[CR] D&D 5E — Rime of the Frostmaiden

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BenjaminP
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Message par BenjaminP »

Épisode 13 — Partie 2 : La cabine calcinée

Ce fut donc accompagné d’Isobaï et de son chariot tracté par deux ours qu’ils se lancèrent sur la piste des Dix. Sahrane était restée à Montandre et Anatole put grimper aux côtés de la trappeuse, si bien qu’ils firent bon train. Ils quittèrent la piste un peu après midi, quand la lumière déjà crépusculaire déclina soudain, annonçant un blizzard. Ils se résolurent à planter le camp, dont Polaris fit rapidement le tour pour découvrir tout près un troupeau de rennes blottit à flanc de colline, immobile sous les assauts du vent. Il en préleva sa juste part, le plus discrètement du monde, un vieux mâle qui boîtait, qu’il dépeça paisiblement en attendant le soir. Quand le sommeil emporta enfin ses camarades, il resta éveillé encore quelques heures. Le vent était tombé mais l’air toujours épais lui rapporta bientôt les ahanements d’une troupe. À pas de loup, il s’approcha pour les distinguer malgré la brume et la nuit, à la lueur de la lune. Des orques, en nombre. Huit. Suivis d’une silhouette de stature encore plus imposante que ces forces de la nature. Bien trop pour risquer une rencontre. Il hésita. Leur parler malgré tout ? Il caressa autour de son cou la babiole qu’il tenait de sa dernière rencontre avec un membre de la tribu des Sans Nombre, au cours d’un blizzard, déjà. Non, trop risqué. Il fila au campement pour réveiller les autres. Il était encore temps de filer. Sans doute les orques avaient-ils suivi le troupeau de rennes, ils ne s’intéresseraient guère aux traces d’un chariot gobelin. Ils plièrent le camp si rapidement qu’ils en oublièrent les belles lamelles de viande et la peau du boiteux sous le tas de neige fraîche où Polaris les avait entreposés. Le fruit de sa journée était perdu, mais sans doute cela valait-il mieux que de risquer leur vie.

Au petit matin, ils atteignirent la cabine de Macréadus, un vieil amas de planches vermoulues, perché sur pilotis, versant dangereusement vers l’à-pic qu’un éboulement récent avait creusé sous elle. Ses fenêtres brisées et ses volets battants n’auguraient rien de bon. Qui, au cœur de l’hiver éternel, pourrait ainsi survivre à tous les vents ? Ils s’approchèrent doucement. Loxias passa le premier. Il y sentit bien vite comme une étrange présence d’une grande sérénité, un calme divin loin d’être naturel. Une lettre de Copper qui traînait dans l'âtre le renseigna un peu, puisqu'il évoquait le seigneur du matin. Était-ce donc le dieu Lathandre qu'on sentait là ?

Un joli 1 au jet de Religion, bravo à Loxias. Heureusement qu'@Elijah Shingern, lui, n'est pas une buse, et qu'il a tout de suite su de qui on parlait.

Anatole le suivit à l’intérieur avec les plus grandes précautions, prenant bien garde de ne fouler que les planches les plus sûres. Son œil de lynx repéra tout de suite les principaux indices présents, au point qu’en une poignée de secondes, il avait déjà reconstitué toute la scène. Une déflagration avait noirci la pièce du sol au plafond. Sur le plancher, une trace plus claire, et en son centre un squelette récent dont toute chair avait été soufflée. Autour des vertèbres cervicales pendait encore la lourde amulette qui, de son vivant, ornait le cou de Macréadus, son fétiche magique. Entre les os de ses doigts, un livre calciné, mais pas suffisamment pour qu’Anatole ne pût le reconnaître : Les Arcanes merveilleuses de l’empire Netheril, le plus précieux des tomes de sa collection très fournie, qu’il n’aurait jamais daigné ne serait-ce que le lui laisser feuilleter pour peu qu'Anatole se fût abaissé à le lui demander. Parti en fumée. Et près de celui-ci, un objet curieux, deux anneaux concentriques reliés par un essieu qui transperçait une gemme. Comme il lui sembla évident que cet objet était celui qui avait déclenché l’explosion, Anatole s’empara de sa baguette pour le manipuler de loin, et constater bien vite que sa chaleur corporelle suscitait dans la gemme une activité qui serait bien vite hors de contrôle.

En claquant son inspi, Anatole nous fait un 20 nat en investigation, compétence qu'il maîtrise. Je lui balance donc tout, et @Islayre d'Argolh prend logiquement toutes les précautions qui s'imposent.

Alors que Polaris revenait de la pièce d’à côté les bras chargés de schémas qu’il y avait découverts, Loxias observait, éberlué, une constellation d’insultes apparaître les unes après les autres sur la couche de givre qui recouvrait la table.
« Mon vieux Maître, intervint Loxias. Je crois qu’un fantôme vous parle…
— Et la mort ne l’a pas rendu plus agréable, oui, lui répondit Anatole en auscultant la gemme et les deux anneaux. Les dieux savent que je ne souhaite la mort de personne et il semblerait bien, ajouta-t-il en jetant un œil aux schémas que Polaris avait étalés devant lui, que ce mauvais magicien, aussi rustre qu’il fût, était sur une piste si intéressante que l’espoir de la voir s’accomplir l’ait maintenu en ce monde… Si ce n’est son corps, du moins son âme.
— Une piste, vieux Maître ? répéta Polaris. De quel genre ?
— Macréadus avait trouvé le moyen de contrôler le temps, Polaris. De modifier le climat. »

Et un 20 en Arcane pour Anatole, qu'il maîtrise tout autant (avec avantage puisque Polaris avait trouvé les schémas et Loxias la lettre de Copper), histoire de vraiment ne plus faire planer la moindre once de mystère !

