Premier test de Marins de Bretagne en forme libre sur une session de 2h à l'occasion d'une partie radiophonique !
Jeu : Marins de Bretagne, un jeu de conte et de rôle dans une Bretagne imaginaire
Joué le 30/01/2017 au studio de la radio Plum'FM (Sérent, Morbihan) pour l'émission Des Luds et des Plums
Enregistrement à découvrir ici
Personnages : Arthur l'ours, la petite souris, Conan Meriadec, la mouette, le gardien de phare à la retraite

crédits : Calcineur, licence cc-by-sa, galerie sur wikimedia commons
L'histoire :
Une ville sur la côte. Trois petites vieilles en costume traditionnel viennent trouver le gardien de phare à la retraite. Elles s'alarment du fait que les gardiens de phare qui l'ont remplacé à son poste se succèdent à rythme effréné sans garder la place. Personne ne semble vouloir rester bien longtemps à s'occuper du Phare de Tévennec, qui protège le dangereux passage entre la pointe du raz et l'île de Sein.
Les vieilles craignent que le phare soit abandonné... ou pire, qu'on y installe un système automatique !
À cette éventualité, le vieux gardien de phare se secoue. Malgré son côté bougon et solitaire, engoncé dans son ciré, couvert de mollusques aussi vieux que lui, le gardien refuse de laisser son phare à l'abandon. Tout en maugréant sur l'incompétence de ses successeurs, il commence à rassembler matériel, vivres et lampe torche. Les vieilles lui confient du kig ha farz pour la route.
À bord de sa barque montent tous ses amis, malgré son refus. Il y a cet homme qui pense être la réincarnation de Conan Meriadec, guerrier breton qui lutta jadis contre l'envahisseur, et en qui le gardien voit juste un énergumène qui agite une épée en bois. Il y a cette petite souris qui vit d'habitude dans un trou de rocher et saute dans la valise du gardien. Il y a une mouette, et enfin il y un ours venu de la forêt de Brocéliande. Il a pris un sapin pour repiquer sur le rocher du phare, avoir son coin de forêt là-bas. Quand il monte dans la barque avec son sapin, il la fait dangereusement pencher de son côté.
Le gardien se masque les yeux. C'est évident que les animaux parlants n'existent pas. Cette souris, cette mouette et cet ours sont sûrement des hallucinations. Le gardien est un homme rationnel !
Alors que sa barque quitte le port, les trois vieilles agitent leurs mouchoirs dans sa direction. C'est qu'elles le trouvent beau, ce gardien. Et c'est toujours un cœur à prendre. Alors que la barque s'éloigne, on aperçoit les vieilles sur le port se chamailler pour savoir qui aura le droit de danser au prochain fest-noz avec le gardien à son retour.
La mouette a pris une cargaison de poissons pour toute l'aventure. Alors que la barque file sur l'océan, une cohorte de goélands, de cormorans et de mouettes fond sur l'embarcation. L'ours et la mouette veulent se battre pour défendre la poiscaille, mais les autres cèdent et jettent les poissons aux oiseaux de mer. La mouette et l'ours ne parviennent qu'à garder un poisson chacun.
La barque arrive au Phare de Tévennec, un phare blanc et carré adossé à une maison, perché sur un îlot rocheux battu par les eaux. Le ciel sur la façade océanique est chargé d'immenses nuages noirs. Une tempête se prépare !
Ils accostent, assurent les amarres de la barque et gravissent de raides escaliers à flanc de rocher vers l'entrée du phare. Ils y croisent les époux Ronan et Soizig Quenneré, les derniers gardiens du phare, qui sont justement à déménager, crêpière et billig sur le dos. Ils expliquent aux gardiens les malheurs qui ont frappé leur prédécesseur et explique qu'ils préfèrent mettre les voiles en pleine menace de tempête plutôt que de passer une nuit de plus ici : un gardien est mort dans son lit, l'autre a vu son père venu lui rendre visite emporté par une lame, un autre encore s'est tué en se sectionnant l'artère fémorale accidentellement ou un dernier ne put qu'assister impuissant à la naissance prématurée de son fils, qui mourra quelques temps plus tard.
Un prêtre a même été amené sur place, bénir le rocher et son phare, sans succès. Le gardien à la retraite ne voit là qu'une succession d'accidents imputables à la maladresse de personnes incompétentes. Mais ses amis commencent à se demander si le phare ne serait pas maudit. L'autre raison qui pousse les époux à partir, c'est que le ravitaillement n'advient que tous les deux mois et que le pain leur arrive rassis.
Laissant les époux filer d'ici, l'équipe découvre au pied du phare un rocher avec l'empreinte d'un corps humain. Ce qui étonne le gardien, c'est qu'il se souvient du rocher, mais pas de l'empreinte, qui a pourtant l'air très ancienne.
L'équipe prend possession du phare. Le gardien vérifie l'installation électrique, il constate qu'une partie des ampoules sont grillées et que le compteur et le groupe électrogène font des leurs, mais rien d'insurmontable.
