sa maladie à Brute. Brute lui a demandé si l'enfant avait été conçu avant ou après cette promenade en forêt. C'était après. Mais heureusement, l'enfant est sauf. Avant de quitter sa maison, Darren a demandé aux meilleurs médecins de la communauté de prendre soin de sa femme et de l'enfant à naître, car lui n'aurait plus le droit de les approcher.

Au petit matin, Darren est à l'entrée de la caverne, le bol de potion entre ses doigts. La fourrure et les écailles couvrent déjà tout son buste. Brute est allongé à côté de lui, il a mal partout, il regrette un instant son geste. Il veut rendre sa liberté au chat sauvage qui se porte maintenant comme un charme, mais le chat insiste pour rester à leurs côtés. Brute essaye un temps de convaincre Darren de boire la potion : il deviendrait insouciant, mais il pourrait lui apporter des animaux malades chaque jour. Puis il se rétracte. Il avoue à Darren les motivations qui l'ont poussé et lui dit de suivre son cœur.

Darren met le contenu du bol dans une gourde. Il ne boira pas cette fois. Peut-être un autre jour, mais alors la potion lui rendra son apparence humaine mais tuera sa mémoire et le tuera ensuite à petit feu. En attendant, Darren veut vivre son humanité, quelle que soit son apparence.

Brute lui demande s'il veut revoir son enfant une dernière fois avant de se cacher définitivement dans la forêt. Darren le veut. Alors Brute empoigne des béquilles. Ils vont retourner ensemble vers le village, mais Darren restera caché à l'orée de la forêt. Brute fera venir la femme et l'enfant de Darren au bord de l'orée pour leur raconter l'histoire de Darren, et ainsi Darren pourra les voir en cachette.

Il y a un risque qu'alors sa femme le repère quand même et qu'elle ait une mauvaise réaction. Brute refuse que Darren connaisse encore une infortune supplémentaire. Il décide de prendre l'infortune sur lui. Sur le chemin du retour, à cause des torrents et de la boue, Brute se casse une jambe. Quand il arrive au village, on le soigne et on lui confie un fauteuil roulant, mais Brute sait bien qu'il ne remarchera pas. Il fait venir la femme et l'enfant de Darren à l'orée du bois. Mais un homme les accompagne. La femme dit qu'il s'agit du père de l'enfant. Brute dit : "Je suis sans haine pour vous, monsieur, mais je sais que Darren est le vrai père. Je comprends les raisons qui vous poussent à dire que vous êtes le père, et je ne ferai rien pour détromper les gens. Mais vous devez tous savoir qui était Darren en vérité.". Et il raconte toute l'histoire, il ment juste en disant que Darren s'est enfui dans la forêt et qu'il est impossible de le retrouver.

Brute jette un minuscule coup d'oeil vers Darren caché dans les fourrés. Il lui promet en silence de parler souvent à cet enfant de son vrai père.

Et Darren part sans se retourner.


Commentaires :

Durée :
1h3/4

Règles utilisées :
Image

Profils des joueurs :
Valentin et le joueur de Darren avaient tous les deux lu les règles et tenté de mener Inflorenza Minima, sans être complètement satisfaits.

Brainstorm initial :
J'ai demandé s'ils avaient des priorités de test. Ils étaient plutôt curieux de découvrir mon tutoriel, mais Valentin a insisté sur le fait que dans ses tests, il lui était plus facile de gérer des personnages en opposition que des personnages en collaboration. Donc avec le joueur de Darren on est parti sur une équipe collaborative, pour tester "en conditions de stress".

Défis :
+ Accompagner Valentin dans la gestion d'une équipe de personnages en collaboration
+ Dérouler les étapes de mon tutoriel pour produire une partie enregistrée qui puisse être utile à d'autres (et pourquoi pas, il est permis de rêver, fournir un outil audio qui se substitue au livre de base).

Mise en jeu :
Comme pour Lourdes, j'ai plusieurs fois demandé à Valentin d'appliquer certains conseils de maîtrises d'Inflorenza minima comme des contraintes, des étapes à franchir : prix à payer, charger son coeur, connaître pour faire mal, donner pour reprendre, D.E.U.S. Ex. Machina. Dans une partie normale, on applique ces conseils au feeling, dans le désordre. Les appliquer dans un ordre précis relevait de la démarche de tutoriel, du conseil le plus important au conseil le plus superflu. En cours de jeu, j'ai réalisé que j'avais omis de mentionner les codes de sécurité, alors pour les tester, quand Darren a déclaré qu'il avait conçu l'enfant après avoir contracté la maladie, on a simulé un bras en croix, qui sert à signaler un malaise à désamorcer. Valentin a pris la balle au bond en disant que l'enfant était tout à fait humain malgré tout.