Spoiler:
Fiou, c'était donc l'épisode de la Black Cabin, que j'appréhendais beaucoup. Ceux qui connaissent l'aventure savent pourquoi : touchez ces anneaux concentriques, et c'est la mort assurée (90 PV de dégâts radiants, divisé par 2 si on réussit le JdS. Anatole a 22 PV.) À première vue, c'est donc un Save or Die à l'ancienne, et même un Even if you save You Die, ce qui était toujours très périlleux et pas toujours très fun, mais bien sûr il y a un twist : Lathandre est prêt à ressusciter ceux qui pourront, depuis le plan éthéré où ils se retrouveront en cas de mort explosive, réparer l'appareil et le faire fonctionner, grâce à l'arrivée impromptue quelques jours plus tard d'Oyaminartok, l'esprit errant des Goliaths. C'est un peu tiré par les cheveux et littéralement Deus Ex Machinesque, mais j'étais prêt à le suivre histoire de voir ce que ça donnerait. Ça faisait bien longtemps que je n'avais pas proposé de pièges de ce genre à des joueurs, autant y aller franco ! Mais deux 20 nat de suite nous en auront dispensés. Tant mieux ? Tant pis ? Nous ne le saurons jamais.

Notez que j'avais pris sur moi de préfigurer un tout petit peu la possibilité de ce twist, avec ce jet de religion demandé à Loxias, histoire de lui faire sentir qu'un dieu observait cette scène de très près. Le 1 me privait de la possibilité d'être explicite, mais je n'en avais pas franchement besoin.
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Elijah Shingern
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Message par Elijah Shingern »

BenjaminP a écrit : ven. oct. 18, 2024 4:10 pm Un joli 1 au jet de Religion, bravo à Loxias. Heureusement qu'@Elijah Shingern, lui, n'est pas une buse, et qu'il a tout de suite su de qui on parlait.

:mrgreen:

Fragments...

"Je te contemple
Entouré d'une éclatante lumière
Resplendissant de tous les feux de l'Astre Flamboyant
Aveuglant tous les êtres
Tu es immense !

Je vois la multitude des Dieux
Franchir le seuil de ta Demeure
Joignant les mains
Pour dire tes louanges

Les plus grand Sages
Chantent des hymnes à ta gloire

Le monde tremble de joie
Devant le spectacle de ta naissance"

(Louange à Lathandre)


"Soudain, la puanteur de la maison vermoulue et de l'âtre froid, celle de la sueur aigre et des corps mal lavés, et même celle, persistante, de l'huile de phoque et de baleine dont étaient ointes les peaux qui couvraient Polaris fut remplacée par un parfum puissant, capiteux, presque écœurant.

Un Dieu s'était manifesté, et il sentait la rose."

(Roman des trois compagnons)


"POLARIS: Vieux Maître, pouvez-vous me dire quels sont les pouvoirs de ce Seigneur de l'Aube ?

ANATOLE : Ceux qui possèdent la science des astres savent que lorsque Lathandre advient, les multitudes sortent du Néant et fleurissent. Lorsqu'il repart, toutes les choses retournent à la Nuit Cosmique, avant de renaître encore et encore lorsque revient le Matin Divin.
Mais il existe une autre réalité, différente de ce Néant, une réalité insondable et inaccessible, qui ne meurt pas lorsque tous les êtres disparaissent.

POLARIS : Je n'ai rien compris, Vieux Maître.

ANATOLE: Ce n'est pas grave, mon petit. Retiens qu'avec ses connaissances très limitées, ce vieil imbécile de Macréadus - qui n'entravait que dalle - a dû oublier quelque chose pour faire fonctionner son invention. Voyons, voyons, qu'est ce qui se passe si je bouge ceci comme cela..."

(Extrait du Dialogue sur Macréadus).
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Message par Islayre d'Argolh »

Elijah Shingern a écrit : sam. oct. 19, 2024 12:06 pm ANATOLE: Ce n'est pas grave, mon petit. Retiens qu'avec ses connaissances très limitées, ce vieil imbécile de Macréadus - qui n'entravait que dalle - a dû oublier quelque chose pour faire fonctionner son invention. Voyons, voyons, qu'est ce qui se passe si je bouge ceci comme cela..."[/i]
(Extrait du Dialogue sur Macréadus).

:mrgreen:

 
BenjaminP a écrit : ven. oct. 18, 2024 4:10 pm Et un 20 en Arcane pour Anatole, qu'il maîtrise tout autant (avec avantage puisque Polaris avait trouvé les schémas et Loxias la lettre de Copper), histoire de vraiment ne plus faire planer la moindre once de mystère !

