Séance en petit comité : le couple de joueurs à ma table était excusé pour cause de naissance de leur bébé, la veille.
Le Temps du Rêve
Suite aux révélations de l’Allemand
Hermann Detzner, le professeur
Bolgenstein a fait joué ses relations dans le milieu universitaire pour en apprendre un peu plus sur
Yamazaki Yukio, l’anthropologue japonais que Detzner a rencontré dans les Carolines.
Il s'avère que depuis deux ou trois ans, Yamazaki a entretenu une importante correspondance avec plusieurs anthropologues occidentaux, et a même rencontré certains d’entre eux. Il prétendait travailler sur une vaste étude comparée des religions et des mythes du Pacifique.
Un rendez-vous manqué
En juin 1938, le
Lieutenant-Commander Packard et
Guus Van Diemen s’envolent pour Darwin, en Australie. Ils doivent remettre Hermann Detzner aux autorités de ce pays, pour qu’il soit jugé pour sa tentative de subversion des Papous de Nouvelle-Guinée. Mais ils ont aussi pris rendez-vous avec l’anthropologue
Donald Thomson, spécialiste des Aborigènes, que Yamazaki Yukio a rencontré il y a deux ans.
Après s’être acquitté de leur tâche auprès des autorités judiciaires, les PJ se rendent au l’hôtel Victoria, où Thomson leur a donné rendez-vous. Hélas, ce dernier est absent. Il a bien pris une chambre la veille, mais ce matin même, il est reparti avec trois hommes en tenue de brousse, qui étaient venus le chercher.
Un peu inquiets de ne pas le voir revenir, les PJ tachent d’obtenir des précisions sur son départ. Ils apprennent que l’un des trois inconnus avait le visage défiguré par une vieille blessure, et qu’un autre, le plus âgé, portait une médaille militaire au revers de sa veste. Ils sont montés dans la chambre de Donald Thomson sans y être invités, et leur entrevue a donné lieu à quelques éclats de voix et à une lampe brisée. Il semblerait aussi qu’ils aient confisqué le colt .45 de l’anthropologue. Par conséquent, tout laisse à penser que ce dernier ne les a pas suivis de son plein gré.
La Vieille garde
Le soir même, les PJ se rendent au commissariat de police pour signaler l’enlèvement de Donald Thomson. Mais lorsqu’ils décrivent les suspects à l’officier de service, celui-ci paraît gêné. Il leur avoue que certains vétérans de la Grande Guerre appartiennent à une milice nommée
la Vieille Garde, qui ne cache pas son admiration pour l’Italie fasciste et l’Allemagne nazie. Et la popularité des anciens combattants est telle que la police refuse de s’opposer aux agissements de la Vieille Garde.
Sur le port, les PJ obtiennent le nom d’un endroit où se réunissent habituellement les vétérans : le
Gallipoli Club. Ils attendent la fermeture de l’établissement, repèrent une serveuse qui quitte les lieux et la prennent en filature. Un peu plus loin, Packard l’aborde et lui propose quelques billets pour avoir des informations sur les membres de la Vieille Garde. Elle identifie l’homme à la médaille, le
major Baldwin et celui au visage mutilé. Elle révèle aussi qu’un de leurs camarades s’est vanté la veille au soir qu’ils allaient partir en opération pour
« s’occuper du chef Wonggu et de ses fils». Aucun membre de la Vieille Garde n’est revenu au Gallipoli Club ce jour-là.
De retour à l’hôtel Victoria, les PJ se plongent dans les notes et la correspondance de Donald Thomson. Ils découvrent que son domaine d’étude porte sur le peuple
Yolngu, qui vit en Terre d’Arnhem (une péninsule à l’est de Darwin), et tout particulièrement sur le clan de
Djapu, dirigé par le chef Wonggu. Thomson s’est d’ailleurs appliqué à défendre les fils de Wonggu dans une affaire judiciaire connue comme
la crise de Caledon Bay.