Debriefing :

Joueur de Darren :

+ Sur le didactique, c'est super intéressant.

+ Quand Valentin a mentionné le fait que la femme de Darren avait refait sa vie, j'ai découvert que la cruauté dépassait largement le cadre des prix à payer. [réponse de Thomas : oui, les prix à payer sont le squelette du jeu, la cruauté c'est le gras, c'est bien que le Confident souligne que l'univers est injuste, tant qu'il reste des choses auxquelles s'accrocher par ailleurs.]

Valentin, le Confident :

+ Il y avait un méta-prix à payer sur toute l'aventure, qui était de savoir si Darren prendrait le remède ou non.

+ Cela m'était difficile de me positionner, j'ignorais quel contrôle je pouvais prendre ou pas. [Réponse de Thomas : tu as le dernier mot sur les décors et les figurants, mais tu les manipules au service du destin des personnages, c'est vraiment l'objectif des personnages qui conduit l'aventure. Tu peux dire des choses au sujet des personnages, mais les joueurs ont le dernier mot, et je te conseille d'éviter de prendre trop souvent le contrôle de leurs personnages ou des émotions de leurs personnages, notamment dans les moments d'introspection, parce que tu prives les joueurs d'incarner pendant ces scènes d'introspection, alors que c'est une clé pour s'impliquer. Quand tu as dit que Brute tombait inconscient ou que Darren adorait sa femme, c'eut été mieux de laisser les manettes aux joueurs, quitte à aller là où tu veux en posant des questions : "Brute, après une telle opération, est-ce que tu tiens le choc ?" ou en évoquant pour laisser le joueur se créer et vivre sa propre émotion : "Darren, ton épouse, c'est la plus belle femme que tu aies jamais connue. Et la plus intelligente aussi."
Pour aller plus loin : Combativité et absorption, par Frédéric Sintes

+ C'était agréable d'avoir des conseils.

+ Dans le manuel, au conseil "Destin", je lisais qu'il fallait relier les figurants existants aux personnages, mais en jeu quand tu m'as expliqué le conseil, j'ai compris qu'il fallait créer de nouveaux figurants, c'est ainsi que j'ai créé les insouciants. [réponse de Thomas : en fait les deux sont bien. C'est juste que le texte de règle est laconique : "Relier décors, figurants, intrigue à leurs quêtes par coïncidences et correspondances. Donner une quête à chaque figurant.". Un texte de règle est comme un bourgeon. Il contient la fleur en lui, mais il faut que le lecteur sache la faire éclore.

+ C'est un jeu difficile à mener. Il faut prévenir les joueurs de la règle du prix à payer, sinon ils partent en système zéro, ils jouent tactique, essayent d'éviter les prix à payer. [Réponse de Thomas : c'est vrai que je joue souvent sans prévenir, et je gère le jeu tactique en le retournant contre le joueur, mais c'est tout à fait valable de prévenir à l'avance, c'est une excellente chose que peut faire un Confident débutant pour se faciliter la vie, et c'est vrai que le jeu prend beaucoup de saveur avec des joueurs qui acceptent la proposition et même l'accompagnent, comme ici le joueur de Darren et moi l'avons fait.]

+ La cruauté, c'est le conseil le plus important du jeu. Mais Connaître pour faire mal et Donner pour reprendre viennent juste derrière : ils construisent le jeu.

+ La promesse de jouer sans matériel et sans préparation est vraiment tenue. Je peux joueur dans le train, au débotté, par exemple.

+ J'ignore encore quel est le potentiel de ce jeu, sa durée de vie.


Mon retour personnel :

+ Lors de notre échange, il est apparu que le jeu est si riche que vingt pages de livre de base sont insuffisantes à en faire comprendre chaque nuance. Inflorenza minima, c'est ma théorisation du jeu moral, et chaque ligne de texte pourrait donner lieu à une discussion. A l'heure actuelle, je conçois qu'il soit difficile de mener avec le seul livre de base, malgré les exemples. La lecture des comptes-rendus de partie et l'écoute de ce tutoriel (le fichier audio est bien plus instructif que ce compte-rendu de partie) me semblent une excellente façon d'approfondir.


Retour de Valentin, à froid :

+ C'était une expérience assez déstabilisante d'avoir le rôle de meneur sans avoir le rôle d'animateur ni le rôle de garant des règles. Parfois, je ne savais pas très bien quand intervenir par rapport à Thomas.