Deux 20 naturels coup sur coup j'avoue que je ne suis pas peu fier !
Et j'aime bien ce que cela implique dans le récit, ça donne de la crédibilité au background du perso cette "sommité régionale" de niveau... 4.
Parce que dans le film, ce que tu vois c'est le meilleur dans son domaine, un Sherlock Holmes des mystères arcaniques qui, bien que clopinant, réalise immédiatement les tenants et aboutissants de la situation.
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Re: [CR] D&D 5E — Rime of the Frostmaiden

Message par Elijah Shingern »

Islayre d'Argolh a écrit : sam. oct. 19, 2024 12:21 pm Deux 20 naturels coup sur coup j'avoue que je ne suis pas peu fier !
Et j'aime bien ce que cela implique dans le récit, ça donne de la crédibilité au background du perso cette "sommité régionale" de niveau... 4.
Parce que dans le film, ce que tu vois c'est le meilleur dans son domaine, un Sherlock Holmes des mystères arcaniques qui, bien que clopinant, réalise immédiatement les tenants et aboutissants de la situation.

Fragment

"L'Archimage Anatole était subtil, ténébreux, insondable.
C'est dans la source même de la magie qu'il plantait ses racines.
C'est dans le monde créé qu'il étendait ses branches.
Qui connaissait les limites de son Pouvoir ?
Il était Maître des Arcanes."

(XIIe leçon de Raymond, Magister de l'Académie de la Lumière de la Vérité, à Padhiver)
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Message par Harfang2 »

Les dès sont, toujours, nos meilleurs amis pour une belle histoire qu'ils soient bénis des dieux ou maudit pas les diables.
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Re: [CR] D&D 5E — Rime of the Frostmaiden

Message par BenjaminP »

Je suis en train d'éplucher Legacy of the Cristal Shards (grâce à un éminent forumiste dont on raconte qu'il ne joue que sur les meilleures tables et dans les meilleures campagnes), c'est passionnant. Je n'ai pas encore lu le scénario, seulement la partie "contexte" et encore pas en entier (les dix villages, principalement).

Pour ceusses qui l'ignorent, c'est un scénario de l'époque D&D Next (donc entre la 4e et la 5e, élément du playtest) qui se passe dans le Val. On retrouve pas mal de choses en commun et de très intéressantes différences. Déjà, qu'ils abandonneront par la suite cette petite manie de consacrer des pages entières à des éléments de contexte qui ne donneront rien au jeu. Au hasard : les différends sur les droits de pêche entre les dix villages, réglés depuis cent ans : une pleine page. Ou encore de placer systématiquement un minimum de trois auberges dans toutes les localités citées, sans qu'on sache trop pourquoi.

Surtout et plus largement, l'idée de simplement choisir une région au sein d'un contexte ultra fouillé comme les Royaumes oubliés, auxquels de multiples romans et suppléments ont été consacrés, et de simplement récapituler en espérant que le jeu se créera tout seul à partir de ça. Il n'y a pas d'autre situation de départ que le Val en son état d'équilibre, son état tel que décrit in abstracto comme il le serait dans un guide de voyage. Là le contraste est saisissant, quand on compare à Rime (ou à Descent into Avernus, ou à Storm King's Thunder, par exemple, ça marche aussi), qui part d'une situation de départ en complet déséquilibre, d'une thématique hyper forte, que la région choisie va bien sûr colorer, pimenter, étoffer d'autant plus facilement qu'il a déjà existé plein de romans et de suppléments à son sujet, mais en y piochant bien plus précisément ce qui va enrichir la situation proposée, ce qui va créer du jeu, ce qui va facilement résonner et immerger les joueurs. Exit les quatre auberges de Hâvredest, on ne conserve que les deux qui aboutissent à quelque chose. Exit les droits de pêche, direction les arrangements récents entre les villages, les accommodements déraisonnables avec l'hiver.

Sur ce point, pour moi, il n'y a pas photo : le run 5E a considérablement amélioré beaucoup de choses.
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Message par Sama64 »

@BenjaminP merci pour ce retour/ point de vue. J'imagie que tu connais cet article https://thealexandrian.net/wordpress/46 ... stal-shard

j'ai "the legacy..." que j'ai toujours envie de faire jouer, et je n'ai pas Rime of the Frostmaiden. 
Je me dis que l'aspect sourcebook (plutôt complet, voir trop) de Legacy pourra toujours être exploité, en repiquant certaines intrigues de "Rime". D'autant que j'ai le roman (L'Éclat de cristal), que j'avais plutôt apprécié. 
Si je comprends bien ton point de vue, partir d'une situation de déséquilibre dans "the legacy...", en modifiant certaines descriptions (l'histoire des 3 auberges par village  :mrgreen: ) permettrait de créer du jeu plus facilement et d'exploiter le bouquin ?
L'expression "adolescent boutonneux" est désormais proscrite : Bienvenue chez les ayatollahs du dictionnaire

"Le tact dans l'audace, c'est de savoir jusqu'où on peut aller trop loin" J. Cocteau
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Re: [CR] D&D 5E — Rime of the Frostmaiden

Message par BenjaminP »

Sama64 a écrit : mar. oct. 22, 2024 11:19 am @BenjaminP merci pour ce retour/ point de vue. J'imagie que tu connais cet article https://thealexandrian.net/wordpress/46 ... stal-shard

j'ai "the legacy..." que j'ai toujours envie de faire jouer, et je n'ai pas Rime of the Frostmaiden. 
Je me dis que l'aspect sourcebook (plutôt complet, voir trop) de Legacy pourra toujours être exploité, en repiquant certaines intrigues de "Rime". D'autant que j'ai le roman (L'Éclat de cristal), que j'avais plutôt apprécié. 
Si je comprends bien ton point de vue, partir d'une situation de déséquilibre dans "the legacy...", en modifiant certaines descriptions (l'histoire des 3 auberges par village  :mrgreen: ) permettrait de créer du jeu plus facilement et d'exploiter le bouquin ?