L'ours touche l'empreinte du corps dans le rocher. Il se retrouve alors projeté dans le passé ! Ce que voient les autres, c’est un ours qui délire et leur raconte sa vision. Il vient d'échouer sur cette même île, au milieu des débris de son navire. Il comprend qu'il revit ce qu'a vécu l'homme dont le rocher porte l'empreinte. À cette époque, le phare n'existe pas encore. Il est le seul survivant du naufrage. Il attend des secours qui n'arriveront jamais. Il s'affale sur un rocher et y laisse son empreinte.
L'ours commence à explorer ce souvenir magique pour en savoir plus. Il fait le tour de l'île et découvre des ombres noires qui nagent vers l'île : les esprits des premiers naufragés. Il leur crie de venir se réfugier sur l’île du phare.
Conan secoue l’ours pour qu’il se réveille avant d’appeler les esprits mauvais. L’ours s’ébroue et se réveille, et pousse Conan à l'eau. Conan rebondit contre les récifs et tombe dans un creux d’eau entre deux bras de roche. Il voit au fond de l'eau une barque de pierre, le Bag Noz ou barque des morts, et un homme à sa proue qui pourrait être celui qui a laissé son empreinte sur le rocher. Il appelle Conan à lui et l’attrape de ses bras crochus. Conan se débat et l'ours l'aide à sortir de l'eau avant qu'il ne soit trop tard.
Le temps menace trop, il vaut mieux que tout le monde rentre dans le phare. On entend gémir les esprits des morts
La petite souris trouve dans le placard les seules provisions des Quenneré ; des biscuits véreux qu'elle grignote avec délice.
L'ours va dans les chambres. Le premier lit est trop petit. Le suivant est trop mou. Le troisième est juste comme il se faut, et il se vautre dessus. C’est alors qu’il entend des bruits de pas au-dessus de sa tête. Avec la souris en renfort, il va vérifier de quoi il en retourne dans le grenier de la maison de phare. Il y a un vieux coffre qui contient une chemise de noyé qui reste perpétuellement humide. L'approcher du feu de cheminée n'y change rien. Ce pourrait être la chemise de l'homme empreint sur le rocher.
La mouette et la souris explorent les abords de l'île et découvrent l’épave du bateau naufragé. Elles y trouvent un vieux livre : le journal de bord du premier navire qui s'est naufragé ici. Elles essayent de s'en emparer mais de très violentes bourrasques emportent le livre dans les airs. La souris chevauchent la mouette et elles luttent contre les éléments en furie pour rattraper le livre, mais n'en sauvent qu'une page.
Le gardien est allé dans le garde-manger ranger ses vivres. Toutes les lumière s'éteignent brusquement, une silhouette le frôle. Il allume sa lampe de poche. Personne. Pourtant, si quelqu'un l'a frôlé, il était forcément dans cette pièce.
Le gardien monte l'escalier qui conduit à l'ampoule du phare. Une voix fantomatique se met à l'appeler : "Henri ! Henri !". C'est sidérant parce que c'est son nom de baptême, un nom qu'il cache à tout le monde parce qu'il ne l'aime pas.
Le gardien appelle à l'aide. Conan monte le chercher mais il est passé à tabac par une force invisible. Il tient bon, pourtant, et tous deux se hissent au sommet du phare. Ils voient un chalutier en difficulté au milieu des vagues déchaînée, et parviennent à rallumer le phare in extremis pour sauver le navire du naufrage. Le gardien utilise la radio crachotante pour dire à l'équipage de s'éloigner des récifs.
Le gardien découvre que des câbles électriques du phare ont été grignotés. Dans son coin, la souris se frotte les mains avec un petit rire maléfique...
La souris et la mouette ramènent l'unique page de journal qu'elles ont sauvées. La page raconte que le navire devait être béni par un prêtre avant de partir, mais ce prêtre a eu du retard et le capitaine a donné l'ordre de mettre le large sans attendre sa bénédiction.
Toute l'équipe se réunit dans la maison. A l'exception du gardien qui campe sur des positions rationnelles, tout le monde pense que le phare est maudit. Un bateau a pris la mer sans bénédiction, il a fait naufrage, et depuis les esprits des morts sont autour de l'endroit et veulent du mal à ses occupants et aux navires qui s'en approchent. Depuis le ciel, la mouette a d'ailleurs vu toute une meute de fantôme noirs et hurleurs converger vers le phare.
Ils cogitent à une solution et se mettent d'accord sur l'idée qu'il y a quelque chose à faire avec la chemise du noyé. Le gardien veut la jeter au feu dans l'espoir de la sécher. Conan la lui arrache des mains, il la confie à l'ours pour qu'il en rhabille le rocher à l'empreinte. L'ours sort en pleine tempête. Mais au lieu d'écouter Conan, il lance la chemise dans l'air pour l'offrir aux fantômes noirs ! La chemise s'envole dans le vent furieux. Fouetté par des vagues scélérates, l'ours veut rentrer dans la maison, mais le gardien, persuadé que l’ours n’existe pas, a fermé la porte ! L’ours défonce la porte, et rentre dans la maison du phare, avec lui les bourrasques et les fantômes noirs hurleurs.