+ J'avais du mal à savoir comment réguler mes interventions et quelle autorité sur les décors et les personnages je devais adopter par rapport aux autres joueurs. J'ai décidé pour cette partie de me placer dans une structure de jeu de rôle classique par défaut, pour avoir une référence et me faire recadrer par Thomas si besoin (ce qui a été le cas, ce qui est bien).

+ Le fait de devoir appliquer les conseils dans l'ordre était difficile, puisque les éléments du système étaient utilisés sans attendre le moment propice.

+ Inflorenza Minima me semble très efficace comme jeu en ligne (pas de matériel).

+ J'ai beaucoup d'autres retours sur Inflorenza Minima en général par rapport à cette partie en particulier. J'ai beaucoup été confident depuis, j'ai été joueur, j'ai enseigné le jeu plusieurs fois à la façon de cette partie, j'ai eu pas mal de retours de joueurs ayant testé de leur côté, j'ai joué dans un théâtre Warhammer 40.000, un théâtre Lycéennes Japonaises, j'ai produit une grosse variante, j'ai joué dans des situations insolites (train, plusieurs fois au cours d'un discussion, à l’insu même du joueur, etc...)
Mais pour le coup ça va attendre, car ça va me prendre vraiment beaucoup de temps.
Outsider. Énergie créative. Univers artisanaux.
Ma page Tipee.
Avatar de l’utilisateur
Pikathulhu
Dieu d'après le panthéon
Messages : 3250
Inscription : dim. août 22, 2010 7:26 pm
Localisation : Morbihan
Contact :

Re: [CR] Les jeux d'Outsider

Message par Pikathulhu »

LE DERNIER GROUPE DE ROCK DU MONDE

Millevaux, égrégore, horlas, sexe, drogues et rock'n'roll !

Jeu : Apocalypse World de Vincent & Meguey Baker, post-apocalyptique avec du cuir, de l'essence et des flingues, ici joué dans l'univers forestier de Millevaux

Joué le 27/11/2015 chez l'habitant lors de la tournée Paris est Millevaux 2

Personnages : Dany Blue aux platines, Justin au chant et à la guitare, Cybel à la danse, Alouette au chant et à la harpe, Orchidée à la basse et Cobra à la batterie


Image
crédits : Flickred !, sy parrish, licence cc-by-nc, galeries sur flickr.com


L'histoire :

Berlin !

La ville n'est que ruines, briques et forêts. C'est la guerre civile, les différents partis érigent des murs entre chaque zone, qui se couvrent aussitôt de tags et d'arbres.

JACCOB, le dernier groupe de rock du monde, fait tournée dans la ville. Ce soir, c'est leur grand concert, dans une usine désaffectée. Le toit éventré laisse passer les arbres. Des gens de tous les partis se sont réunis pour assister à la légende vivante de la musique en action, des punks, des goths, des bikers, des hippies drapés dans des bâches. Cela sent la sueur, la fumée et la beu. L'odeur des grands jours.

Projecteurs sur Alouette, la chanteuse. Son visage, l'innocence incarnée. Son regard, le centre de gravité du monde. Ses cheveux, une cascade de tresses blondes. Immaculée dans sa longue robe blanche, elle s'agrippe à son micro comme au dernier espoir du monde, elle appelle à la paix. À ses pieds, dans la fosse, ses fans qui la suivent sur toute la tournée, au milieu d'eux, Vérité, des étoiles dans les yeux.

Puis Alouette se rapproche de sa harpe et entame un chant médiéval qui subjugue les foules.

Un des fans traverse la foule jusqu'à la fosse, un punk torse nu, blouson de cuir, cheveux rouges en piques tenues par de la graisse de bœuf.

Derrière la console, y'a Dany Blue qui veille au grain. Ce type avec son vieille combi couverte de prises jack et son casque de moto doré qui cache sa tête barbu mignon, il a l'air de rien, il fait le timide, on le voit à peine dans le fond de la scène, mais c'est lui qui tient tout le groupe ensemble. C'est lui qui gère toute la logistique, qui répare tout ce qui doit irrémédiablement tomber en panne, qui fait les balances, l'ingé son, qui tient toute la sono du groupe dans sa main. Il voit ce punk enragé qui veut monter sur scène, et il monte le courant dans la barrière électrifiée. Mais il doit y avoir un câble de fondu quelque part, la barrière répond pas, et le punk passe comme un cœur.