Oui je connais l'article d'Alexander !

Je pense que Legacy peut parfaitement s'utiliser et fonctionner telle quelle, je note simplement une nette différence de design entre les deux. Legacy, c'est un contexte + un scénar qui vient se greffer dessus. Rime, c'est une situation qui pèse sur un contexte transformé en bac à sable. Ça donne mécaniquement un contexte conçu pour amener du jeu, pas uniquement pour présenter une région. À côté, le campaign guide de Legacy, il y a clairement un petit quart du contexte dévoué au scénario et rien qu'à lui, et trois quarts du contexte qui nous viennent d'ailleurs, du lore établi, qui servira sans doute à plein de gens mais qui ne présente aucune synergie évidente avec l'aventure telle qu'écrite.

Les deux peuvent s'enrichir, par exemple Legacy peut être ajouté au chapitre 1 et 2 de Rime sans problème, et le chapitre 1 de Rime pourra très bien enrichir Legacy. Mais je ne changerais pas ma présentation des dix villes dans Rime et ses tables de rencontre taillées sur mesure pour celles de Legacy, qui me paraissent un peu datées, à côté.
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Re: [CR] D&D 5E — Rime of the Frostmaiden

Message par BenjaminP »

Épisode 14 !

Je vais vous le faire en deux fois, au moins, parce que c'était une session extrêmement blablateuse et plutôt rigolote. Voici le début.

Partie I — Quelque chose de pourri au royaume des gobelins

Ils franchirent la rivière Rouge au petit matin dans une obscurité franche pour pénétrer dans un vallon très encaissé où soufflait un terrible vent. Au cœur de ce vallon, sur un éperon rocheux : Karkholok. Le fort des gobelins formait un assemblage hétéroclite. De quelques grappes de huttes en torchis, la fumée de foyers épars s’élevait vers des constructions en bois plus ambitieuses, tours de guet, guérites à l'aplomb du vide, passerelles et chemins de ronde en porte à faux, qui dénotaient une ingéniosité et un savoir-faire qui en auraient surpris beaucoup.

Ils y furent accueillis par un gobelin âgé et ligneux, trop peu vêtu contre le froid, qui, perché sur un worg, se réchauffait à la chaleur d'une flamme tenue au creux de sa paume, qu'il étouffa en serrant le poing dès qu'il reconnut le chariot d'Isobaï. Celle-ci ne parut pas ravie de la rencontre. Elle le salua néanmoins : "Snubsuk", et les yeux déjà trop jaunes de ce sorcier gobelin reluirent d'une lueur d'un autre monde. Un échange dans leur langue s'ensuivit, duquel ils ne comprirent que l'hostilité franche qui suintait de ce dialogue à couteaux tirés.

Anatole aurait pu s'intéresser à la scène, mais il était déjà loin : dès leur entrée, il avait aperçu l'étrange idole qui pendait à trente pieds de hauteur, tenues par poulies et cordages depuis la grande plate-forme qui surplomblait tout le fort : la relique de Netheril. Celle de la tapisserie dans la roulotte d'Isobaï. Inanimée, vieillie par les outrages du temps, mais à la magie sensible encore. Un sort lancé depuis plus de trois mille ans. Là. À sa portée. Presque déjà entre ses mains. Un gardien protecteur, dont seul manquait l'amulette qui en contrôlerait les mouvements. Il cria quelques mots en draconique pour qu'on lui accorde de l'étudier en paix, mais ses grands gestes n'impressionnèrent pas beaucoup leurs hôtes, qui ne lui en laissèrent pas le loisir.

Quand il revint vers ses amis, Loxias avait achevé les présentations et le pressait de le rejoindre vers un chemin de ronde qui les mènerait au "palais" de Iarl Noc, en réalité une simple bâtisse de plain-pieds, en rondins grossiers, devant laquelle Iarl Noc les attendait. D'imposante stature, il avait dans son allure quelque chose d’étrange. Des membres trop longs, une démarche instable. Malgré sa mâchoire visiblement endommagée au point d’avoir été remplacée, en toute sa partie inférieure, par une pièce de métal, ce fut le premier à s'adresser à eux dans un excellent commun, érudit, à la limite du raffinement. Il pressa ses serviteurs de préparer la salle du banquet et ordonna aux bergers d'égorger une chèvre en l'honneur de la paix à venir. Le festin serait servi quand la maigre lumière crépusculaire qui baignait la vallée au midi aurait disparu pour laisser place à la nuit pleine. Les préparatifs commencèrent.

Plutôt que rejoindre ses amis au palais, Polaris ne voulut pas abandonner ses chiens, surtout pas Boy, au milieu des gobelins visiblement affamés qui leur jetaient d'étranges regards. Il s'approcha des huttes de torchis et y fut accueilli par un copieux crachat. Manafek, la guérisseuse, passait alors le licol au cou de la dernière chèvre de l'enclos. Polaris comprit vite que Iarl Noc saignait ce fort à blanc pour assouvir ses lubies douteuses, sa "passion des vieilles choses" comme disait Isobaï, et que l'honneur qui leur serait fait pour le dîner de ce soir signifiait, pour le bas peuple des torchis, la famine pour de longs jours à venir.