La mouette et la souris prennent leur vol et bravent à nouveau la tempête. Vingt fois elles manquent d'être dispersées dans les airs, et vingt fois elles trompent la violence du vent et de la pluie. Elles parviennent à récupérer la chemise du noyé et foncent l'enfiler sur le rocher à l'empreinte.
Aussitôt la tempête cesse pour laisser place à une mer d'huile et un ciel d'azur. Dans ce calme soudain revenu, le rocher se transforme en homme : le fameux rescapé du naufrage. Il les remercie.
Une barque de pierre sort des eaux. Il monte à bord et s'éloigne, escorté par les fantômes noirs. Le phare est délivré de la malédiction.
Le gardien et toute sa fine équipe reviennent sur la côte. Le gardien est déprimé : tous ses phénomènes surnaturels le font douter de sa propre raison. Il va noyer son mal-être dans le pub du coin, où on lui sert une Guinness consolatrice, et aussi du kig ha farz. Les petites vieilles sont là, elles accusent le tenancier du pub de leur avoir volé leur recette de kig ha farz. Pirate ! Elles félicitent le gardien pour sa prouesse et le pressent de se choisir une prétendante parmi elles. Le gardien refuse qu'on lui serve une deuxième Guinness et sort chercher un médecin. Le tenancier, navré de perdre un fidèle client, se dit pourtant que le gardien a bien fait d'aller consulter. Il leur parlait tout le temps d'un ours, d'une mouette, d'une souris et d'un énergumène avec une épée de bois qu'il était le seul à voir.
Arthur l'Ours est rentré dans sa forêt à Brocéliande. Il se répète pour mieux s'en persuader : "Mais les gardiens de phare qui parlent, ça n'existe pas !"
Personnages :
Arthur l'ours,
Protéger la forêt
Bougon, mais ça dépend avec qui
Sapin
Petite souris
vit dans un trou de pierre
sarrasin
habite dans la valise du gardien
Conan Meriadec
meneur d'hommes
chef de guerre
couteau
corde
briquet
lutte contre les envahisseurs
Le gardien de phare à la retraite
solitaire
vit sur la côte
bougon
ciré jaune
couvert de mollusques
festnoz
Mouette
suit les chalutiers
bouffer du poisson
chier sur les gens
Commentaires :
Durée :
1/4h de création de personnage, 1h3/4 de jeu en comptant les pauses musicales durant lesquelles on discutait du rythme, 1/4h de debriefing
Règles :
Marins de Bretagne en forme libre. C'est une variante présente dans le livre de règles. On conserve le pierre-feuille-ciseaux pour trancher les désaccords, mais la différence c'est qu'on enlève la structure narrative (recherche d'un ami, franchissement d'un obstacle, quête de la baleine blanche) et qu'on rajoute un meneur de jeu (moi) qui incarne le décor et les figurants et fournit une intrigue.
Défis :
+ Réussir à faire jouer une partie en forme libre sur une durée assez conséquente. J'avais déjà tenté, mais sur une demi-heure et j'avais été mitigé sur le résultat.
+ En faire quelque chose de radiophonique.
+ Jouer sans préparation préalable autre qu'un bref repotassage de la revue Hors Série N°15 magazine Bretons (avril 2013) : Contes et légendes de Bretagne.
Mise en jeu :
+ J'ai demandé aux joueurs de créer leurs personnages, et je m'en suis inspiré pour tricoter mon intrigue et mes péripéties au fur et à mesure. J'avais noté toutes les infos sur les personnages et ça me servait de feuille de route.
+ La description des malheurs des gardiens de phare successifs est une citation directe de l'article Tevennec : la malédiction des gardiens de phare. En fait, je suis parti du personnage du gardien de phare et c'est bien tombé parce que j'avais relu cet article avant de partir. J'ai ouvert l'article et ça m'a plus ou moins servi de scénario. Je n'avais plus qu'à remettre en mouvement cette histoire qui était figée est sans dénouement.
+ Je me suis permis un peu de vertige logique avec l'ours qui voyage dans le passé. Je ne sais plus exactement comment on est arrivé là, mais ça a fonctionné parce qu'on a gardé la scène courte.
Debriefing :
+ Finalement, tout le monde a trouvé qu'on s'en était bien sorti avec des règles pourtant minimalistes. C'est grâce à mon expérience en impro et à une équipe super dynamique qui a su faire vivre ses personnages. Ce que j'ai apprécié, c'est que comme on était tous au taquet, il y a eu de vrais moment de tension, notamment dans les scènes de tempête, alors qu'on gérait tout avec un bête pierre-feuille-ciseaux ! C'était vraiment une partie vivante. Bien plus simple que Millecrocs (ma précédente partie dans cette émission de radio) qui était certes une partie forte pour les joueurs mais le Phare Maudit était certainement plus radiophonique !