Il saute sur la scène, devant Alouette. Sur son torse nu, on lit les lettres de son nom : TRONC. Il a les yeux fardés, hallucinés. Il sort un couteau, il veut sacrifier Alouette pour que son œuvre de paix s'accomplisse.

Sur la scène, il y a aussi Cybel. Ni sa basse ni son micro ne sont branchés, ça Dany Blue s'en est bien assuré. Cybel, c'est pas vraiment un musicien, c'est la mascotte du groupe, c'est sa caution punk. Il danse, il se trémousse, il injurie. Drôle de marionnette tordue, torse nu, avec son gant blanc couvert de strass et la bouche horla qui lui bée à la place du téton, à qui il donne le micro pour faire du human beat box. Cybel, c'est aussi un des fans d'Alouette, alors il emporte Tronc dans sa danse et essaye de le manipuler avec son gant de violation, mais Tronc est trop balaise pour ça.

Agrippé à sa basse comme à la dernière chose concrète du monde, il y a Orchidée. Une fleur gothique dont personne ne sait le genre ou le sexe, un ange fatal en rouge et noir, drapé dans son manteau de cuir fumé, jeune comme la mort. Tout le monde dit que le bassiste ne sert à rien, mais Orchidée sait qu'il est l'assise musicale du groupe. C'est lui qui part dans les architectures les plus perchées, les plus trans-tout ce que tu veux. C'est lui qui flotte au-dessus des autres.

Orchidée se colle avec sa basse contre Tronc et le plante d'un coup de surin. Tronc le fixe, interloqué, et avant d'entrer complètement en état de choc, il plante Orchidée à son tour et lui murmure un truc sur les horlas, mais il y a trop de bruit, trop de son, trop de sang, pour qu'Orchidée arrive à entendre.

Cela lui rappelle l'autre fois avec le camion. C'est toujours Cobra qui conduit le camion, une sacrée nana, dans sa salopette et son débardeur graisseuse, avec son bras mécanique, moitié femme moitié machine, sévère, dure, toujours calme même dans les pires moments de violence, même en plein speed. Cette fois-là quand même, Cobra était en difficulté, elle allait tomber aux mains des horlas, et c'est Orchidée qui a fait diversion pour qu'elle se carapate. Les horlas. Putain, ce souvenir hante Orchidée. Et là, Tronc allait lui dire un truc crucial sur eux, et il a juste - pas entendu !

Tronc est en état de choc, à genoux, sanglant aux pieds d'Alouette et de sa harpe. Alouette lui murmure à l'oreille, elle lui dit de se suicider, de se sacrifier à sa place. Tronc lui demande de promettre de l'enterrer sous l'arbre païen sacré de Trollesund, et d'y jouer un concert, et Alouette promet. Alors à l'apex du chant d'Alouette, Tronc se crève le nombril à ses pieds.

Alouette perd son assurance, ça commence à faire trop, elle s'éloigne vers le fond de la scène. Dany Blue passe sa voix en playback, il s'agit pas de couper le public en pleine montée de chaleur. Orchidée danse avec le cadavre de tronc. Ils sont tous en train de déjanter, Dany sample la basse d'Orchidée à mort et monte des architectures à sa place.

Justin monte juste sur le devant de la scène, Dany Blue braque tous les projos sur lui. C'est le moment de montrer qui est le vrai lead du groupe. Justin le beau gosse, Justin toujours jeune et pur, avec sa belle gueule d'ange pubère, jeans déchiré et chemise à carreaux dans un look grunge ultra calculé, Justin chante et fait miauler une guitare comme personne, il chante des choses d'une mièvrerie confondante, ça met le monde à ses pieds et c'est pour ça qu'il est né.

Les fans de Justin fendent la foule pour monter sur scène, ils écrasent les fans d'Alouette agglutinés dans la fosse. Alouette voit sa favorite, Vérité, bousculée, elle tombe à terre, elle ne la voit plus, Alouette sent qu'on la piétine, elle est trop sous le choc pour rien faire.

Justin appelle à la paix, il chante comme un fou au milieu des fans des deux camps qui envahissent la scène, mais au lieu de les réconcilier, il se les met à dos, il attire l'attention comme un soleil de minuit. Les fans d'Alouette le jettent à terre, il sent des godasses lui écraser le visage, et puis ils le soulèvent et le jettent dans la foule, des mains s'agrippent à lui, avides, folles, elles l'entraînent tout le long de la marée humaine. Dany Blue passe des playbacks de Justin, le groupe doit continuer, même en pilote automatique, il faut pas que la transe lâche, sinon tout va péter.