La Terre d’Arnhem
Le lendemain, à l’aube, les PJ décollent en direction de Yirrkala, un port en Terre d’Arnhem, proche du territoire du clan de Djapu. Après quelques heures de vol, ils amerrissent à proximité de cette minuscule bourgade, bâtie autour d’une mission méthodiste. Sur le terrain d’aviation local est posé un petit avion privé. Les PJ apprennent qu’il a déposé la veille un groupe de six hommes, identifié comme Donald Thomson et les membres de la Vieille Garde. Ils ont loué des chevaux et des mules et sont partis en direction du bush.
Les PJ trouvent un guide pour les accompagner au village du clan de Djapu. C’est un vieil Aborigène porté sur la bouteille, nommé
Gedeon Petyarre. Il assure qu’en pirogue, il peut suivre un itinéraire bien plus court que celui par la terre ferme. Malgré l’état de délabrement de son embarcation, les PJ, accompagnés de deux soldats sous leurs ordres, acceptent de monter à bord, et de prendre la direction des
billabongs de la Terre d’Arnhem.
Bien que les marécages soient infestés de crocodiles, la première journée de voyage se fait sans encombre. Les PJ ont le temps d’expliquer à Gedeon le plan criminel du major Baldwin et de ses hommes. L’Aborigène répond de façon mystérieuse :
»Il n’y a rien à craindre. Le clan de Djapu est protégé. »
La menace
Le soir, le groupe établit un campement sur la berge. Mais pendant le repas, un gros crocodile s’approche, avec la ferme intention de goûter à la chair humaine. Paniqués, les PJ le mitraillent sans parvenir à le blesser grièvement, et le soldat
John Church manque de peu d’y laisser une jambe. Finalement, agacé par les coups de feu et les brandons enflammés agités devant son museau, le saurien fait demi-tour et plonge dans le billabong. Gedeon conclut :
« Ça va, c’était juste un crocodile. »
Plus tard, au cours de la nuit, deux coups de feu retentissent au loin. Puis, au petit matin, c’est un grognement profond, plus grave que ceux produits par aucun animal de la faune australienne, qui résonne. Les PJ remontent à bord de la pirogue sans avoir eu d’explication sur ces bruits inquiétants.
Après une matinée de navigation, Gedeon amarre la pirogue au bout d’un bras mort. Il explique qu’il va falloir marcher quelques heures pour rejoindre le village yolngu. Peu de temps après, les PJ repèrent les traces des chevaux et des hommes qui les précèdent.
Soudain, après une heure de marche, une fusillade retentit, à quelques kilomètres de distance, et s’interrompt au bout de quelques instants. Les PJ pressent le pas, et ne tardent pas à voir un cavalier venir au petit galop dans leur direction.
Ils arrêtent l’inconnu, un Australien en tenue de brousse, qui prononce d’une voix affolée :
« La bête ! Elle a tué Norton ! Elle est gigantesque ! Ils lui ont tiré dessus, mais ils n’ont pas réussi à la blesser. Le professeur nous avait prévenus. Je n’irai pas plus loin ! S’ils veulent continuer, tant pis pour eux ! »
Les PJ parviennent à le calmer, en utilisant quelques drogues orientales. Ils demandent des explications à Gedeon, qui explique que le clan de Djapu est sous la protection d’un
buniyp, une créature terrifiante du folklore aborigène. Il explique que seuls ceux qui savent les mots sacré du peuple yolngu peuvent apaiser sa fureur.
L’affrontement
En continuant à suivre la piste des miliciens, les PJ finissent par les apercevoir au moment où ils passent une crête. Le lieutenant Packard leur somme de s’arrêter, mais il n’obtient qu’un refus déterminé, et quelques tirs de semonce de la part d’un tireur embusqué.
Les PJ et leurs hommes tentent de progresser vers la crête à travers les broussailles, en échangeant quelques coups de feu avec les Australiens.
Soudain, les détonations redoublent dans le camp adverse, mais les balles ne fusent plus vers les PJ. Ces derniers en profitent pour remonter en direction de la crête.