Dans le palais, Anatole comprit bien vite que l’apparence de Iarl Noc cachait quelque chose d’illusoire, sans tout à fait comprendre quoi. Mais le doute n’allait pas subsister longtemps, car cet étrange personnage entreprit bien vite de jauger ses interlocuteurs et se lança pour cela dans un débat très instruit sur l’histoire du Val et de l’empire Nétheril, sujets sur lesquels Anatole était lui-même intarissable. Il gagna rapidement sa confiance et voulut savoir à quelles sources s’abreuvaient le surprenant savoir de ce gobelin, isolé qu’il était aux confins du monde, sans bibliothèque d’aucune sorte. Iarl Noc proposa alors au mage de Montandre de l’accompagner dans sa chambre pour en savoir plus. Inquiet et prudent, Anatole accepta néanmoins, quoique en s’accompagnant de la rassurante présence de Loxias. Ce fut là, une fois ces trois-là seuls et enfermés à triple tour, que Iarl Noc saisit sa tête des deux mains et la souleva.

Ce n’était pas un gobelin. Iarl Noc était un gnome, et plutôt fluet avec ça. Il leur déballa toute son histoire : deux années auparavant, avant que ne tombe la nuit éternelle, il appartenait encore à une troupe de comédiens qui se rendaient à Hâvredest pour quelques représentations. Mais ils tombèrent dans une embuscade des gobelins de Karkholok au gué de la rivière Rouge. Tous furent massacrés. Tous, sauf lui : Spellix, qui jaillit de la roulotte dans son costume de gobelin rafistolé à la hâte en environné du meilleur sort d’illusion qu’il put concevoir. Il fut adopté par la tribu. Depuis, son apparence impressionnante et sa surprenante intelligence, les adjonctions qu’il fit à l’architecture du fort, les conseils avisés qu’il édicta et son art consommé de l’intrigue de cour l’avaient propulsé à la chefferie, qu’il préservait d’une main de fer. Mais cette main faiblissait et, à présent que la rudesses des temps ne laissait plus le loisir et l’histoire gouverner leurs vies, les gobelins grondaient. Snubsuk, en particulier, avait des envies régicides, il en était certain. Il fallait qu’il s’enfuie, et vite. De là, son idée lumineuse : envoyer Isobaï lui chercher des ambassadeurs des dix villes, et repartir avec eux, en « mission diplomatique ». N’était-ce pas très ingénieux ?
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Re: [CR] D&D 5E — Rime of the Frostmaiden

Message par BenjaminP »

Partie II — Être ou ne pas être chef

Ingénieux, peut-être. Sans risque ? Certainement pas.

Isobaï les avait déjà prévenus : à Karkholok, les passations de pouvoir étaient rarement pacifiques. Même si Iarl Nok lui accordait la régence de toute sa haute autorité, en conclut Loxias face au gnome déguisé, dès lors qu’il quitterait le fort pour n’y plus revenir tout traité de paix négocié et donc toute aide future ou, plus exactement, toute absence d’hostilité auxquelles les gobelins auraient pu consentir sous l’influence de ce gnome habile deviendraient nulle et non avenues. Quant aux espoirs personnels d’Isobaï d’apporter à ce peuple sa sage direction, il n’y faudrait plus compter. Snubsuk la renverserait en un instant sous l’œil des mous et des craintifs, Manafek la guérisseuse, Varfil le grand prêtre de Maglubiyet et tous leurs suivants qui composaient l’immense majorité des forces en présence. D’un autre côté, Iarl Nok était condamné quoi qu’il en soit. La population ne tolérerait plus très longtemps ses caprices alors que leurs estomacs grondaient. L’exfiltration était souhaitable, de même que le transfert préalable du pouvoir afin d’apaiser les mécontents, au moins pour un temps. Quant à la neutralisation de Snubsuk…
Loxias caressait déjà la garde de Vilvagafaïm.

Pendant ce temps, Anatole faisait les cent pas de la pièce, autour des diverses reliques débusquées dans le val par les collecteurs et amassées dans la chambre du chef. Un curieux coffret ovale, parfaitement lisse, attira son attention. Il l’observa longuement, avant de passer à la petite bibliothèque où quelques rares volumes pouvaient l’intéresser, puis à la collection de céramiques, de manches d’armes vermoulues, de lames d’âge canonique au milieu desquels quelques pièces paressaient prometteuses… Rien de plus magique, de plus enchanteur, de plus hypnotique et de plus désirable que l’extraordinaire gardien protecteur, cependant. « Mais dites-moi, Spellix, dit-il soudain en interrompant les calculs politiques de Loxias. Que compteriez-vous faire, si vous menez ce plan à bien, une fois à Montandre ou Hâvredest ? Que ferez-vous de votre collection ?
— Eh bien, maître, je la préserverais avec tout le soin nécessaire, bien entendu ! Ces objets sont à moi, ils m’ont coûté bien des risques et des tracas !
— Oui, oui, c’est entendu, confirma Anatole en se grattant la barbe. Mais au-delà. Comment comptez-vous assurer… leur sécurité ? Que se passerait-il si des personnages mal intentionnés venaient à mettre la main dessus ? »
Il s’approcha de Spellix, l’air sombre.