Il y a quelqu'un qui tire le bras de Justin et le retourne visage face au sol. Cette personne, c'est Jared, un des horlas qui avait chopé Cobra et Orchidée l'autre jour. Il est en robe blanche, barbu, cheveux longs d'une douceur de ouf, son visage c'est une pure synthèse de la beauté, ses yeux sont profonds et transparents, c'est Jésus métamorphosé en sex symbol. Jared le cloue du regard et il lui dit : "Suis-moi."

Peut-être que Jared aurait eut autre forme si Justin avait pas préféré les garçons (une info qui tuerait de désespoir toutes les femmes qui l'idolâtrent), Jared a la forme qu'on désire le plus, alors Justin ne peut pas résister, il laisse Jared le descendre à terre, et ensemble ils tracent dans la foule et se barrent de l'usine.

Jared l'emmène dans le cœur noir de la forêt, ils s'embrassent comme au premier jour du monde, et puis ils baisent comme au premier jour du monde, et après ça, Jared remet sa toge de dieu vivant, et il demande à Justin s'il veut pouvoir chanter comme un dieu, littéralement. Avoir le monde à ses pieds. Bien sûr, Justin est d'accord. Alors Jared sort un petit poste à tatouage relié à un arbre qui doit lui fournir l'électricité par sa sève, et il tatoue les bras de Justin, il enfonce l'aiguille au plus profond dans la chair, pour dessiner en relief, et au final les bras de Justin sont noirs d'un langage hideux que seul Jared et lui peuvent déchiffrer, parce que c'est dans la langue putride, la langue des horlas. Ce sont les paroles des chansons que Justin pourra chanter pour mettre le monde à ses pieds.

Le reste du groupe est bien trop occupé à gérer le bordel ambiant pour être parti aux trousses de Justin.
Dany a plaqué les projos sur Cobra, à la batterie, elle a martelé les futs et crevé le mur du son sans lâcher une goutte de sueur, une performance d'enfer, qui a plaqué les gens au sol et mis tout le monde d'accord.

Cette enfoiré de Cybel a capté que son micro n'est pas branché. Dany a beau éteindre tous les micros les uns après les autres, il en chope un qu'il n'arrive pas à déco, et se met à brailler à pleins poumons, n'importe quoi, de ses deux bouches.

Le son monte, c'est plus qu'un magma dont tout le monde est imprégné. Un magma d'égrégore. Y'a cette fille qui est montée sur scène. Un ange froid en combi de cuir noir et luisant, les cheveux noirs, un corbeau insensible et sexy comme une lame. C'est Onyx, la deuxième horla qui avait chopé Orchidée et Cobra. Elle veut enlever Orchidée. Orchidée ne se sent pas de taille à lutter contre elle, il a une peur atavique d'elle. Mais il arrive par son art à pousser ses fans à la tuer. Onyx se campe face à lui, frappée de plusieurs lames. Elle bave un trait noir, et du sang noir s'étend sur sa poitrine, avant qu'elle tombe. Les horlas ont du goudron dans les veines.

Alouette a trouvé la force de descendre dans la force, elle en a sorti Vérité, sa belle favorite est en sang, elle a le crâne défoncé, elle est presque morte.
Alouette reprend le micro et fait un dernier chant pour la paix.
Et quand la poussière retombe, par l'égrégore du dernier groupe de rock du monde, la guerre civile prend fin, et tous ces timbrés bellicistes qui sont venus au concert sont maintenant en train de se fouiller la bouche et de s'enlacer à même le béton du sol.

Orchidée a salement morflé durant le concert, quand Tronc l'a plantée. Il bat le pavé de Berlin pour trouver un médico. C'est dans le dispensaire où l'on soigne tous les blessés de la guerre civile, des ruines aux voûtes de briques avec des brancards alignés à perte de vue, qu'il rencontre Philis, une chirurgienne rousse et tatouée qui carbure au sky et fait claquer du bubble-gum dans sa bouche quand elle parle. Philis fait ce boulot parce qu'elle aime la vue du sang, et avec la fin de la guerre civile, elle va s'ennuyer, alors Orchidée la convainc de rejoindre la tournée, on n'est jamais en manque de sang qui coule dans le sillage du dernier groupe de rock du monde.