Packard voit le professeur Donald Thomson, les mains menottées dans le dos, en train de fuir les combats, et il parvient à le rattraper. Quant à Guus Van Diemen, épaulé par le soldat
gurkha Tenzin Pahadi, il parvient au sommet de la colline, et voit un gigantesque fauve à la peau brune en train d’attaquer les vétérans. Après avoir tué l’un d’eux d’un seul coup de mâchoires, il se précipite vers ses deux compagnons survivants, dont les balles sont impuissantes à l’arrêter.
Sans assister à la suite du massacre, Van Diemen et Tenzin prennent la fuite. Mais le Buniyp ne tarde pas à se lancer à leur poursuite. En quelques bons, il est sur les talons du gurkha. Dans un geste désespéré, ce dernier fait volte-face, et brandissant son couteau
kukri, il pousse un hurlement qui arrête le monstre dans son élan.
Pendant quelques instants, l’homme et la bête se toisent, menaçants. Cela laisse juste le temps au professeur Thomson, toujours menotté, de se précipiter en avant, et de mettre Tenzin à terre en le bousculant d’un coup d’épaule.
A ce moment-là, les PJ sont trop loin pour entendre les mots que murmure l’anthropologue. Mais ils constatent que la fureur du bunyip s’apaise. La créature finit par faire lentement demi-tour, et disparaît bientôt derrière la crête.
Les Yolngu
Tandis que les PJ se remettent de leurs émotions et font connaissance avec Donald Thomson, un groupe de chasseurs aborigènes, alertés par les coups de feu, vient à leur rencontre. Il s’agit du chef Wonggu et de ses fils, qui retrouvent avec plaisir leur ami le professeur.
Les PJ sont bientôt accueillis dans le village yolngu. Autour d’un repas, ils discutent avec Thomson de son entrevue avec Yamazaki Yukio. Ce dernier s’intéressait surtout au culte des ancêtres et à l’interprétation des rêves et des visions chez les Yolngu.
Au cours de la conversation, Donald Thomson révèle que, d’après Wonggu, les anciens de la tribu reçoivent depuis plusieurs mois des rêves « étrangers ». Leur grande expérience des voyages oniriques leur a permis de se rendre compte du caractère artificiel de ces rêves, qui ont toujours des similitudes.
Pour qu’ils découvrent le phénomène par eux-mêmes, les Yolngu proposent aux PJ de participer à une cérémonie chamanique. Après avoir mâché le
pituri, bercés par le son des didjeridoos et des tambours, les PJ s’endorment profondément…
Dans les rêves
Jonathan Packard, l’officier américain, rêve d’un port du XVIIIème siècle, soumis à la domination des tuniques rouges, qui raflent les patriotes dans leurs maisons et les pendent aux gibets.
Soudain, une rumeur monte depuis le port :
« Les Pères Pélerins ! Ils viennent nous sauver ! » Suivant la foule en direction de la mer, Packard voit bientôt un bateau approcher à l’horizon. Il le reconnaît pour l’avoir vu souvent représenter : c’est le
Mayflower. En le voyant, les soldats anglais, s’enfuient pris de panique.
Le Néerlandais Guus Van Diemen, quant à lui, rêve d’un port des Pays-Bas, sous la coupe des soldats espagnols en cuirasses et morions. Lorsqu’il entend des voix s’exclamer
« Les Gueux de la Mer ! Ils arrivent ! C’est le prince Guillaume ! » Van Diemen se dirige vers la mer. Il voit alors une flotte battant pavillon hollandais, en train de couler les galions espagnols qui cherchent à fuir, chargés du butin des pillages.
Outre leurs ressemblances, ces deux rêves présentent des anachronismes qui semblent indiquer que ce sont les ancêtres qui viendront apporter le salut depuis la mer. Les Yolngus font quant à eux des rêves qui suivent le même canevas, mais où l’oppresseur est australien.
Persuadés que ces rêves sont envoyés par la Société de l’Océan Noir depuis le site de Nan Madol, à Ponape, les PJ se disent qu’il est temps d’envisager sérieusement d’y lancer une opération…