« Maître… serait-ce une menace voilée que je discerne tout bas ?
— Une menace ? Allons bon ! se défendit Anatole en agitant les bras. Gnome inconscient ! Vous comptez donc amener dans les dix villes cette extraordinaire collection de reliques sans avoir le moins du monde envisagé qu’on puisse vouloir vous la soustraire ?
— C’est que…
— Pauvre fou ! Et nous serions alors responsables, moi et mes camarades, de cette catastrophe ? Hors de question !
— Maitre, je…
— Non, n’insistez pas. Le risque est trop grand. Restez donc là, à tromper Snubsuk, jusqu’à ce qu’il se rende compte de la supercherie. Profitez d’ici là de ce trésor inutile. C’est ce que vous avez de mieux à faire.
Et Anatole se détourna pour laisser s’installer un long silence.
— Maître ? reprit Spellix timidement.
— Moui ? consentit Anatole en tendant une oreille discrète.
— Et si… et si je vous indiquais… une fois confortablement installé bien au chaud dans un logement digne de mon rang dont la propriété me serait assurée jusqu’à la fin de mes jours… et si je vous indiquais… quand nous serons à Hâvredest tous les deux, devant un bon feu brûlant dans ma cheminée en pierre de taille… et si je vous indiquais… où trouver l’amulette qui commande au gardien protecteur ?

L’œil d’Anatole s’illumina alors d’une lueur de malice et de convoitise que jamais Loxias ne lui avait connue.
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Re: [CR] D&D 5E — Rime of the Frostmaiden

Message par Gobelours »

Je prépare actuellement cette campagne et je vous remercie tous pour ce CR qui au-delà du plaisir de la gourmandise de la lecture m'apporte beaucoup de pistes pour "ma" Rime of the frostmaiden  :bierre:
BenjaminP
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Re: [CR] D&D 5E — Rime of the Frostmaiden

Message par BenjaminP »

Gobelours a écrit : dim. nov. 24, 2024 3:24 pm Je prépare actuellement cette campagne et je vous remercie tous pour ce CR qui au-delà du plaisir de la gourmandise de la lecture m'apporte beaucoup de pistes pour "ma" Rime of the frostmaiden  :bierre:

Et c'est bien le but ! Merci de nous lire !

Si tu la prépares en ce moment, vraiment, mon principal conseil serait :

Spoiler:
Introduis dès le chapitre 1 les trois magiciennes de la Confrérie de l'Arcane. En théorie, ils croiseront à Avarice s'ils vont à Caer Dinveal, mais pas les autres. Et croiser Avarice ailleurs permettra d'ouvrir un peu les choses quoi qu'il arrive.
C'est difficile de faire tout le chapitre sans croiser de duergars, mais pareil : introduis-les aussi dès ce premier chapitre si tu sens que les aventuriers risquent de passer à côté sinon. Et pareil pour les druides voués à Auril, qu'on croise à Bremen et à Lonely Wood, mais pas ailleurs. Ce serait dommage de les manquer.
CR 5E fleuris : Rime of the Frostmaiden et le Tribunal d'Islayre

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Gobelours
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Re: [CR] D&D 5E — Rime of the Frostmaiden

Message par Gobelours »

Merci de ces précieux conseils ;)
Je vais réfléchir à comment introduire plus ou moins subtilement tous ces protagonistes et les enjeux associés.
Je crois en effet que faire du foreshadowing est essentiel dans cette campagne.
BenjaminP
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Re: [CR] D&D 5E — Rime of the Frostmaiden

Message par BenjaminP »

J'ai traîné, mais voilà enfin la troisième et dernière partie de la session 14. La 15e devrait se jouer le 10 décembre, les startings sont à bloc.

Partie III — Comme il vous plaira

La chèvre rôtie fut servie par nuit noire, dans la salle des boustifailles, en présence des ambassadeurs des Dix Villes. Le chef Iarl Nok s’était entouré pour l’occasion de la fine fleur du fort, le sorcier Snubsuk, la trappeuse Isobaï, le prêtre Vafil et Manafek, la guérisseuse. Sa garde prétorienne surveillait les débats. Frappant la table de sa corne, il en annonça tout de suite le thème. Karkholok était prêt à signer la paix avec les habitants du Val qui, en retour, leur fourniraient les denrées qui leur manquaient. Arrivé au pic de son discours enthousiaste, il tira de sa poche le traité en question, rédigé au préalable « avec ces messieurs les ambassadeurs », pour l’agiter au nez de ses conseillers illettrés en ajoutant l’œil brillant qu’il irait le signer lui-même, en personne !

C’est à ce moment que le plan faillit bien se gripper. Varfil trouvait cela trop risqué de laisser le fort sans son chef, évidemment, tandis que Snubsuk souriait déjà de toutes ses dents en raison de l’occasion de putsch qu’on venait de lui livrer sur un plateau d’argent avec une chèvre rôtie dessus.