Philis monte dans le camtard de tournée conduit par Cobra. Une putain de machine, un truck américain grand comme une gare de triage et monté sur chenilles, rafistolé de partout, avec des cheminées d'échappement grosse comme des troncs et un pare-buffle de malade à l'avant. Tout le monde monte dans le camion, même Justin qui est revenu par ses propres moyens, et on file sur la Voie Déchue, la voie déchue germanique, c'est une masse de béton qui va toujours tout droit, elle est assez large pour le monstre de Cobra même une fois que les arbres et les racines ont détruit quelques couloirs de circulation. Direction : l'Arbre de Trollesund, au plus profond des forêts de Saxe, pour tenir la promesse d'Alouette.

Derrière le camion, la camionnette Renault de Dany, et encore derrière, le bus déglingué qui transporte les fans d'Alouette, à l'exception de Cybel et Vérité, qui ont le privilège d'être aux côtés d'Alouette dans le camion - un favoritisme qui se paiera !

Pour soigner Orchidée, Philis l'a bourré d'orgones, une substance qu'elle injecte dans les veines, et qui est à la fois une drogue, une forme d'énergie et un organisme. Alors Orchidée passe quatre jour en plein trip.

Justin lui demande de la soigner, mais elle le charcute et l'infecte, alors juste ses blessures empirent.

Cybel va voir Philis. Elle est en pleine forme, elle veut juste être camée, les orgones ça attire sa curiosité, et elle se retrouve aussi en plein délire pendant quatre jours, elle revit le concert de Berlin à l'infini.

Philis arrive à stabiliser Vérité à force de drogues et de pansements. Mais elle est tellement fragile que quelqu'un doit rester trois jours à ses côtés, et c'est Alouette qui s'y colle. La souffrance de Vérité l'a émue au point qu'elle en tombe irrémédiablement amoureuse. Elle ne serait pas prête à abandonner la musique pour Vérité, mais prête à mourir, sans hésitation.

Soudain, un grand vrombissement ! Une demi-douzaine de chevaliers teutoniques avec tabard à croix rouges, heaumes et pistolets mitrailleurs, surgissent de la forêt en moto-cross de combat à deux roues avant et partent à l'assaut du camion !

Le camion encaisse le gros des tirs, mais Cobra passe à travers son pare-brise. Elle se raccroche au pare-buffle alors que la baleine roulante qui lui fait office de véhicule continue sa course folle en ligne droite.

Certaines rafales passent à travers la cloison de la remorque et blessent Philis à l'intérieur.

Cybel, toujours bloqué dans son trip sous orgones, revit le concert en boucle. Il en est au moment où il touche Tronc avec son gant de violation, et alors à ce moment Tronc lui dit un truc démentiel : "Le chant de Justin est en train de vous transformer en horlas."

En effet, en ce moment, Justin est en train de répéter dans la remorque, à côté d'eux, il chante les paroles qui sont tatouées sur ses bras en langue putride. Mais Cybel n'arrive pas à se réveiller pour prévenir les autres !

L'un des chevaliers teutoniques arrive à ouvrir la porte arrière de la remorque, et il s'empare de Justin. Il le fout sur son dos, et repart en moto-cross dans la forêt. Mais Justin se débat, il éjecte le chevalier de sa moto et revient vers le camion à toutes blindes.

Au début de l'attaque, Dany Blue, qui suit derrière au volant de sa camionnette, n'a rien calculé : même après que Cobra ait été éjecté, le camion continuait à rouler. Mais quand il voit la porte de la remorque ouverte, il réalise qu'il y a un problème... Et il voit surtout leurs précieux amplis Marshall glisser de la remorque et se crasher sur la voie les uns après les autres ! Et là, c'est une catastrophe ! Si il y a bien des membres du groupe qu'on ne peut plus remplacer, c'est eux ! Les voir s'exploser dans un fracas de métal et de transistors, c'est la scène la plus déchirante qui lui ait été donné de voir dans sa vie !

Orchidée est toujours en plein trip. Elle aussi revit le concert au moment où Onyx se présente à lui. Onyx lui inspire toujours cette peur noire, et juste à l'instant elle lui explique pourquoi. "Tu t'es jamais demandé ce que c'était que cette corde sur ta basse ? C'est les cordes vocales de ton frère. Tu nous as laissés les mettre sur ta gratte en échange de ta vie sauve."

Et Orchidée revit le moment où elle avait fait diversion pour laisser le temps à Cobra de soustraire le camion à la convoitise des horlas Jared et Onyx. Il avait son frère avec elle. Et Onyx lui a demandé un choix mortel, elle lui a parlé de pacte faustien aussi, elle lui a parlé de devenir un dieu de la musique, et sous ses yeux elle a plongé son bras dans la bouche de son frère et lui a arraché les cordes vocales pour les fixer sur sa basse !

"Maintenant que tu te rappelles la vérité, tu ne pourras plus rejouer de la basse, à moins que tu préfères oublier.
- Je préfère oublier.
- Alors tu vas souffrir du Vide, ce gouffre qui s'ouvre en toi quand tu sais que tu as perdu un souvenir vraiment important. Tu sombreras dans la dépression. La seule façon de combler ce Vide, ce sera de tuer Jared.
- Ainsi soit-il."

Bruit d'explosion. Jeu des projecteurs. Onyx n'est plus là. Maintenant, c'est son frère qui se tient devant lui, pour la dernière fois. Il est en tenue de concert, le bas de son visage est crépi de sang. Il tient aussi une basse, et il lance un premier larsen pour amorcer un bœuf.

Alors Orchidée joue avec son frère. Un jam d'enfer, un jam de fin du monde.

Tout ce qu'il y a sur la scène vibre et glisse vers la fosse, qui est devenu un abîme. D'abord Justin, puis les amplis, puis tout ce qu'il y a sur la scène. Son frère le fixe une dernière fois avec toute l'intensité du monde.

Et il slamme dans l'abîme.

Orchidée regarde l'abîme.

Et l'abîme la regarde.

Dany Blue fait monter sa camionnette à hauteur de l'avant du camion et trouve Cobra qui voltige agrippée au pare-buffle d'une main, sulfatant les teutoniques de l'autre. Avec une aisance impériale, Dany Blue conduit la camionnette d'une main, et renvoit Cobra dans l'habitacle de l'autre.

Cobra reprend le contrôle du camion avant qu'il ne finisse dans le décor. Dany Blue lui gueule que les amplis ont versé sur la route, ils sont éclatés en dix, et ce sont les derniers amplis du monde, Dany peut encore espérer les réparer avec ses pièces de rechange et beaucoup de chatterton, mais il faut à tout prix les récupérer.

Cobra braque à mort, le camion fait demi-tour à la vitesse d'une baleine à l'agonie, ça fume dans tous les sens, un teutonique s'emplâtre dans la remorque.

Ils refilent en sens inverse, talonnés par les teutoniques qui restent. Finalement, une pluie de sagaies préhistoriques arrête leurs poursuivants. Ils viennent d'être sauvés par des païens en peaux de bêtes planqués dans les arbres : les saxons de Trollesund. Ils les laissent récupérer les bouts d'ampli, mais en échange de cette faveur et de l'opération de sauvetage, ils exigent qu'ils fassent un concert au pied de leur arbre sacré. Le deal tient, après tout ils étaient venus pour ça. En revanche, Dany n'aura pas le temps de réparer les amplis : ça va se la jouer unplugged. Tout à fait raccord avec l'ambiance.

Les saxons les guident à travers leur forêt. Ils arrivent devant l'Arbre Sacré, c'est un chêne gigantesque, des centaines d'offrandes en or et en argent pendent à ses branches. Alouette sent une concentration d'égrégore importante. Elle utilise ses fans pour analyser l'égrégore, et sent la présence de Jared, planqué non loin de là. Orchidée explique aux saxons qu'ils ont un invité indésirable et joue de son charisme pour le faire amener devant elle.

Ensemble ils ont une discussion. Jared lui promet une vie de jam démentiel, il lui dit qu'il est de son côté, qu'il peut guérir son Vide, il lui suffit d'un petit pacte... Et Orchidée arrive à se dévisser de son regard et le plante.

Jared se tourne vers Justin.

Il pleure du sang noir.

Ils s'embrassent à pleins poumons

avant que Jared

meure dans ses bras

son visage de messie

éteint à jamais.


Feuilles de personnages :

Dany Blue, machiniste
homme, maigrelet, fringues vintage tech, barbu, visage mignon, regard timide, nerd, des outils partout, casque de daft punk
Thème : Come to daddy, Aphex Twin
Instrument : ingé son, platines
cool 0 (coché) dur -1, sexy -1, rusé 2, zarb 2 (coché)
hx : orchidée -1, Cybel -2, justin +2, Cobra +2, Alouette -1
Actions : toujours raison, intense à faire peur
Matos : 4-troc, 1 fusil à pompe, un fouet à jacks
armure : des jacks autour du torse
1 casque de fonte ajusté
Atelier : un van Renault, de quoi fabriquer des pièces de rechange, une relique de l'Âge d'Or
Van puissance 2 apparence 1 armure 1 faiblesse 1 : robuste et fidèle, vintage, cancer des yeux