« Gobelines, gobelins ! » intervint alors Anatole, qui sentait bien que laisser la situation en l’état ne pourrait aboutir qu’à la violence dès que Iarl Nok ne serait plus là. Le vieux sage de Montandre proposa alors à l’assemblée un discours madré, précis et éloquent sur la nécessité de préserver l’ordre à Karkholok, ordre sans lequel l’accord ne tiendrait plus et la famine aussitôt reviendrait, pour conclure brillamment, sans jamais lâcher des yeux le vicieux Snubsuk, sur la confiance qu’ils plaçaient en tant qu’ambassadeurs en la personne d’Isobaï, parfaitement à même selon eux d’assurer l’intendance en l’absence de leur chef vénéré.
L’enjeu, bien sûr, était de convaincre Varfil, qui jouait dans la coalition potentielle le rôle de pivot. S’il s’alliait à Snubsuk, la tyrannie vaincrait. Il fallait donc qu’il penche du côté d’Isobaï. La manœuvre était habile et Snubsuk le sentit. Ce fut donc en s’ôtant un morceau de viande coincé entre deux canines à la pointe de son coutelas qu’il décida de changer de pied, et de devenir menaçant. « S’il arrivait la moindre chose à notre Iarl Nok bien aimé, humains, il va de soi que tout notre accord tombe à l’eau, n’est-ce pas ? »
Anatole hésita un instant à moucher lui-même l’impudent sorcier, mais jugea finalement préférable de laisser Iarl Nok s’en charger, ce qui conféra un surcroît de légitimité interne à Isobaï.

C’est donc Iarl Nok qui a jeté les dés à ce moment-là, aidé par le discours d’Anatole (donc avantage). Il fit un joli petit 17, ce qui n’était pas mauvais évidemment, mais j’avais fixé 20 comme seuil pour emporter l’adhésion générale, celle de Snubsuk en particulier. Il fut donc décidé que Varfil était conquis à cette idée, mais toujours pas le sorcier Snubsuk.

Il n’en fallut pas plus à Loxias pour comprendre ce qui se jouait-là. Il prévint aussitôt Polaris de garder un œil toute la nuit sur Isobaï, tandis que lui et Anatole veillerait sur Iarl Nok. Polaris, plutôt satisfait de pouvoir passer la nuit au grand air avec Boy plutôt que dans les relents de rôti, accompagna donc Manafek et Isobaï dès la fin du repas jusqu’aux huttes en torchis, laissant Loxias sceller l’alliance avec Varfil et le Iarl autour de la bouteille de gnole qu’il tenait de Romak, le tavernier de Châteauroi, débouchée pour l’occasion.

Ce fut peu avant l’aube pâle que Boy grogna pour réveiller son maître. Il y avait du mouvement, vers la cour. Polaris plongea alors dans les yeux de son chien, qui devinrent les siens pour quelques minutes. Il put alors assister à loisir à ce qu’il se jouait là-bas, près de la porte, où Snubsuk avait assemblé une petite équipe qui déjà sellait les worgs. Hésitant à déclencher d’emblée les hostilités, son jeune cœur revint finalement à la raison. Si Snubsuk parvenait à tuer Iarl Nok, raisonna-t-il, la collaboration de Varfil ne leur serait plus du tout assurée. Snubsuk était donc certainement en train de préparer une embuscade qui les cueillerait sur la route du retour. Il s’agissait alors simplement de l’empêcher de jouir d’une situation aussi favorable. Polaris s’en alla réveiller Isobaï et la pria d’aller demander séant à Snubsuk ce qui motivait ce départ trop discret, avec les meilleurs guerriers du fort, en ce jour où le départ de leur chef vénéré les rendaient plus que jamais indispensables pour leur sécurité à tous. Pris ainsi à partie en public, alors que Varfil et Manafek, réveillés par l’esclandre, sortaient de leur tanière, Snubsuk dut à regret renoncer à son entreprise précoce.

L’aube vint, un peu moins timide si près de l’échine, mais si loin encore des éclats qu’on lui connaissait il y a trois ans à peine. Nos héros attelèrent leurs traîneaux, qu’ils chargèrent lourdement des trésors de Iarl Nok, en particulier du gardien protecteur élevé au rang de symbole officiel du traité d’alliance à venir, l’offrande des gobelins aux Dix Villes. Tandis que Iarl Nok s’afférait de son côté à ses derniers préparatifs, Loxias offrit une dernière poignée de main franche mais ferme à Isobaï, une poignée de main qui voulait dire, « nous nous sommes compris, j’espère que nous continuerons de nous comprendre, sans quoi… » Il laissa planer en suspens les derniers mots, tandis que sa main revenait à sa garde. Polaris au cœur tendre alla un cran plus loin. Sentant que la trappeuse, malgré ses dénégations, ne disposaient pas encore tout à fait d’un suffisant crédit auprès des siens pour les mobiliser tous au cas où Snubsuk déciderait de prendre les armes, il décrocha de son cou le collier formé d’un petit crâne de corbeau percé d’une pointe de flèche, et le lui tendit. Ce collier lui avait été remis par un fier chasseur orc qu’il avait sauvé d’une mort certaine lors d’un blizzard. En soufflant trois fois dessus, elle pourrait ainsi appeler à son aide les esprits de la tribu des mille flèches.

Et c’est ainsi que nos héros purent repartir de Karkholok en paix et en amis au côté de son Iarl. Au bout de quelques miles, le Iarl quant à lui put jeter au fond d’une crevasse son masque de gobelin et redevenir le gnome Spellix, à son grand soulagement. Il avait survécu à cette comédie qui avait tant duré et dont l’issue aurait pu lui être autrement plus mortelle. Dans les Dix Villes, il pourrait reconstruire sa vie, si la Vierge de Givre voulait bien le lui accorder.