Justin, beauté fatale
homme, visage doux, beau gosse, chemise manches longues, jean troué, collier en étoile, regard calculateur, physique adorable
Thème : ?
cool 2 (coché), dur -1, sexy +2 (coché), rusé 0, zarb -1
hx : dany blue -1, orchidée 0, Cybel -1, cobra +3, alouette 0
progression : 4/5
actions : mortel & sexy, nerfs d'acier
flingue semi-automatique, chaîne ouvragée avec des piques
dégats : 9h, détruit ( a perdu 1 en cool)

Cybel, céphale
homme, torse nu et jean déchiré, visage osseux, regard détruit, physique estropié et brisé, une bouche à la place du téton gauche
Thème : Chop Suey !, System of a Down
cool 2 (coché), dur -1, sexy -1, rusé 0, zarb +3 (coché)
matos : scalpels, drogues de réceptivité, gant de violation
progression : 2/5
actions : entretien cérébral surnaturel, murmure par projection cérébrale, marionnettiste cérébral

Orchidée, envoûteur
Androgyne, batcave, manteau noir, tenue rouge, minet, jeune, bassiste
Thème : Kings and Queens, Thirty Seconds to Mars
cool +1 (coché), dur -1, sexy 2, rusé 1, zarb 0 (coché)
Hx : danu blue 0 justin +2 Cybel 0 cobra +3 alouette 1
Dégats : 3h
progression : 3/5
actions : de l'art et de la grâce, hypnotique
Matos : couteaux dissimulés, long manteau à tomber, tatouages spectaculaires

Cobra, passeur
femme, fringues déglinguées (salopette, débardeur graisseux), visage sévère, regard calme, physique solide, bras mécanique
Thème : Down With the Sickness, Disturbed
matos : canon scié
cool 1 dur -2 (coché) sexy 0 rusé 2 zarb 1 (coché)
Hx : alouette -1 orchidée -2 Cybel -2 justin 0 dany blue 0
dégats : 3h
progression : 3/5
actions : as du volant, casse-cou
camion : semi-remorque, puissance 2 apparence 1 armure 2 faiblesse 2, robuste, énorme, artisanal, rigide, paresseux
Amoureuse d'Orchidée

Alouette, prophète
femme, visage innocent et ascétique, regard fascinant, physique doux et gracieux, longue robe immaculée, longs cheveux blonds tressés, hypnotise les foules
Thème : Dead Can Dance, l'album "Aion"
cool -1 dur 1 sexy 0 (coché) rusé 1 zarb 2 (coché)
actions : offrande, frénésie, charismatique, complètement fondu
progression : 5/5 (une nouvelle action de prophète)
Disciples : secte de fans, disciples entièrement dévoués, antenne psychique (auspice), dépendants d'Alouette, gros camés, besoin : affamés


Commentaires sur le jeu :

On a dû passer une heure sur la création de personnage, et deux heures et demie, trois heures, sur le jeu.
Quand il a fallu gérer les véhicules, on a un peu géré à la louche, les règles pour les dégats aux véhicules, c'était clair, le reste moins, et le joueur de Cobra a été fair play en rappelant que son camion était super lent quand il s'agissait de braquer.
J'ai encore eu quelques difficultés à trier entre agir face au danger / agresser / prendre de force, mais je commence à m'y retrouver. Je fais préciser aux joueurs l'effet qu'ils recherchent, et je regarde dans les conséquences des actions celles qui correspondent le plus, ça me permet de choisir l'action. Je rêverais de jouer à une version où les joueurs peuvent choisir leurs actions eux-mêmes comme ils leurs font pour les actions spécifiques à leur playbook, mais ce n'est pas encore possible pour moi.

Quand je parlais d'arbre sacré, je pensais à Irminsul, mais j'ai eu un trou noir, alors j'ai improvisé le terme de Trollesund. C'est un nom de lieu scandinave dans le roman La Croisée des Mondes, et je me demande si c'est pas aussi le nom d'un festival de metal, mais je n'en ai pas retrouvé trace sur internet.

J'ai vraiment apprécié le jeu de Cybel, pour une fois on avait un Céphale qui était pas juste bizarre et néfaste pour le groupe. Son joueur a joué trash et what the fuck, mais il est resté coop tout du long, à mes yeux c'est une façon légitime de jouer le Céphale, mais on l'observe rarement, c'était rafraîchissant.

Alouette était inspirée de Lisa Gerrard, la chanteuse éthérée de Dead Can Dance. Je vous laisse deviner à qui faisaient référence Jared et Justin !
Outsider. Énergie créative. Univers artisanaux.
Ma page Tipee.
Répondre