C'était plutôt bien joué et, dans l'ensemble, il aurait été je crois difficile d'obtenir un meilleur résultat pour cette session tout en coup de théâtre et en secrets d'alcove. Le 20 au jet de persuasion lors du dîner aurait pu jouer ce rôle, mais finalement le dernier geste de Polaris le rend superflu, puisqu'il donne concrètement à Isobaï le moyen de résister à Snubsuk, dont l'adhésion n'est donc plus obligatoire pour la survie de l'Alliance (et du Fort, puisque, sous la direction Snubsuk, on voit assez comment tout cela tournerait). Anatole a pu récupérer la relique de Netheril, et Loxias continuer à jouer le parfait agent de Helm pour la paix du Val. Bravo à eux !

Spoiler:
C'est bien sûr la relique de Netheril qui va m'aider à propulser la suite. On va l'amener jusqu'à Hâvredest, d'où je pourrais faire resurgir les duergars et peut-être même la sorcière du lac, et puis ils pourront partir vers la tour inversée de Dzaan à la recherche de l'amulette de contrôle. On en a donc encore pour quelques sessions dans le chapitre 2, après ces deux éléments rayés de la liste : la cabine calcinée, et le fort des gobelins. Après la tour, je verrais s'il est nécessaire d'en caser une de plus avant que Sardhane, la momie elfique, ne leur propose de retrouver le cor des Géants — celui qui permet de fendre le Reghed et ainsi accéder à la cité d'Ythrin. Ceux qui connaissent la campagne savent bien que les chapitres 3 et 4 viendront s'intercaler quelque part par-là.
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Re: [CR] D&D 5E — Rime of the Frostmaiden

Message par BenjaminP »

Nous avons joué la quinzième session hier, très riche en événements, sur un format bien resserré à coups d'ellipses, d'où la structure que vous allez découvrir. Mon objectif est à présent de boucler le chapitre 2 pour le mois de mars.

Épisode 15 — Prologue. La main de lumière

Sahrane avait enfin trouvé chez Anatole les ingrédients de son rituel. Un bec de corbeau. Un rameau de genévrier pour tenir lieu d'arbre de givre. De l'encens des plaines sèches. Du guano de chauve-souris. Des billes de verre translucides. Ne manquait plus que la main de lumière, cette puissante focale qui lui permettrait de tendre la Toile et d'envoyer son regard au loin, jusqu'à ce mithalar dont elle sentait la distante présence. Elle leva bien haut le hachoir trouvé dans la cuisine et l'abattit sur son poignet.

De la main qui lui restait elle alluma un cierge dont elle fit goutter quelques gouttes de cire au coeur de la paume posée sur le billot, avant de l'y fixer. La peau parcheminée craqua en toutes ses phalanges et les doigts ravagés par le temps se recroquevillèrent. La Toile avait accepté son offrande, l'offrande d'une gardienne du nord et servante d'Eilistrae que la déesse avait trop longtemps préservée de la mort. Elle prononça les mots et ferma les yeux.

Elle les rouvrit. Elle parcourait les cieux au-dessus de la toundra dans le corps d'un corbeau, loin à l'est, jusqu'au glacier du Reghed qu'elle survola avant d'y plonger. Au contact de la glace le corbeau laissa place à un ver de givre et elle s'enfouit profondément avec lui jusqu'à trouver une grotte, une gigantesque grotte qui l'attirait à elle. Le ver s'agita et devenue chauve-souris elle put battre des ailes et poursuivre jusqu'en bas, jusqu'à la source, au mithalar de Netheril qui étincelait de nouveau après des milliers d'années de sommeil.

Anatole entra à ce moment de le laboratoire, fourbu du retour, du long entretien qu'ils avaient eu avec le prévôt Markham, des arrangements passés pour assurer à Spellix et son trésor un lieu sûr à Hâvredest, de tout ce qui l'avait tenu ainsi éloigné de la chaleur d'un feu et de la tasse de verveine fumante à laquelle il rêvait depuis leur départ pour Karkholok. Sahrane reprit conscience alors qu'il notait avec effroi son poignet sectionné. "Mais enfin, Ma Dame, qu'avez-vous fait là ?
— J'ai vu le lieu où déposer la Coupe du souvenir des miens, maître Anatole. Le mithalar est sous le glacier du Reghed. Il fonctionne de nouveau.
— Sous le glacier ? Mais, Sahrane, comment nous y rendrions-nous... ?
Anatole s'affairait déjà à trouver dans le fatras de son laboratoire quelque chose pour fixer la peau de la momie qui déjà remontait le long de son cubitus apparent.
— Le cor des géants, maître Anatole. Les géants du glace qui peuplaient le Valbise autrefois s'en servait pour remodeler des plaines entières. Je le trouverai.
— Sahrane, vous ne comptez pas... ?"
Il orienta un oeil inquiet vers la main de lumière dont la flamme s'éteignait. La maigre étincelle qui luisait dans le regard de Sahrane s'était déjà beaucoup amenuisé et Anatole fut soudain très inquiet de ce que comptait faire la gardienne du Nord. Il se jura de trouver un moyen de la préserver.
Perché sur le rebord de la fenêtre, un corbeau la regardait, avide.

Spoiler:
Oui, je me sers impitoyablement de Sahrane pour déclencher le jarlmoot, c'est ainsi. Ça me paraît plus naturel et ça m'évite le coup de la druidesse de glace traîtresse, déjà vue avec Ravisin. Et puis ça nous a donné une scène qu'avait quand même grave de la gueule !
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